Définition :
La tertiarisation se définit par une croissance de la part des services dans la production globale qui va de pair avec une hausse de la part des actifs du secteur tertiaire dans la population active totale.
L'essentiel :
Dans son ouvrage de 1939, The Conditions of Economic Progress, Colin Clark pose le cadre d’un classement sectoriel des activités de production. Il distingue un secteur primaire (agriculture, pêche, forêt), un secteur secondaire regroupant toutes les activités de production de biens et il agrège toutes les activités de services dans un même secteur dit tertiaire. L’homogénéité de ces dernières tient à leur caractère immatériel et non stockable. L’Insee distingue parmi les activités tertiaires le commerce, le transport, les activités financières (banques et assurances), les activités immobilières, les services aux entreprises (postes et télécommunications, recherche et développement…), les services aux particuliers (restauration, activité culturelles, récréatives et sportives…), l’éducation, la santé, l’action sociale et l’administration.
Durant les 30 glorieuses, les effectifs du secteur tertiaire ont largement progressé tout comme sa part dans le PIB. Ce processus de déversement a conduit à ce que le secteur tertiaire représente presque 76 % des emplois en France aujourd’hui. Et cela n’a rien d’une exception française ; tous les pays développés se sont tertiarisés.
Le mouvement de tertiarisation a plusieurs causes. D’une part, la forte augmentation du pouvoir d’achat ainsi que les mutations sociodémographiques, depuis les 30 glorieuses, ont modifié la structure de la consommation des ménages, ceux-ci accordant une part croissante à de nouveaux besoins essentiellement tournés vers les services, conformément aux lois d’Engel. L’augmentation de la part de la richesse nationale consacrée au soin et à l’éducation, par exemple, s’est évidemment traduite par une croissance forte des emplois de services consacrés à ces besoins. Par ailleurs, les gains de productivité ont été relativement plus faibles dans les activités de services que dans les deux autres secteurs. La production de services est rarement une production de masse permettant des économies d’échelle. Depuis les années 1960, la croissance de la production de services ayant été supérieure aux gains de productivité du secteur tertiaire, les besoins de main-d’œuvre ont augmenté mécaniquement. Enfin, la tertiarisation est également le résultat du développement de la sous-traitance de services dédiés aux entreprises (transport, expertise comptable, gardiennage, etc.). Les pratiques d’externalisation par les entreprises de pans entiers d’activité autrefois gérées en leur sein ont consisté à se recentrer sur leur activité principale et à faire appel à d’autres entreprises pour les activités annexes, notamment de services. Ce déversement sectoriel vers le secteur tertiaire s’est bien évidemment traduit par la baisse de la part des autres secteurs d’emploi. Ainsi, le secteur secondaire ne représente plus que 20 % de la population active et le secteur primaire moins de 3 %. Durant les 40 dernières années, la part de l'emploi dans l'industrie s'est réduite presque de moitié.
Ce mouvement de tertiarisation a un certain nombre de conséquences. Certains économistes, tels que William Baumol, ont mis l’accent sur le faible ruissellement engendré par les activités tertiaires. Le secteur tertiaire n’est pas un secteur moteur comme pouvait l’être le secteur secondaire, ses effets d’entraînement sur le reste de l’économie sont moins importants, en particulier parce que ses consommations intermédiaires sont moins fortes. Certains travaux articulent le ralentissement global de la productivité et le poids croissant du secteur tertiaire. Les gains de productivité du secteur tertiaire étant structurellement plus faibles, ils tirent vers le bas les gains de productivité de l’ensemble de l’économie. (lien avec le ralentissement des gains de productivité et de la croissance.
D’autres mettent en avant le risque d’une désindustrialisation, c’est-à-dire d’un déclin absolu ou relatif de l’industrie. (lien avec le débat sur la désindustrialisation.
Mais c’est oublier que le secteur tertiaire est très hétérogène, notamment du point de vue du progrès technique. Certaines activités de services connaissent des gains de productivité importants. C’est le cas de la banque ou de la grande distribution par exemple. Des économistes insistent sur la complémentarité entre les secteurs secondaire et tertiaire.
Voir le chapitre du cours de Terminale : Quelles mutations du travail et de l’emploi ?
3 questions à : (à venir)
1) Distinguer le secteur tertiaire du secteur secondaire a-t-il encore un sens ?
2) La mesure de la productivité dans les services est-elle fiable ?
3) Peut-on parler d’une désindustrialisation ?