Définition :
Cas particulier d’information imparfaite sur le marché dans lequel les agents économiques ne disposent pas du même niveau d’information.
L'essentiel :
Selon la théorie néoclassique, la concurrence pure et parfaite est fondée sur la transparence du marché, c’est-à-dire une information complète pour tous les agents économiques. La microéconomie traditionnelle suppose en effet des agents rationnels agissant dans un système de marché complet, c’est-à-dire un marché où toute l’information est disponible.
Pourtant, dans la réalité, l’information est souvent imparfaite. C’est le postulat de la nouvelle microéconomie. Il existe donc des défaillances du marché dans les cas d’asymétrie d’information, mais aussi d’externalité et de bien collectif.
L’information est asymétrique lorsqu’un seul des deux coéchangistes dispose d’une information complète. C’est donc une situation particulière d’information imparfaite qui favorise l’incertitude, modifiant ainsi la rationalité des agents, ce qui crée de nouvelles modalités d’échange.
Deux cas d’information asymétrique sont étudiés par l’analyse économique. Tout d’abord, l’asymétrie peut se situer en amont du contrat. C’est le cas où l‘un des agents détient une information sur le bien qu’il ne partage pas. Le risque est alors que le coéchangiste, faute de transparence, sélectionne le mauvais produit (le plus souvent du fait de son prix plus bas). C’est ce que George Akerlof a appelé la sélection adverse ou l’antisélection : les mauvais produits sont choisis plutôt que les bons à cause d’une information incomplète. A côté de cette défaillance d’information exogène, il existe le cas où c’est une information endogène qui fait défaut. C’est ce qu’on nomme l’aléa moral ou risque moral : l’un des agents ne respecte pas sa part du contrat. Le salarié qui ne s’engage pas dans son travail, l’assuré qui ne prend pas les précautions attendues, l’expert qui impose des procédures coûteuses, autant de situations dans lesquelles un des agents, incapable de juger de la qualité de la prestation, subit les décisions de l’autre. L’aléa moral tient donc au fait que l’agent mal informé n’est pas en mesure de contrôler l’action de son partenaire, qui peut en profiter pour adopter un comportement opportuniste.
Les deux exemples de sélection adverse les plus souvent cités sont celui des voitures d’occasion, analysé par George Akerlof, et celui des assurances, présenté par Joseph Stiglitz et Michael Rothschild. Dans les deux cas, la sélection adverse a tendance à chasser les bons produits du marché, dans la mesure où seuls les mauvais produits sont sélectionnés, et les bons assurés c’est-à-dire ceux dont le risque d’accident est le plus faible. A terme, cela peut même conduire à la disparition du marché. En effet, lorsque certains agents ne peuvent pas connaître la qualité exacte de chaque produit, ils sont amenés à opter pour un prix reflétant l’ensemble des produits se trouvant sur le marché, une sorte de moyenne des prix de tous les produits incluant ceux de bonne qualité et ceux de mauvaise qualité. À ce prix-là, le vendeur bien informé refuse de vendre ses produits de bonne qualité car leur valeur est supérieure. A l’inverse, l’acheteur refuse d’acheter des produits de moindre qualité. C’est donc la question de la confiance qui se retrouve au cœur de cette défaillance du marché.
Il est possible de limiter ces phénomènes d’antisélection. Une première solution consiste à envoyer un signal, c’est-à-dire une information sur la qualité du produit permettant à l’agent économique de prendre une décision. Les garanties offertes aux clients par les vendeurs de voitures d’occasion relèvent de ce type de message de qualité. Les formules d’échange et de remboursement ont la même portée. Cette méthode du signal se traduit, sur le marché du travail, par la demande de références et de diplômes, lors de l’embauche.
Une deuxième solution consiste à émettre des règles, des procédures, des concours, etc. Ces procédures sont autant de méthodes visant contraindre l’un des agents à transmettre l’information qu’il détient. Toutes ces procédures ne sont pas sans limites.
Dans le cas de l’aléa moral, deux situations peuvent se présenter : soit l’un des agents ne peut contrôler l’autre, soit il contrôle l’action réalisée mais pas le niveau d’information la justifiant. Ici, les solutions ne passent donc pas par un niveau plus élevé d’information mais par une incitation à des comportements appropriés.
Les marchés financiers illustrent les enjeux de l’aléa moral. L’encadrement juridique du délit d’initié est une traduction assez évidente des problèmes qui peuvent naître d’un avantage informationnel pour un agent. L’encadrement des banques qui, compte tenu de leur taille (too big to fail), prennent des risques considérables en matière de spéculation.
Le risque systémique analysé par Michel Aglietta renvoie en grande partie à des questions d’asymétrie d’information.
Voir le cours de : Première Comment l'assurance et la protection sociale contribuent-elles à la gestion des risques dans les sociétés développées
3 questions à : (à venir)
1) Quelle relation entre l’aléa moral et les crises bancaires ?
2) Les marchés financiers sont-ils des marchés où l’information est asymétrique ?
3) L’encadrement des banques peut-il atténuer l’aléa moral ?