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la déviance comme produit de différents processus sociaux
Comme nous venons de le voir, au delà de la transgression d'une norme, la déviance s'analyse aussi comme le produit de différents processus sociaux; c'est l'axe de recherche privilégié par le courant interactionniste à partir des années 60. En effet les sociologues partisans de ce point de vue estiment qu'il est nécessaire de remettre en question l'hypothèse d'uniformité des normes et des valeurs au sein d'une société. Dès lors, la déviance s'explique bien par l'interaction sociale et notamment par le fait qu'un groupe peut faire prévaloir son système de normes et de valeurs et ainsi désigner comme déviants tous ceux qui ne s'y conforment pas.
Ce constat fait donc bien de la déviance un concept relatif qui doit d'être expliqué par l'étude et la compréhension des trajectoires sociales.
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la déviance comme résultat de l 'étiquetage
Howard Becker en 1963 propose dans son essai Outsiders une étude qui fait référence dans le renouveau de l 'analyse de la déviance. Sa théorie de l 'étiquetage permet de comprendre le processus de déviance au travers de trois étapes spécifiques.
La première étape est celle de la transgression d'une norme; ce moment ne constitue pas fondamentalement la déviance car Becker explique que l 'acte peut-être «secrètement» déviant (transgressant mais non perçu comme tel) ou «pleinement» déviant ou encore «accusé à tort» (obéissant à la norme mais jugé comme déviant) selon la perception sociale de l'acte par la société.
Ainsi la déviance est bien le résultat de «l 'étiquette» (ici négative) apposée à un individu par le groupe qui a su imposer son système de normes «les entrepreneurs de morale». Il s'agit ici de la deuxième étape constitutive de la déviance: un déviant est donc: «celui auquel cette étiquette a été appliquée avec succès» selon les termes de Becker.
Enfin, la troisième étape est constituée par l'entrée dans «la carrière déviante»; l'individu intègre alors un groupe socialement organisé qui attribue à ses membres une légitimité et un sentiment d'appartenance à ce groupe et qui suppose des apprentissages et des phases socialisantes. Ainsi, Becker qui a déjà montré que la déviance n'est pas liée à une prédisposition ou une intention de transgresser prolonge le raisonnement en ajoutant l 'idée d'apprentissage où l'individu après avoir été socialement étiqueté entre dans une sorte de mécanisme autoréalisateur. La dernière dimension de cette carrière est donc une transformation identitaire des personnes étiquetées qui se reconnaissent désormais dans une sous-culture déviante, même s' il faut bien comprendre que cette carrière n'a rien d'automatique.
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la déviance comme résultat de la stigmatisation
Avec son essai Stigmate (1975), Erving Goffman insère une nouvelle perspective dans l'analyse interactionniste de la déviance; partant de l 'étymologie grecque du terme-le stygma étant la marque physique d'infamie- le sociologue propose une définition de la déviance encore plus spécifique. En effet, il énonce le fait que l 'identité d'un individu est à la fois sociale, c'est à dire composée des attendus de la société en fonction du statut et des rôles de l 'individu et réelle c'est à dire composée de ses attributs effectifs ; partant de ce principe Goffman explique que parfois l'identité sociale est disjointe de l'identité réelle. Ce décalage peut constituer un stigmate et entrainer un discrédit. Ces stigmates peuvent être de natures différentes: physiques, psychologiques, culturelles etc , et aboutissent à des sanctions sociales et/ou juridiques qui peuvent entrainer les individus dans des carrières déviantes, mais là encore il n'y a pas d'automatisme et la plupart du temps les individus tentent de contrecarrer ces stigmatisations et cherchent à masquer ces caractéristiques «non conformes».
DOCUMENT 1: la déviance est un processus interactif
«Deviens ce que tu es»,écrivait Friedrich Nietzsche. Née garçon en1965 à Roubaix (Nord) – elle préfère que ne soit pas publié le prénom qui lui avait été attribué à la naissance –, Marie Cau est devenue, le 15mars, la première maire transgenre élue en France. Un long parcours pour cette femme qui nous accueille dans sa mairie de Tilloy-lez Marchiennes. En portant à sa tête cette consultante en organisation et management de 55ans, ce coquet village résidentiel de 530 habitants, niché au cœur du parc naturel régional Scarpe-Escaut, à une quarantaine de kilomètres de Lille, ne s’attendait pas à bénéficier d’une telle notoriété internationale. Son nom, désormais, et surtout celui de sa maire, ont fait le tour du monde. Un long parcours.:«C’est un cheminement médical mais aussi spirituel, intellectuel, pour comprendre qui on est et notre rapport au monde,rapporte-t-elle. Pendant longtemps, je me suis posé cette question: qu’est-ce que je suis? La réponse, c’est qu’il faut être soi-même. Il faut juste arrêter de se mettre dans des cases. C’est la société qui veut nous faire rentrer dans un moule. Pour les gens qui ne sont pas en capacité de faire ce cheminement, ça peut être terrible, jusqu’au suicide. Les trans sont des personnes en danger permanent.
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Dans le village, elle a trouvé un milieu beaucoup plus bienveillant.«A la campagne, les gens ont les pieds sur terre. Ils ont peut-être des questions parce qu’ils ne comprennent pas trop, mais dans l’ensemble ça ne va pas plus loin; il n’y a pas de malveillance,constate-t-elle.La peur vient de l’inconnu. A partir du moment où on vous connaît, il n’y a plus de peur. C’est beaucoup plus dangereux dans les quartiers et dans les banlieues. C’est là que l’homophobie et la transphobie sont les plus virulentes.»Devenue désormais Marie Cau, parfaitement intégrée dans le village – «même si, à la campagne, avant d’être considéré comme étant des leurs, il faut au moins trois générations »,dit-elle dans un sourire .
SOURCE : Patrick Roge, Le Monde, 7juin 2020
QUESTIONS :
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quelle situation est perçue comme déviante dans l'évocation faite par Madame Cau? Que montre sa médiatisation du point de vue de ce comportement «déviant»?
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Montrez qu'il s'agit bien d'une définition interactive de la déviance en réfléchissant au parcours de cette dame.
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Montrez qu'il s'agit bien d'une définition interactive de la déviance en réfléchissant aux différents milieux cotoyés par cette dame.
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REPONSE :
1)quelle situation est perçue comme déviante dans l'évocation faite par Madame Cau? Que montre sa médiatisation du point de vue de ce comportement «dévian»?
la situation perçue comme déviante est est le fait d être transgenre. L'article évoque le fait d'une grande médiatisation faisant de Madame Cau un exemple connu mondialement. Cela montre que les médias et donc la société considèrent que le fait d'être transgenre ne doit plus être un obstacle à l 'intégration des individus ; on pourrait ici parler d' « entrepreneurs de morale »au sens de Becker.
2)Montrez qu'il s'agit bien d'une définition interactive de la déviance en réfléchissant au parcours de cette dame.
Comme l'explique Mme Cau, «un long parcours» de sa prise de conscience à l 'acceptation puis à l 'officialisation et jusqu'à l 'élection en tant que maire, s'est déroulé; la société française commence à peine reconnaître l'existence de ces situations : il faut attendre 2016 pour qu'une loi démédicalise la procédure en mettant fin à l'exigence de prouver un «syndrôme de transexualisme» et 2018 pour que les personnes transgenres aient le droit de faire modifier officiellement leur enregistrement de sexe et prénoms. Cela montre donc que progressivement ce qui était considéré comme déviant ne doit plus l 'être.
3)Montrez qu'il s'agit bien d'une définition interactive de la déviance en réfléchissant aux différents milieux cotoyés par cette dame.
Dans l'évocation de Mme Cau, on voit que sa situation est selon elle perçue comme déviante de manière variable selon les milieux cotoyés: une tolérance voire une bonne intégration en milieu rural et au contraire, une transphobie dans les milieux citadins populaires. Là encore cela montre que la déviance est définie par le groupe au delà du comportement lui -même.
DOCUMENT 2 : la déviance un processus d'étiquetage
L’Alabama a voté, mercredi 15 mai,la loi la plus répressive en matière d'avortement des Etats -Unis. Le texte ne prévoit pas d’exception en cas de viol ou d’inceste, et punit de peine de prison, de dix ans à quatre-vingt-dix-neuf ans les médecins pratiquant l’interruption volontaire de grossesse (IVG), sauf en cas d’urgence vitale pour la mère ou d’«anomalie létale» du fœtus. L’Alabama a toujours été un territoire ultraconservateur, situé en plein cœur de la « ceinture de la Bible », qui rassemble une vingtaine d’Etats du Sud-Est. Pour cet électorat majoritairement blanc et évangélique, l’interdiction de l’avortement a toujours été une revendication primordiale. Ce n’est donc pas surprenant de voir émerger cette loi particulièrement répressive.Sauf que cette loi reste de toute façon inconstitutionnelle tant que la jurisprudence de 1973 – appelée«Roe versus Wade» permettant l’autorisation de pratiquer des avortements aux Etats-Unis – n’est pas renversée par la Cour suprême.
Aux Etats-Unis, ce qui autorise le droit à l’avortement se fonde constitutionnellement sur une interprétation du quatorzième amendement, qui garantit le droit à l’intimité (right to privacy). A l’époque, en 1973 donc, par sept voix contre deux, la Cour suprême avait estimé que ce droit s’étendait à la décision d’une femme de se faire avorter.Mais cette lecture est combattue avec acharnement depuis plusieurs décennies par les militants anti-avortements. Jusqu’à présent, elle a été restreinte – notamment par l’arrêt de 1992,Planned Parenthood versus Casey,qui fixe des modalités d’avortement pour en réduire notamment le délai – mais a toujours été confirmée sur le fond. La dernière fois, ce fut en2016, par l’arrêt Whole Woman’s Health versus Hellersted.Et cette jurisprudence peut toujours être cassée. Or, depuis l’élection de Donald Trump, il y a une majorité de juges conservateurs à la Cour suprême – cinq contre quatre. Donc le but de la manœuvre est bien de pousser les neuf juges à réétudier l’arrêt de 1973, et faire bouger les lignes sur le droit à l’avortement. Avant son élection, Donald Trump, interrogé par Fox News, avait fait part de sa volonté de renverser la jurisprudence Roe versus Wade. Ce qui est assez ironique en soi, puisque dans les années 1990, Donald Trump se disait volontiers favorable à l’avortement sur les plateaux télévisés.Depuis son élection, le président américain a nommé deux juges à la Cour suprême : Neil Gorsuch et Brett Kavanaugh. Tout prouve que ces deux conservateurs ont des positions anti-avortement. Leur nomination est donc un signal donné à son électorat anti-avortement. Pour rappel, plus de 80 % des Blancs évangélistes ont voté pour Donald Trump.En outre, l’administration de Donald Trump n’a eu de cesse de restreindre le droit à l’avortement ces derniers mois. Elle a notamment passé récemment une loi qui autorise tous les travailleurs de santé du privé et du public à recourir à leur clause de conscience pour ne pas pratiquer d’avortements. Le président lui-même, depuis plusieurs semaines, emploie dans chacun de ses meetings une rhétorique très violente envers les démocrates, qu’il accuse d’exterminer les bébés, et envers les médecins pratiquant l’IVG, qualifié «d’assassins». De fait, le droit à l’avortement est déjà largement remis en question sur une large partie du territoire américain. Dans certains Etats, notamment ceux des Grandes Plaines, les femmes doivent faire des centaines de kilomètres pour trouver un médecin qui pratique des IVG. Elles y sont souvent victimes de situations de harcèlement de la part des militants anti-avortement, qui les prennent violemment à partie. En revanche, dans d’autres Etats, plus libéraux, le droit à l’avortement est considéré comme un acquis indéboulonnable. On se retrouve ainsi avec une nation où coexistent deux visions diamétralement opposées sur le sujet. Toute la question est de savoir si elles pourront continuer à vivre ensemble, malgré ces divergences sociales de plus en plus évidentes.
SOURCE : Charlotte Chabas, «Aux Etats-Unis,l’élection de Donald Trump a galvanisé les anti-avortement» Le Monde , 15 MAI 2019.
QUESTIONS :
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dans l'exemple évoqué ici quel comportement est considéré comme déviant? S'agit -il d'un acte déviant au regard de la loi américaine ?
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Expliquez ici qui sont les «entrepreneurs de morale»tels que les nomme H.S Becker ? Comment s'établit l'étiquette du déviant dans ce cas ?
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REPONSE :
1) dans l'exemple évoqué ici quel comportement est considéré comme déviant? S'agit -il d'un acte déviant au regard de la loi américaine?
il s'agit de l'avortement qui est considéré comme déviant pour une partie de l 'électorat de D.Trump. Si en Alabama une loi a récemment encore minoré l'accès au droit à l 'avortement, cette pratique est pourtant anticonstitutionnelle au regard du 14 ème amendement .
2) Expliquez ici qui sont les «entrepreneurs de morale»tels que les nomme H.S Becker ? Comment s'établit l'étiquette du déviant dans ce cas ?
Les entrepreneurs de morale sont ici les groupes anti-avortement et d'une manière plus générale l'électorat conservateur et notamment évangéliste qui soutient D.Trump. Tant que la Cour suprême n'a pas renversé la jurisprudence du 14 ème amendement ce droit reste acquis aux Etats-Unis. Mais on constate que ce droit recule désignant ainsi comme déviant-es des personnes qui ne le sont pas ou plus depuis ; on vient bien que rien n'est figé en matière de déviance , le discours actuel du président Trump identifie les «tueurs de bébés et «d'assassins» pour désigner les médecins qui pratiquent l 'acte .
DOCUMENT 3: la déviance un processus de stigmatisation
La liste est longue: discriminations à l’emploi, au logement, à l’éducation, aux formations, aux loisirs. Les sources sont nombreuses: enquête TéO de l’Institut national d’études démographiques, étude sur l’accès aux droits du Défenseur des droits, rapports annuels de la Commission nationale consultative des droits de l’homme sur le racisme, multiples opérations de testing (test de discrimination)… Toutes racontent la même chose, année après année:«Les discriminations fondées sur l’origine restent massives en France et affectent la vie quotidienne et les parcours de millions d’individus, mettant en cause leurs trajectoires de vie et leurs droits les plus fondamentaux.»C’est ce que rappelle le Défenseur des droits, dans un rapport, publié lundi 22juin, intitulé «Discriminations et origines: l’urgence d’agir». Jacques Toubon met l’accent sur«l’insuffisance des politiques publiques dans ce domaine», le manque d’ambition et d’envergure des mesures prises par le politique et dénonce«l’affaiblissement du discours public sur l’égalité au profit du discours sur l’identité». La publication de ce document de quatre-vingts pages intervient alors que la crise sanitaire actuelle a aggravé les stéréotypes à l’égard des habitants des quartiers populaires, présentés comme«vecteurs du virus»et«indisciplinés»,face au respect des consignes de distanciation physique et des règles du confinement.«La lutte contre les discriminations fondées sur l’origine doit devenir une priorité politique, au même titre que ce qui a été entrepris ces dernières années en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes», plaide le rapport.A un mois de son départ de cette autorité administrative indépendante après un mandat de six ans, l’ancien garde des sceaux de Jacques Chirac, nommé Défenseur des droits par François Hollande, souligne la«nature systémique» de ces discriminations. L’expression fait bondir certains, elle est pourtant«juste», selon Jacques Toubon, mais«mal comprise»:«Les discriminations ne sont pas le résultat de logiques individuelles, de quelques DRH qui refusent d’embaucher des personnes noires ou arabes,explique-t-il.C’est tout le système qui est en cause, un système qui reproduit les inégalités.»Consciemment ou pas.Entre-soi, déni, préjugés, racisme… Le rapport souligne que«l’expérience répétée des discriminations et leur nature systémique ont des conséquences délétères et durables sur les parcours individuels, les groupes sociaux concernés, et plus largement sur la cohésion de la société française(Ces discriminations entament le rapport de confiance des individus à la société française et aux institutions(…),et alimentent ainsi une recherche d’identité douloureuse et un sentiment de désaffiliation nationale qui, du reste, ne se trouvent pas contrebalancés par des discours politiques forts». La part de la société française concernée est importante et ne se réduit pas à une question de nationalité ou de parcours migratoire. Les discriminations touchent à la fois la population étrangère ou d’origine étrangère (près de 21% de la population française), mais aussi l’ensemble des générations nées de parents français, assignées à une origine différente.
SOURCE: Louise Couvelaire,«Discriminations: le signal d’alarme du Défenseur des droits», Le Monde du 22 juin 2020
QUESTIONS :
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Que dénonce le défenseur des droits?
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En quoi la crise sanitaire ici évoquée fournit-elle une illustration des mécanismes de stigmatisation définis par E.Goffman?
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REPONSE :
1) Que dénonce le défenseur des droits?
Le défenseur des droits fait un bilan des réclamations enregistrées chaque année et déplore des faits de discriminations et leurs conséquences: Les personnes d’origine étrangère ou perçues comme telles sont dès lors surexposées au chômage, à la précarité sociale, à de mauvaises conditions de logement, aux contrôles policiers, à des relations dégradées avec les forces de l’ordre, et leur état de santé est moins bon.«Pour eux, la République ne tient pas ses promesses», déplore M. Toubon.Parmi les 5 500 réclamations enregistrées chaque année par le Défenseur des droits en matière de discriminations, un tiers sont relatives à l’origine – au sens large, origine, nom, religion, lieu de résidence – de la personne (un deuxième tiers concerne les discriminations liées au genre, le dernier tiers celles liées au handicap). On est bien ici dans un processus de stigmatisation tel que le décrit Goffman.
2) En quoi la crise sanitaire ici évoquée fournit-elle une illustration des mécanismes de stigmatisation définis par E.Goffman?
Dans cet article l'auteur rappelle que les populations déjà victimes de difficultés sociales comme le chômage ou le mal logement bien souvent concentrées dans les cités sont aussi celles qui sont montrées comme étant les populations «mauvais élèves» des gestes barrière ou du confinement , voire encore celles qui seraient responsables de la circulation du virus. Les sociologues rappellent que ce sont aussi celles qui ont vécu le confinement de façon la plus sévère (promiscuité des lieux de vie, perte des revenus ou de l 'emploi, etc). On voit comment à partir d'une désignation de leur origine ou de leur milieu de vie ces populations sont «étiquetées et stigmatisées».
EXERCICE 1 : Etiquetage et stigmatisation
Identifiez à qui appartiennent les citations suivantes en les reliant aux bons auteurs
H.S Becker ou E.Goffman et justifiez vos réponses.
a) «Des individus peuvent être désignés comme déviants alors qu'en fait ils n'ont transgressé aucune norme»
b) «il est par conséquent permis de soupçonner que le rôle du normal et du stigmatisé appartiennent au même complexe: deux coupons d'une même étoffe»
c)«le mot de stigmate servira donc à désigner un attribut qui jette un discrédit profond, mais il faut bien voir qu'en réalité c'est en termes de relations et non d'attributs qu'il convient de parler»
d) un déviant «celui auquel cette étiquette a été appliquée avec succès et le comportement déviant devant lequel la collectivité attache cette étiquette»
e) «traiter une personne qui est déviante sous un rapport comme si elle l'était sous tous les rapports, c'est énoncer une prophétie qui contribue à sa propre réalisation»
f) «dans tous les cas on retrouve les mêmes traits sociologiques: un individu qui aurait pu aisément se faire admettre dans le cercle des rapports sociaux ordinaires possède une caractéristique telle qu'elle peut nous détourner de ses autres attributs»
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REPONSE :
Propos de H.S.Becket : a) d) e)
Propos de E.Goffman : b) c) f)
EXERCICE 2 : comprendre la notion de carrière déviante
Retracez et identifiez les différentes étapes du parcours déviant à partir de cet article; pour cela, vous indiquerez, en plaçant un titre à certains endroits du texte, les différentes parties du texte qui correspondent aux étapes de la carrière déviante évoquées par Becker.
Dire qu’on ne souhaite pas d’enfant, ou tout du moins qu’on s’interroge, constitue une première étape qui oblige à expliciter, pour le remettre en cause, l’adage selon lequel «tout le monde veut des enfants».Les femmes interrogées ont généralement pensé plus tôt leur rapport à la maternité que les hommes leur rapport à la paternité. Cela tient sans doute à la socialisation différentielle entre les filles et les garçons, laquelle tend à projeter les premières dans la maternité et le «care» et les seconds dans la conquête du monde… et des femmes.Dans la plupart des cas, tout se passe donc comme si les hommes ne pouvaient penser leur désir de paternité qu’en présence d’une compagne à leur côté. Les hommes ne semblent jamais interrogés sur leur envie d’enfant sans que leur compagne ne soit également présente. Ils sont systématiquement renvoyés à la parentalité comme un projet de couple et non comme un choix personnel.Aux femmes qui évoquent leur souhait de ne pas être mère, l’entourage renvoie fréquemment un discours normatif portant, d’une part, sur leurs hormones qui vont immanquablement se réveiller lorsque sonneront les douze coups de l’horloge biologique et, d’autre part, sur les limites de leur fécondité – argumentaire que l’on ne voit pas apparaître du côté des hommes. Il semble difficile, sinon impossible, d’entendre une femme dire son non-désir d’enfant, tant le désir d’enfant paraît inscrit dans son corps, dans sa nature. Si aux alentours de 25 ans, l’expression la plus entendue du côté des femmes est «tu dis ça maintenant mais tu changeras d’avis», passé 30 ans, la pression sociale à concevoir se fait plus forte et cherche à instiller la peur des regrets le jour où elles ne pourront plus procréer et, sous-entendu, qu’elles voudront alors un enfant.Ainsi, le fait de dire que l’on ne veut pas avoir d’enfant ou simplement d’émettre cette hypothèse confronte les personnes à la norme sociale qui veut que la constitution d’une famille soit une étape incontournable du cycle de vie (i.e tout le monde veut des enfants) et remet en question le socle du système de genre (i.e les femmes ne peuvent se penser en dehors de la sphère reproductive quand les hommes, renvoyés du côté de la sphère productive, n’en sont que des acteurs indirects). Le fait de s’interroger sur l’évidence du désir d’enfant amène ainsi à se voir étiqueter et à accepter – ou non – cette étiquette de «personne ne voulant pas d’enfant». A travers cette étape, il s’agit de se construire une «ligne d’action» qui réponde à l’image que l’on donne de soi, co-construite avec l’entourage. D’une certaine manière, cette étape cristallise la définition d’une identité de «personne en dehors de», puisque, dans un souci de cohérence, il est préférable de pouvoir se voir dans les yeux d’autrui comme l’on se définit soi-même et réciproquement. Le fait de s’interroger sur l’évidence du désir d’enfant amène ainsi à se voir étiqueter et à accepter – ou non – cette étiquette de «personne ne voulant pas d’enfant» Il apparaît, dans les représentations accolées aux «SenVol*», au regard des discours des SEnVol, mais également des questions posées habituellement à leur sujet, que certains qualificatifs péjoratifs leur sont renvoyés à l’annonce de leur souhait de rester sans enfant.Le premier qualificatif qui ressort est le fait d’être égoïste. Ici, on ne voit pas apparaître de distinction selon l’âge, la génération ou le sexe de la personne. Ne pas vouloir d’enfant est associé à l’égoïsme, caractérisant dès lors les personnes qui souhaitent des enfants ou qui sont parents, de personnes altruistes. On a déjà montré que si les personnes SEnVol aspirent à une certaine liberté, elles s’interrogent sur le bonheur de l’enfant à venir et ne veulent pas être responsables d’une existence qui n’a pas demandé à naître.Une deuxième caractéristique est la suspicion d’une sexualité «débridée», sous entendant donc que les enfants la «brident». Ici, une approche distincte est à opérer selon le sexe de la personne.Enfin, une dernière caractéristique associée au fait d’être SEnVol est la question de l’identité même de ces personnes en termes d’accomplissement.Quand ils et elles se présentent, les personnes rencontré.e.s ne cherchent pas à défendre leur choix d’une vie sans enfant en mobilisant un argumentaire rationnel qui inscrirait leurs pratiques dans une sociabilité «en marge ». Pour autant, un certain nombre de femmes et d’hommes cite l’ouvrage d’Élisabeth Badinter «le conflit, la femme et la mère,»pour valoriser leur choix.
* SenVol :sans enfant volontaire
SOURCE : Carrières déviantes. Stratégies et conséquences du choix d’une vie sans enfant,Charlotte Debest, Mouvements , n°82, 2015.
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REPONSE :
Étape 1, l’acte déviant : dire son non-désir d’enfant
Ainsi, le fait de dire que l’on ne veut pas avoir d’enfant ou simplement d’émettre cette hypothèse confronte les personnes à la norme sociale qui veut que la constitution d’une famille soit une étape incontournable du cycle de vie (i.e tout le monde veut des enfants) et remet en question le socle du système de genre (i.e les femmes ne peuvent se penser en dehors de la sphère reproductive quand les hommes, renvoyés du côté de la sphère productive, n’en sont que des acteurs indirects). Le fait de s’interroger sur l’évidence du désir d’enfant amène ainsi à se voir étiqueter et à accepter – ou non – cette étiquette de « personne ne voulant pas d’enfant ».
Étape 2, L’étiquetage : être ou ne pas être un.e SenVol.
A travers cette étape, il s’agit de se construire une « ligne d’action » qui réponde à l’image que l’on donne de soi, co-construite avec l’entourage. D’une certaine manière, cette étape cristallise la définition d’une identité de « personne en dehors de », puisque, dans un souci de cohérence, il est préférable de pouvoir se voir dans les yeux d’autrui comme l’on se définit soi-même et réciproquement. A Le fait de s’interroger sur l’évidence du désir d’enfant amène ainsi à se voir étiqueter et à accepter – ou non – cette étiquette de « personne ne voulant pas d’enfant »
étape 3, prophétie auto réalisatrice :
Il apparaît, dans les représentations accolées aux SenVol, au regard des discours des SEnVol, mais également des questions posées habituellement à leur sujet, que certains qualificatifs péjoratifs leur sont renvoyés à l’annonce de leur souhait de rester sans enfant.Le premier qualificatif qui ressort est le fait d’être égoïste. Ici, on ne voit pas apparaître de distinction selon l’âge, la génération ou le sexe de la personne. Ne pas vouloir d’enfant est associé à l’égoïsme, caractérisant dès lors les personnes qui souhaitent des enfants ou qui sont parents, de personnes altruistes. On a déjà montré que si les personnes SEnVol aspirent à une certaine liberté, elles s’interrogent sur le bonheur de l’enfant à venir et ne veulent pas être responsables d’une existence qui n’a pas demandé à naître.Une deuxième caractéristique est la suspicion d’une sexualité « débridée », sous entendant donc que les enfants la « brident ». Ici, une approche distincte est à opérer selon le sexe de la personne.Enfin, une dernière caractéristique associée au fait d’être SEnVol est la question de l’identité même de ces personnes en termes d’accomplissement.
Etape 4, intégration à un groupe déviant :
Au fil de la trajectoire, un réseau social constitué de « non-parents » Quand ils et elles se présentent, les personnes rencontré.e.s ne cherchent pas à défendre leur choix d’une vie sans enfant en mobilisant un argumentaire rationnel qui inscrirait leurs pratiques dans une sociabilité « en marge ». Pour autant, un certain nombre de femmes et d’hommes cite l’ouvrage d’Élisabeth Badinter « le conflit, la femme et la mère pour valoriser leur choix.
EXERCICE 3 : Activité à partir d'un livre « En finir avec Eddy Bellegueule », Edouard Louis, seuil 2014.
QUESTION :
Explicitez les différentes expériences vécues par le protagoniste qui montre que la désignation de la déviance varie selon le groupe.
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En finir avec Eddy Bellegueule narre l'enfance et l'adolescence d'Eddy Bellegueule («patronyme originel de l'auteur) dans un village de Picardie, le rejet qu'il subit à cause de ses manières efféminées de la part des gens du village et de sa propre famille, les violences et les humiliations qu'il endure dans un milieu où l'on n'aime pas les «pédés». Les expériences que relate le narrateur dépeignent un univers où la misère et l'alcool accompagnent une reproduction sociale qui amène les femmes à devenir caissières après avoir abandonné leurs études et les hommes à passer de l'école à l'usine.
Eddy Bellegueule finit par prendre conscience de son attirance sexuelle pour les hommes, et de son dégoût pour les relations hétérosexuelles, mais essaie de rentrer dans la norme. Devant le constat de son échec, il décide de fuir, et finit par quitter le chemin qui lui était tracé pour rejoindre un lycée d'Amiens où il découvre une autre classe sociale dont les codes sont différents.
Donc: désigné déviant dans un village rural, et non déviant lors de ses études prestigieuses jusqu'à Normale Sup.