Synthèse
Déroulé du chapitre :
QUESTION 4: comprendre et illustrer la distinction entre déviance et délinquance.
QUESTION 5: comprendre et illustrer les difficultés de mesure de la délinquance.
Conforme au programme officiel (BO)
-
la déviance comme produit de différents processus sociaux
Comme nous venons de le voir, au delà de la transgression d'une norme, la déviance s'analyse aussi comme le produit de différents processus sociaux; c'est l'axe de recherche privilégié par le courant interactionniste à partir des années 60. En effet les sociologues partisans de ce point de vue estiment qu'il est nécessaire de remettre en question l'hypothèse d'uniformité des normes et des valeurs au sein d'une société. Dès lors, la déviance s'explique bien par l'interaction sociale et notamment par le fait qu'un groupe peut faire prévaloir son système de normes et de valeurs et ainsi désigner comme déviants tous ceux qui ne s'y conforment pas.
Ce constat fait donc bien de la déviance un concept relatif qui doit d'être expliqué par l'étude et la compréhension des trajectoires sociales.
-
la déviance comme résultat de l 'étiquetage
Howard Becker en 1963 propose dans son essai Outsiders une étude qui fait référence dans le renouveau de l 'analyse de la déviance. Sa théorie de l 'étiquetage permet de comprendre le processus de déviance au travers de trois étapes spécifiques.
La première étape est celle de la transgression d'une norme; ce moment ne constitue pas fondamentalement la déviance car Becker explique que l 'acte peut-être «secrètement» déviant (transgressant mais non perçu comme tel) ou «pleinement» déviant ou encore «accusé à tort» (obéissant à la norme mais jugé comme déviant) selon la perception sociale de l'acte par la société.
Ainsi la déviance est bien le résultat de «l 'étiquette» (ici négative) apposée à un individu par le groupe qui a su imposer son système de normes «les entrepreneurs de morale». Il s'agit ici de la deuxième étape constitutive de la déviance: un déviant est donc: «celui auquel cette étiquette a été appliquée avec succès» selon les termes de Becker.
Enfin, la troisième étape est constituée par l'entrée dans «la carrière déviante»; l'individu intègre alors un groupe socialement organisé qui attribue à ses membres une légitimité et un sentiment d'appartenance à ce groupe et qui suppose des apprentissages et des phases socialisantes. Ainsi, Becker qui a déjà montré que la déviance n'est pas liée à une prédisposition ou une intention de trangresser prolonge le raisonnement en ajoutant l 'idée d'apprentissage où l'individu après avoir été socialement étiqueté entre dans une sorte de mécanisme autoréalisateur. La dernière dimension de cette carrière est donc une transformation identitaire des personnes étiquetées qui se reconnaissent désormais dans une sous-culture déviante, même s' il faut bien comprendre que cette carrière n'a rien d'automatique.
-
la déviance comme résultat de la stigmatisation
Avec son essai Stigmate (1975), Erving Goffman insère une nouvelle perspective dans l'analyse interactionniste de la déviance; partant de l 'étymologie grecque du terme-le stygma étant la marque physique d'infamie- le sociologue propose une définition de la déviance encore plus spécifique. En effet, il énonce le fait que l 'identité d'un individu est à la fois sociale, c'est à dire composée des attendus de la société en fonction du statut et des rôles de l 'individu et réelle c'est à dire composée de ses attributs effectifs ; partant de ce principe Goffman explique que parfois l'identité sociale est disjointe de l'identité réelle. Ce décalage peut constituer un stigmate et entrainer un discrédit. Ces stigmates peuvent être de natures différentes: physiques, psychologiques, culturelles etc , et aboutissent à des sanctions sociales et/ou juridiques qui peuvent entrainer les individus dans des carrières déviantes, mais là encore il n'y a pas d'automatisme et la plupart du temps les individus tentent de contrecarrer ces stigmatisations et cherchent à masquer ces caractéristiques «non conformes».