Analyses et synthèses n° 24 – INJEP (juin 2019)
Considérer la jeunesse d’aujourd’hui comme un groupe homogène dont les attitudes face au travail s’opposent à celles des générations précédentes n’est pas pertinent. De nombreuses disparités traversent ce groupe d’âge et les représentations des jeunes à l’égard du travail sont hétérogènes. Ambivalent, complexe et divers sont les trois adjectifs qui caractérisent le regard qu’ils portent sur le travail d’après les résultats tirés de l’enquête du Céreq « Génération 2013 » dans laquelle les répondants, interrogés trois ans après la fin de leur formation initiale, sont âgés de 17 à 38 ans (avec 21 ans comme âge médian).
Mots-clés : rapport au travail, jeunesses, position professionnelle, diplôme, genre
Les données empiriques montrent que les jeunes d’aujourd’hui accordent une grande place au travail dans leur vie, mettant ainsi à distance les discours caricaturaux sur la disparition de la valeur travail. L’étude porte sur le rapport au travail qui correspond aux représentations que les jeunes ont de celui-ci en général, et plus particulièrement au point de vue qu’ils ont sur les neuf éléments évalués dans le graphique ci-dessous.
On peut remarquer que l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle est le point le plus mis en avant par les répondants, plus de la moitié (51 %) estimant qu’il s’agit de quelque chose de très important. Cela ne signifie pas pour autant que le travail n’est pas important pour eux. Ils sont en effet plus de 8 sur 10 à déclarer que leur priorité du moment porte sur leur vie professionnelle (15 % seulement déclarent situer leur priorité en dehors du travail). Les relations entre collègues sont aussi un aspect du travail considéré comme très important par une grande partie des répondants (46 %). Un travail intéressant, caractérisé par une certaine autonomie et prise d’initiative, est aussi souvent considéré comme très important alors que le fait d’être utile à la société dans le cadre de son emploi l’est moins. La sécurité de l’emploi est très importante pour 42 % des jeunes interrogés mais le niveau de rémunération que pour 28 %. Ainsi, la dimension socialisatrice du travail ou la réalisation de soi au travail est valorisée, ce qui ne doit pourtant pas laisser penser que celle matérielle soit minimisée comme le montre l’importance donnée à la sécurité de l’emploi.
En entrant dans le détail des réponses selon le sexe, le niveau de diplôme et la situation professionnelle, il apparait certains écarts dans les résultats comme le montre le tableau ci-dessous.
Il est par exemple plus fréquent que les jeunes femmes déclarent que l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle est très important (56 % contre 46 % pour les jeunes hommes). Cet écart peut s’expliquer par les inégalités de partage du travail domestique en défaveur des femmes expliquant que ces dernières se sentent plus concernées que les hommes par les arrangements entre vie professionnelle et vie familiale. De plus, à mesure que le niveau de diplôme devient plus élevé et l’emploi moins précaire, cet équilibre est davantage souhaité. On peut noter aussi que plus les jeunes sont diplômés, plus ils sont sensibles à la qualité des relations entre collègues. L’intérêt accordé à la sécurité de l’emploi diffère beaucoup selon le genre (47 % des femmes contre 38 % des hommes la plébiscitent) alors que la situation professionnelle ou le type de contrat semblent avoir moins d’influence sur celui-ci. On peut enfin mettre en avant que la qualité du poste (autonomie et prise d’initiative, intérêt du poste) est d’autant plus considérée comme importante que les jeunes sont des femmes, en emploi, avec un niveau de diplôme élevé et un contrat de travail stable.