L'étude de cas proposée ici est la synthèse d'une étude réalisée par Denis Martin, académie de Nantes et Xavier Langlois d’Estaintot, directeur des financements et de la trésorerie, et présentée dans le cadre des Entretiens Louis le Grand 2007 consacrés au thème "Le financement de l'entreprise : intermédiaires et marchés financiers".
Voir la présentation powerpoint
Introduction
ALSTOM, groupe industriel international d'origine française, est présent dans 70 pays. Parmi les leaders mondiaux dans les infrastructures, les équipements et les services de production d'énergie et de transport ferroviaire, le groupe réalise 90 % de son chiffre d'affaires hors de France et 50 % hors d'Europe. A ce titre il est tout particulièrement concerné par les risques de change, tant dans les échanges internes au groupe que dans les échanges externes.
Contrairement à une opinion reçue, l'entreprise doit se concentrer sur l'efficacité économique de ses installations productives. Cela veut dire qu'elle doit éviter de fragiliser son bilan en prenant des positions sur un des marchés les plus spéculatifs et volatils, à savoir le marché des changes. De même, ses contrats se déroulant souvent sur une longue période, il faut savoir anticiper les évolutions de change et trouver les instruments appropriés pour les gérer.
On commencera par mettre en lumière les origines des risques de change auxquels l'entreprise est confrontée pour traiter ensuite de la question du choix des risques à couvrir et, finalement, des modalités de la couverture de ces risques.
Des activités génératrices de risque de change
L'activité hors du territoire (importation ou exportation de biens, de services ou de capitaux) génère des flux en devises qui sont porteurs de trois types de risques :
1. Un risque de transaction lors d'un appel d'offres ou de l'exécution d'un contrat : le risque qu'une variation défavorable du taux de change engendre une perte sur un contrat.
2. Un risque de conversion : le risque que la valeur nette ou les revenus d'une filiale à l'étranger soient minorés lors de leur conversion en monnaie domestique.
3. Un risque économique : le risque qu'un changement de cours affecte la compétitivité des biens et services d'une entreprise par rapport à ses concurrentes, en augmentant les coûts en monnaie nationale des biens et services achetés et les prix en devises des biens et services vendus
Or, 32,1% des flux du groupe Alstom, flux internes entres les filiales du groupe ou flux externes liés à des fournisseurs ou des clients étrangers, sont réalisées entre zones monétaires différentes. Ces transactions requièrent l'utilisation du marché des changes qui fournit les devises nécessaires aux transactions mais qui génère un risque de change.
La politique d'Alstom vise à couvrir le risque de change commercial et à protéger les marges liées :
1. Aux appels d'offres entre la date de soumission de l'offre et la date de signature du contrat
On définit le risque de change d'un appel d'offre comme étant “le risque financier qu'encourt une filiale lorsqu'elle répond à une offre (soit à l'import soit à l'export) dans une monnaie différente de sa monnaie nationale”. Ce risque de change apparaît lors de la soumission de l'offre et perdure tout au long de sa période de validité. Il provient des fluctuations de taux de change par rapport à ceux utilisés pour évaluer le prix de l'offre. Ce risque ne se matérialise que si l'offre devient un contrat : au cours de la période de validité de l'offre ce risque est donc considéré comme un "risque probable", qui dépend du succès de la réponse à l'appel d'offre. Ce risque devient réel (ou certain) lorsque le projet est attribué ou entre en vigueur.
2. Aux contrats (engagements fermes) entre la signature ou l'entrée en vigueur d'un contrat et son règlement définitif.
En raison de la nature de ses activités, Alstom est exposé au risque de change lié à des contrats commerciaux de longue durée avec des paiements étalés dans le temps.
Les risques couverts et les instruments de couverture chez Alstom
Couvrir le risque lié à un appel d'offre
Alstom a pour politique d'éliminer les risques dus à des engagements conditionnels (appel d'offre) en s'appuyant sur l'outil le plus adéquat. Il existe quatre solutions, par ordre de priorité :
1. Avoir recours autant que possible à la couverture naturelle, c'est-à-dire déterminer le prix de vente en fonction de la structure de coûts en devises
2. Inclure dans l'offre une clause d'indexation permettant un ajustement du prix : le client devant payer le surcoût lié à une modification défavorable du taux de change
3. Souscrire une assurance externe, du type Coface[1] cette option n'est valable que si la Coface couvre le risque dans le pays où se situe l'unité qui répond à l'appel d'offre
4. Mettre en place une stratégie d'option de change via la Trésorerie Centrale.
Qu'est ce qu'est une option de change ?
Moyennant le paiement d'une prime, l'option donne le droit, mais non l'obligation, d'acheter ou de vendre une devise à une date et un cours déterminés. L'option (utilisée à des fins de couverture et non de spéculation) fonctionne comme une police d'assurance. Si les taux évoluent de façon défavorable, l'acheteur de l'option est protégé ; dans le cas contraire, il n'exerce pas l'option et peut réaliser un profit.
Il y a deux types d'option :
1) Option d'achat (Call) : Avec une option d'achat, deux scénarios peuvent se réaliser à l'échéance. Dans le premier, le taux de change à l'échéance de l'option est au-dessus du prix d'exercice et le détenteur de l'option peut alors exercer son droit et acheter la devise au taux prédéterminé avantageux. Dans le second, le taux de change à l'échéance de l'option est en dessous du prix d'exercice alors le détenteur de l'option n'a pas avantage à exercer son droit car il peut acheter la devise moins chère sur le marché. Il se retrouve donc à perdre uniquement la prime payée pour se procurer l'option initialement.
2) Option de vente (Put) : Avec une option de vente, il y a également deux scénarios qui peuvent se réaliser à l'échéance. Dans le premier, le taux de change à l'échéance de l'option est au-dessus du prix d'exercice alors le détenteur n'a pas avantage à vendre au prix d'exercice car il peut vendre à un meilleur prix sur le marché. La prime payée initialement est donc perdue. Dans le second, le taux de change à l'échéance de l'option est en dessous du prix d'exercice alors le détenteur a avantage à exercer son option car il peut vendre la devise au prix d'exercice qui est alors avantageux.
Dans la mesure où les solutions mentionnées précédemment seraient inapplicables, l'unité de production peut décider d'intégrer une provision de change sur la base du cours comptant et du cours à terme et l'inclure dans l'estimation des coûts liés au projet. Ce procédé n'est pas considéré comme un instrument de couverture.
La couverture naturelle est bien sûr la solution la plus intéressante pour les deux parties, mais n'est pas adaptée à la plupart des situations.
Toutes les autres solutions ont un coût. L'inconvénient majeur de l'option de change est que son coût est certain alors que le contrat ne l'est pas. Cet outil s'avère donc peu opportun dans le cas d'une offre qui a des chances réduites d'aboutir.
Le choix de l'instrument le plus approprié revient à l'unité de production.
Couvrir le risque lié à un contrat
Lorsque le contrat est signé, le groupe Alstom utilise des contrats à terme et des swaps de change pour ajuster sa couverture à l'exposition réelle durant la réalisation du contrat, soit comme seul instrument de couverture, soit comme complément à des polices d'assurance exportation.
Tout engagement ferme doit être couvert contre les risques liés aux variations de taux d'intérêt des monnaies impliquées ainsi qu'aux variations des taux de change par rapport à la monnaie fonctionnelle[2] de l'unité, c'est-à-dire la devise dans laquelle elle opère, enregistre son bilan et son compte de résultat et le reporte au groupe. Les flux entrants et sortants sur un même projet doivent être couverts simultanément. Les flux futurs de trésorerie doivent être couverts jusqu'à la date d'échéance du contrat. La couverture la plus appropriée est le change à terme.
Qu'est ce que le change à terme ?
Le change à terme est un des instruments de prédilection pour la couverture du risque de change. En effet, cet instrument offre souplesse et liquidité dans les devises courantes. Les montants et les dates peuvent être accordés à la transaction commerciale, ce qui permet de ne laisser aucun risque résiduel. En contrepartie, l'utilisation du change à terme ne permet pas de profiter d'une évolution favorable des cours d'une devise.
1) Le contrat à terme consiste en une entente portant sur la conversion d'une monnaie en une autre. Le montant de la transaction, le taux de change utilisé pour la conversion et la date future à laquelle s'effectuera l'échange sont fixés au moment de la prise du contrat.
2) Le swap consiste en l'exécution simultanée d'une opération au comptant et d'une opération à terme, en sens inverse, pour le même montant en devise. Ce type d'opération de change est fréquemment utilisé par les entreprises ayant des comptes-fournisseurs et des comptes-clients dans une même devise, mais dont les dates d'échéance ne sont pas appariées.
Rôle de la Trésorerie Centrale et procédure
La trésorerie du Groupe agit comme une banque interne pour ses filiales pour lesquelles elle gère les besoins de trésorerie, les comptes courants internes et le système de compensation de paiement au sein de la compagnie. Le groupe Alstom a mis en place une structure de "cash pooling" pour centraliser le cash journalier dans les pays où la réglementation en vigueur le permet.
La Trésorerie Centrale ne porte pas elle-même de risque de change. Son rôle est d'aider et de conseiller les Unités/Secteurs à prendre une décision optimale, elle intervient comme simple intermédiaire pour couvrir ce risque sur le marché des changes pour le compte de la filiale. Pratiquement c'est l'unité qui identifie le risque de change, le business qui sélectionne l'option de couverture la plus adéquate et la Trésorerie Centrale qui réalise l'opération.
Comme dans une banque, la Trésorerie Centrale est organisée en 3 services :
1. Le Front Office est chargé de la négociation des opérations.
Il s'agit d'aider la filiale à estimer son risque de change et lui proposer une stratégie de couverture : "Vous êtes une filiale française et vous avez signé une vente en USD payable en 2009 ? Il faudrait vendre ces USD à terme". Par ailleurs, le Front Office initie les opérations de couvertures : sa mission est d'obtenir le meilleur prix possible, donc de mettre en concurrence les banques lors de chaque opération de gré à gré.
A l'initiation de l'opération, une confirmation est échangée avec la banque contrepartie : "avez-vous bien enregistré une vente de 1 MUSD contre EUR valeur 22 juin 2009 ?" Au dénouement de l'opération, le Back Office est chargé de l'échange des flux de paiement avec chacune des contreparties bancaires : "Nous sommes le 22 juin 2009, je vous règle 1 MUSD et vous me réglez 0.8 MEUR" Ce mode de fonctionnement propre au milieu bancaire et aux marchés de gré à gré est répliqué en interne vis-à-vis des filiales.
3. Le Middle Office est chargé du contrôle des opérations
Il a pour mission de recalculer la valeur des opérations de change suivant les mouvements du marché : "1 MUSD ont été vendus 0.8 MEUR payables en 2009 ; ils ne valent plus que 0.7 MEUR aujourd'hui, donc nous avons gagné 0.1 MEUR grâce à cette opération". Par ailleurs, il contrôle le résultat dégagé et les risques pris : la Trésorerie Centrale ne sert que d'intermédiaire et ne doit donc pas dégager de résultat ni conserver de risque de change.
Ces principes généraux peuvent être étudiés sur un cas concret.
La couverture du risque de change : un cas pratique
Le projet consiste en la fourniture et mise en services de 170 voitures soit 37 rames pour les lignes 2 & 4 du Métro de Budapest, pour un montant estimé à 250M€. Le client est BKV Rt, un client public équivalent de la RATP locale. Les concurrents sont l'allemand Siemens, le canadien Bombardier, le russe Metrowagonmash et le coréen Rotem. Les chances de succès d'ALSTOM sont estimées à 30%.
L'appel d'offres se passe dans le cadre d'une procédure négociée, ce qui signifie qu'une première offre technique et commerciale est remise le 18 janvier 2006 et qu'ensuite ont lieu des rounds de clarifications techniques puis des rounds de négociations commerciales où chacun doit revoir ses prix à la baisse. A la date du dernier round de négociation (estimé vers avril 2006), il faut s'engager sur la validité de la dernière offre pour une période de 120 jours.
La structure productive retenue est la suivante : ALSTOM Transport SA, l'unité de Valenciennes est l'entité signataire du contrat. Konstal, filiale polonaise de ALSTOM, est sous-traitante pour 22 % du contrat et facture à l'unité de Valenciennes en zlotys (PLN). Elle a également des fournisseurs locaux ou non, avec lesquels les paiements sont effectués en zlotys et en euros (EUR). Des fournisseurs sont également basés en Hongrie et facturent en forint (HUF) pour 2 % du contrat. Puisque la monnaie de facturation et de paiement pour le client final hongrois est l'euro, on déduit de cette structure que 76 % du montant est naturellement couvert et qu'il reste 24 % à couvrir, correspondant aux coûts en monnaies polonaise et hongroise. Dans ces conditions, quels choix de couverture sont proposés et quels sont ceux qui vont être retenus ?
Il est important de souligner l'évolution des solutions proposées en fonction de l'avancement du projet : en effet de la réponse à l'appel d'offre initial avec des chances de succès réduites, à l'offre finale, les conditions de réalisation du contrat et les risques qui en découlent vont changer. Par ailleurs la signature du contrat transforme un risque probable en risque certain, ce qui suppose l'évolution des instruments.
On envisage d'abord la mise en place de couvertures naturelles :
• En tentant d'imposer l'euro à tous les fournisseurs, ce qui permet de reporter sur les fournisseurs extérieurs à la zone euro les risques de change. Les chances de succès sont réduites dans la mesure où ce n'est pas l'intérêt du fournisseur.
• En cherchant à équilibrer les devises versées et les devises reçues : on propose au client hongrois de régler une part du contrat en monnaie locale, correspondant aux montants à régler aux fournisseurs locaux. Cette proposition n'a pas été retenue par le client.
Un système de provision couvrant le risque de change est également envisagé et sera finalement retenu pour couvrir la part en monnaie hongroise.
Une couverture par assurance externe sur le principe de la COFACE est par ailleurs proposée et finalement souscrite pour couvrir la part en devise polonaise.
Enfin des achats à terme de PLN et de HUF sont effectués dès la signature du contrat.
Rationaliser la couverture des risques : le changement de devise fonctionnelle
La devise fonctionnelle d'une entité est la devise dans laquelle elle enregistre son bilan et son compte de résultat et le reporte au groupe. Elle peut être différente de la devise du pays où est localisée l'entité. Par exemple, en France, la société CMA-CGM a adopté l'USD comme devise fonctionnelle car son secteur d'activité (fret maritime) travaille essentiellement en USD. Généralement le choix de la devise fonctionnelle doit répondre à un certain nombre de critères dont le principal résulte de l'analyse faite par une société de sa principale devise d'échanges (et donc de "fonctionnement"). Toutes les transactions commerciales effectuées dans une autre devise que la devise fonctionnelle présentent un risque de change pour l'entité (risque de transaction). Par ailleurs, en consolidation, les comptes de l'entité sont convertis de sa devise fonctionnelle vers la devise fonctionnelle du groupe, qui est l'euro pour ALSTOM (risque de translation).
La devise fonctionnelle d'Alstom : du franc suisse à l'euro
Le groupe Alstom est très présent en Suisse au travers des activités Power rachetées à ABB. Sont domiciliés en Suisse (Baden) les centres de décision suivants :
• Le siège mondial du secteur Power Service (pièces détachées, maintenance et exploitation de centrales) dont le CA s'élève à 3 milliards EUR
• Le siège mondial du secteur Power Systems, et au sein de ce secteur, les sièges mondiaux de Plants (construction de centrales) et TMG (coordination de la fabrication : turbines, générateurs, etc …) dont le CA s'élève à 2 milliards EUR
Alstom dispose par ailleurs en Suisse d'un site de fabrication de turbines (Birr). Du fait de cette implantation, une grande partie des contrats commerciaux internationaux d'Alstom Power sont domiciliés en Suisse, gérés par les équipes suisses, utilisant le franc suisse (CHF) comme devise fonctionnelle.
La décision a été prise de passer en devise fonctionnelle EUR en 2008. Quels en sont les arguments ?
La plupart des échanges commerciaux de la Suisse, à l'import comme à l'export, se font actuellement en CHF. Or il apparaît que les contreparties de ces échanges sont majoritairement non suisses. Par exemple, 68 % des ventes externes d'ALSTOM Suisse sont facturées en CHF, quand seulement 6 % du CA sont réalisés en Suisse. La facturation systématique en CHF masque le fait que la majorité des transactions sont réalisées avec des contreparties de la zone EUR et que la devise "naturelle" de travail d'ALSTOM Suisse devrait être l'EUR.
La politique d'ALSTOM est de couvrir systématiquement le risque de change lié aux contrats lorsque les ventes ou les achats sont effectués dans une devise différente de la devise fonctionnelle de l'entité. Les entités Suisses sont donc tenues de couvrir leur risque de transaction par rapport au CHF. La domiciliation en Suisse de nombreux contrats internationaux Power génère un risque de transaction conséquent et d'importants volumes de change contre CHF.
Ceci est amplifié par la complexité des contrats Power et de la chaîne de sous-traitance interne qu'ils impliquent. Par exemple, lorsqu'un contrat est signé pour la construction d'une centrale clés en main, ce sont plusieurs entités ALSTOM de différents pays qui interviennent. Il y a ainsi des liens de sous-traitance très étroits entre ALSTOM Power Suisse, France et Allemagne. Et le fait que ces trois pays ne partagent pas la même devise fonctionnelle génère des risques de change sur les transactions internes, complique le montage du contrat, et le rend plus onéreux en raison des coûts de couverture de change.
La décision de changer de devise fonctionnelle vise à simplifier ces liens et à diminuer les volumes de change nécessaires à la couverture des risques de transaction.
Une part importante des ventes et de la marge du groupe ALSTOM est domiciliée en Suisse. Comme elle est exprimée en CHF, ALSTOM subit un risque de translation lors de la conversion de la contribution suisse dans les comptes consolidés en EUR du groupe. Très simplement, si ALSTOM Suisse dispose d'un carnet de commandes de 1 milliard de CHF, sa contribution au carnet de commandes du groupe peut significativement diminuer si le CHF se déprécie par rapport à l'EUR (ce qui a été le cas en 2007). Faire passer ALSTOM Suisse en devise fonctionnelle EUR annule ce risque pour le groupe.
Gestion du projet et acceptation par les équipes locales
Le projet, lancé par la Trésorerie Centrale, a rencontré un certain nombre de résistances en Suisse mais a été défendu très tôt par la Direction du groupe et il a fallu beaucoup communiquer et expliquer les avantages et les inconvénients afin de vaincre les réticences locales.
Les premiers a percevoir les avantages à tirer de ce changement ont été les secteurs Power Systems et Power Service.
• Power Systems : la charge administrative et les coûts de couverture de change sont lourds pour cette activité et sont amplifiés par la complexité des relations de sous-traitance interne. Pour ce secteur, toute réduction des risques de transaction et des volumes de change était donc la bienvenue.
• Power Service : ce secteur se fournit quasi exclusivement en pièces détachées auprès des usines de Power Systems via la Suisse, et est quasi exclusivement facturé en CHF. Or 50 % de sa clientèle est basée dans la zone euro. Le changement de devise fonctionnelle lui permet donc de se fournir en EUR et de bénéficier ainsi d'une couverture naturelle de ses ventes en EUR.
Les services centraux suisses (comptabilité, trésorerie …) ont ensuite suivi, et aujourd'hui, le projet est mené par une équipe locale en liaison avec les services financiers du groupe. C'est un projet de longue haleine, qui mobilise beaucoup d'intervenants et s'étale sur près de 18 mois. Ce projet a un impact conséquent à la fois sur l'organisation des secteurs et des services centraux suisses et sur leurs systèmes d'information. Il va dans le sens d'une rationalisation des procédures de gestion du change dans le groupe.
Conclusion
L'activité du groupe ALSTOM, groupe au champ d'action mondial, génère des risques de change liés à l'utilisation de diverses devises avec ses fournisseurs et ses clients, à l'intérieur comme à l'extérieur du groupe. Ces risques sont pour l'essentiel couverts, ce qui induit des coûts supplémentaires pesant sur la compétitivité-prix des offres. On voit là tout le profit que tirerait une entreprise comme ALSTOM à voir s'étendre des unions monétaires telle que la zone EURO. Le commerce au sein de ces zones s'affranchit des risques de change et par là même des coûts qu'ils induisent. En effet tout élargissement de zone monétaire comme celui de la zone euro entraîne de facto une disparition des risques de change et donc des coûts associés à la gestion de ces risques : non seulement les coûts de transaction mais également les coûts liés aux moyens humains et techniques, à l'organisation qu'il faut mettre en place, dans les unités, les business, les secteurs, pour identifier, gérer et contrôler les risques.
[1] La COFACE est une compagnie d'assurance spécialisée dans l'assurance-crédit aux exportations. Sa mission est "de faciliter les échanges entre les entreprises partout dans le monde et contribuer ainsi au développement du commerce mondial".
[2] La devise fonctionnelle d'une entité est la devise dans laquelle elle opère, enregistre son bilan et son compte de résultat, et le reporte au groupe.