Question 2. Comment les tables de mobilité sont-elles construites ?

Sommaire

Pour rendre compte de la mobilité sociale intergénérationnelle, les sociologues construisent des « tables de mobilité ». En France, elles sont principalement le résultat du travail de l’Insee, qui construit ces tables sur la base de l’enquête Formation et qualification professionnelle, qui a lieu chaque décennie environ. Le principe de ces tables est simple : il s’agit d’étudier la place qu’occupent les individus (le plus souvent actifs) par comparaison avec celle qu’occupent ou occupaient leurs parents.

Les personnes prises en compte sont celles qui ont atteint un âge qui fait penser qu’elles auront une certaine stabilité dans leur carrière. On retient, ainsi, en général les actifs de 40 ans et plus, même si dans des travaux plus récents, l’Insee a abaissé ce seuil à 30 ans. Les tables suivent la mobilité au niveau individuel et il est habituel de construire des tables différentes pour étudier la mobilité sociale des hommes (le plus souvent par rapport à leur père) et celle des femmes (que ce soit par rapport à leur père ou à leur mère).

La table de mobilité qui résulte directement de l’enquête est la table de mobilité brute où les personnes sont classées en fonction de leur PCS et de celle de leur parent retenu (père ou mère). Sur cette base, il est possible de construire deux tables différentes :

* la table des « destinées » qui étudie ce que deviennent les individus (à quelle PCS ils appartiennent) en fonction de la PCS de leur père (ou leur mère). Par exemple, c’est dans cette table que l’on pourra savoir quelle est la proportion de fils d’agriculteurs devenus cadres ;

* la table des « origines » (ou « recrutement ») qui étudie la PCS d’origine (celle de leur père ou de leur mère) des individus appartenant à chacune des PCS. Par exemple, c’est dans cette table que l’on pourra savoir quelle est la proportion de cadres dont les parents étaient agriculteurs.

Ces deux tables sont complémentaires.

Les tables de mobilité sont des outils synthétiques puissants permettant de rendre compte des flux de mobilité sociale, c’est-à-dire des changements de catégorie sociale d’une génération à une autre. Elles permettent d’observer les changements de catégorie sociale en mesurant la proportion de ceux et celles qui appartiennent à une autre PCS que leurs parents, mais aussi de rendre compte de l’immobilité sociale en mesurant la proportion de ceux et celles qui appartiennent à la même PCS que leurs parents.

Les « marges » des tables de mobilité (dernière ligne ou dernière colonne) rendent compte de la structure sociale pour la génération des parents (dans la table de recrutement) ou dans celle de la génération que l’on observe (dans la table de destinée). Il est alors possible de comparer les deux pour observer les changements de structure d’une génération à une autre. Par exemple, on observe en général une diminution de la proportion d’agriculteurs exploitants. Ces marges sont également utiles pour relativiser l’ampleur des flux observés. Ainsi, si on observe que de nombreux enfants de cadres deviennent cadres, il sera utile de voir si les enfants d’autres catégories deviennent également cadres.

Cependant, les tables de mobilité ont aussi des limites importantes, qui font qu’elles doivent être complétées par d’autres outils pour observer finement la mobilité sociale.

D’abord, elles sont construites sur l’outil des PCS. Ce dernier est une bonne synthèse de la position d’un individu dans la société, mais il ne rend pas compte, par exemple, de son revenu ou de son patrimoine. Or, ces éléments participent bien à la définition de la position d’un individu dans la société : être ouvrier fils d’ouvrier peut cacher une ascension sociale si on a acquis la propriété d’un bien immobilier par exemple. Retenir l’outil des PCS comme seul critère de classification empêche également de bien voir « d’où viennent » les individus puisqu’on ne sait rien de la composition de leur famille, de la profession de leur autre parent, du patrimoine de cette famille...

Les PCS agglomèrent également des professions assez différentes et parfois hiérarchisées au sein d’une même catégorie. C’est le cas si on retient comme catégorie celle des ouvriers ou celle des employés. Être fils d’employé non qualifié et accéder au statut d’employé qualifié sera vu comme de l’immobilité sociale car on reste au sein de la PCS 5 (les dernières tables faites par l’Insee séparent d’un côté les ouvriers et employés qualifiés et de l’autre les ouvriers et employés non qualifiés). De la même manière, un individu dont les parents tiennent une petite épicerie et qui devient le chef d’une grande entreprise multinationale « reste » au sein de la PCS des artisans, commerçants et chefs d’entreprise et apparaît comme immobile.

Enfin, les tables de mobilité ne disent rien du statut de l’emploi occupé par l’individu : le fils d’un journaliste salarié d’un grand quotidien national et qui fait quelques piges en tant que journaliste pour un média régional apparaîtra comme immobile, tout comme l’ouvrier enchaînant les contrats d’intérim et les périodes de chômage dont le père est ouvrier dans la même usine depuis le début de sa carrière.

Document 1. La table de mobilité brute : part des hommes de 30 à 59 ans selon la profession et celle de leur père (en%).

Facile

Lecture : 18,9 % des hommes sont ouvriers et avaient un père ouvrier.

Champ : France métropolitaine, hommes âgés de 30 à 59 ans qui travaillent ou ont déjà travaillé à la date de l'enquête.

Source : Insee, enquête FQP 2014-2015.

 

Questions :

1/ Faites une phrase présentant les données soulignées.

2/ Quelle conclusion peut-on tirer de la comparaison de ces deux données ?

3/ Comparez les deux données en rouge.

4/ Dans ce tableau, où peut-on voir la part de personnes ayant la même PCS que leur père ?

 

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Réponses :

1/ En France, en 2014-2015, selon l’Insee, sur 100 hommes de 30 à 59 ans qui travaillent ou ont déjà travaillé, en moyenne 2,6 sont agriculteurs exploitants. À la même date, sur 100 de ces hommes, en moyenne, 8,5 avaient un père agriculteur exploitant.

2/ La comparaison des deux données nous permet de voir que dans la génération des pères, il est beaucoup plus fréquent d’être agriculteur exploitant que dans celle des fils : la part des agriculteurs exploitants a fortement diminué d’une génération à l’autre.

3/ Sur 100 hommes de 30 à 59 ans qui travaillent ou ont déjà travaillé, en moyenne 1,4 sont ouvriers et ont un père cadre ou en profession intellectuelle supérieure selon l’Insee en 2014-2015. La part des hommes de cette génération qui sont ouvriers est de 33 %, soit plus de 20 fois plus : il est relativement rare pour un homme ouvrier d’avoir un père cadre.

4/ Les personnes ayant la même profession que leur père se trouvent sur la « diagonale » du tableau (données en bleu :

 

 

Document 2. La table des destinées : PCS des hommes de 30 à 59 ans selon celle de leur père (en%)

Facile

 

Questions :

1/ Faites une phrase présentant la donnée soulignée.

2/ Faites une phrase présentant la donnée en rouge.

3/ Comparez la donnée en rouge et la donnée soulignée.

4/ Quelle est la part des fils de cadres qui sont devenus cadres ?

5/ Quelle est la part des fils de cadres qui sont devenus ouvriers ?

6/ Quelle est la part des fils d’ouvriers qui sont devenus cadres ?

7/ Pour quelle PCS l’immobilité est-elle la plus forte ?

8/ Pourquoi peut-on dire que l’immobilité sociale est plus forte pour les cadres que pour les ouvriers ?

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Réponses :

1/ Sur 100 hommes de 30 à 59 ans qui ont un emploi ou ont déjà occupé un emploi, en 2014-2015, en moyenne 2,6 sont agriculteurs exploitants en France selon l’Insee.

2/ Sur 100 hommes de 30 à 59 ans qui ont un emploi ou ont déjà occupé un emploi en 2014-2015, et qui ont un père agriculteur exploitant, en moyenne 25 sont agriculteurs exploitants.

3/ On peut voir que la proportion de fils d’agriculteurs exploitants qui deviennent à leur tour agriculteurs est environ 10 fois plus importante que la part des agriculteurs exploitants dans la population des individus du même âge : le fait d’avoir un père agriculteur donne une chance beaucoup plus grande d’être à son tour agriculteur que pour les autres professions.

4/ En moyenne, sur 100 fils de cadres et professions intellectuelles supérieures, environ 47 sont devenus cadres à leur tour.

5/ En moyenne, sur 100 fils de cadres et professions intellectuelles supérieures, environ 10 sont devenus ouvriers.

6/ En moyenne, sur 100 fils d’ouvriers, environ 9,4 sont devenus cadres.

7/ Pour mesurer l’importance de l’immobilité, il faut comparer la valeur de la diagonale à celle de la marge : on compare alors la fréquence à laquelle les individus occupent la même profession que leur père et celle à laquelle les individus, en général, rejoignent cette profession. Ici, c’est pour les agriculteurs exploitants que l’immobilité est la plus forte : ils deviennent 10 fois plus souvent agriculteurs que l’ensemble de la population (voir question 3).

8/ En ne regardant que les valeurs de la diagonale, on pourrait avoir l’impression que l’immobilité est à peu près la même pour les enfants d’ouvriers et pour les enfants de cadres. Il faut cependant relativiser l’importance de la valeur de la diagonale en étudiant la fréquence avec laquelle les individus rejoignent chaque PCS.

Ici, on peut dire que les enfants d’ouvriers deviennent 1,45 (47,6/33) fois plus souvent ouvriers que l’ensemble de la population alors que les enfants de cadres deviennent 2,43 (47/19,3) fois plus souvent cadres que l’ensemble de la population.

 

 

 

 

Document 3 : La table de recrutement (ou des origines) : PCS des pères des individus selon leur PCS actuelle (en%)

Facile

Questions

1/ Faites une phrase présentant la donnée soulignée.

2/ Faites une phrase présentant la donnée en rouge.

3/ Comparez la donnée en rouge et la donnée soulignée.

4/ Quelle est la part des cadres dont le père était cadre ?

5/ Quelle est la part des cadres dont le père était ouvrier ?

6/ Quelle est la part des ouvriers dont le père était cadre ?

7/ Pour quelle PCS l’immobilité est-elle la plus forte ?

8/ Pourquoi peut-on dire que l’immobilité sociale est plus forte pour les cadres que pour les ouvriers ?

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Réponses :

1/ Sur 100 hommes âgés de 30 à 59 ans qui occupent ou ont occupé un emploi, en moyenne, 8,5 ont un père agriculteur exploitant en France en 2014-2015 selon l’Insee.

2/ Sur 100 agriculteurs exploitants âgés de 30 à 59 ans, en moyenne, 81,1 ont un père agriculteur exploitant en France en 2014-2015.

3/ On peut voir que les hommes qui sont agriculteurs ont près de 10 fois plus souvent un père agriculteur que le reste de la population.

4/ Sur 100 cadres en 2014-2015, en moyenne 33,8 avaient un père cadre ou profession intellectuelle supérieure.

5/ Sur 100 cadres en 2014-2015, en moyenne 19,3 avaient un père ouvrier.

6/ Sur 100 ouvriers en 2014-2015, en moyenne, 4,2 avaient un père cadre.

7/ Pour mesurer l’importance de l’immobilité, il faut comparer la valeur de la diagonale à celle de la marge : on compare alors la fréquence à laquelle les individus ont un père qui appartient à la même profession qu’eux et la fréquence à laquelle les individus ont un père de cette profession. Ici, c’est pour les agriculteurs exploitants que l’immobilité est la plus forte : ils ont environ 10 fois plus souvent un père agriculteur que l’ensemble de la population (voir question 3).

8/ En ne regardant que les valeurs de la diagonale, on pourrait avoir l’impression que l’immobilité est plus forte chez les ouvriers que chez les cadres. Il faut cependant relativiser l’importance de la valeur de la diagonale en étudiant la fréquence avec laquelle les individus ont u n père appartenant à chaque PCS.

Ici, on peut dire que les enfants d’ouvriers ont 1,45 (57,5/39,8) fois plus souvent un père ouvrier que l’ensemble de la population alors que les cadres ont 2,43 (33,8/13,9) fois plus souvent un père cadre que l’ensemble de la population.


 

Document 4. De la table de mobilité brute à la table des destinées 

Facile

Questions :

1/ Combien d’hommes de 40 à 59 ans occupent une profession d’agriculteurs exploitants ?

2/ Combien des pères de ces hommes occupent ou occupaient une profession d’agriculteurs exploitants ?

3/ Combien d’hommes de 40 à 59 ans sont employés et ont un père ouvrier ?

4/ Quelle est la part des fils d’ouvriers qui sont devenus ouvriers ?

5/ Que sont devenus les fils d’ouvriers ? Calculez leur part dans chaque PCS.

6/ Sur le modèle de la question précédente, remplissez le tableau suivant :

 

Table des destinées pour les hommes de 40 à 59 ans en 2003 : PCS des hommes de 40 à 59 ans en fonction de celle de leur père (en%)

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Réponses :

1/ En 2003, en France, selon l’Insee, 285 000 hommes de 40 à 59 ans ont une profession d’agriculteurs exploitants.

2/ En 2003, 252 000 pères des agriculteurs exploitants sont eux-mêmes agriculteurs exploitants. On peut lire cette même donnée de la façon suivante : 252 000 hommes de 40 à 59 ans sont agriculteurs exploitants et ont un père agriculteur exploitant.

3/ En 2003, 375 000 hommes de 40 à 59 ans sont employés et ont un père ouvrier.

4/ Quelle est la part des fils d’ouvriers qui sont devenus ouvriers ?

4/ Il y a 2 998 000 fils d’ouvriers. Parmi eux, 1 373 000 sont devenus ouvriers, soit 45,6 % (1373/2998).

5/ Par exemple, pour les agriculteurs exploitants, il faut faire le calcul suivant : sur les 2 998 000 fils d’ouvriers, 20 000 sont devenus agriculteurs exploitants, soit 0,67 % (qu’on arrondira à 1%)

Pour les artisans…, le calcul est le suivant : 225/2998 = 7,5 %

Pour les cadres, on a : 304/2998 = 10,1 %

Pour les professions intermédiaires, 701/2998 = 23,4 %

Pour les employés : 375/2998 = 12,5 %

6/

Table des destinées pour les hommes de 40 à 59 ans en 2003 : PCS des hommes de 40 à 59 ans en fonction de celle de leur père (en%)

 

 

Document 5. De la table de mobilité brute à la table des recrutements (origines)

Facile

 

Questions :

1/ Quelle est la part des ouvriers qui avaient un père ouvrier ?

2/ Comparez ce résultat à celui obtenu à la question 4 du document 4.

3/ Pour les ouvriers, calculez la proportion de chaque PCS dans leurs origines (PCS du père)

4/ Sur le modèle de la question précédente, remplissez le tableau suivant :

 

Table des origines pour les hommes de 40 à 59 ans en 2003 : PCS des hommes de 40 à 59 ans en fonction de celle de leur père (en%)

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Réponses :

1/ Il y a 2 364 000 hommes de 40 à 59 ans ouvriers. Parmi eux, 1 373 000 avaient un père ouvrier, soit 58,1 %.

2/ On observe que 45,6 % des fils d’ouvriers sont devenus ouvriers et que 58,1 % des hommes qui sont ouvriers en 2003 ont un père qui était, lui-même, ouvrier. Cela peut s’expliquer par la diminution relative du poids des ouvriers dans la population active : il y a plus d’hommes qui ont un père ouvrier que d’hommes ouvriers parmi ceux de 40 à 59 ans.

3/ 426 000 ouvriers ont un père agriculteur exploitant, soit 18,0 % des ouvriers (426/2364)

210 000 ouvriers ont un père artisan, commerçant… , soit 8,9 % des ouvriers (210/2364)

52 000 ouvriers ont un père agriculteur exploitant, soit 2,2 % des ouvriers (52/2364)

135 000 ouvriers ont un père agriculteur exploitant, soit 5,7 % des ouvriers (135/2364)

169 000 ouvriers ont un père agriculteur exploitant, soit 7,1 % des ouvriers (169/2364)

4/

Table des origines pour les hommes de 40 à 59 ans en 2003 : PCS des hommes de 40 à 59 ans en fonction de celle de leur père (en%)

Document 6 Table des destinées des actifs de 39 à 59 ans au début des années 2010 (en colonnes la PCS des hommes de 39 à 59 ans, en ligne, celle de leur père)

Facile

Questions :

1/ Quelle est la part des enfants d’ouvriers qualifiés qui deviennent ouvriers non qualifiés ? Comment peut-on qualifier leur mobilité ?

2/ Quelle est la part des cadres d’entreprises qui deviennent professions libérales et assimilées ?

3/ Qu’apporte une telle table de mobilité par rapport à celles utilisées habituellement (documents 1 à 5) ?

4/ Dans l’article d’où est tirée cette table, Cédric Hugrée écrit : « l’usage du niveau plus détaillé de la nomenclature PCS, tout comme l’intégration de la position sociale des grands-parents, des indépendants et/ou du parcours migratoire compliquent la mesure de la distance parcourue. Mais son grand intérêt est de rendre davantage visibles les chemins préférentiellement empruntés par les descendants et de révéler les statuts, secteurs d’emploi ou groupes de professions qui favorisent certaines proximités sociales ». Commentez ce passage.

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Réponses :

1/ 20 % des enfants d’ouvriers non qualifiés deviennent ouvriers qualifiés en France selon l’Insee. Leur mobilité est ascendante puisque leur position sociale est plus favorable que celle de leur père.

2/ 4 % des enfants de cadres d’entreprises deviennent professions libérales et assimilées, c’est une proportion assez faible.

3/ Cette table permet d’avoir une vision plus fine de la mobilité sociale que les tables classiques où les 6 PCS sont retenues. On peut alors voir plus de flux de mobilité (à l’intérieur des PCS) et observer l’ampleur de ces flux (par exemple, voir entre quelles professions les passages sont rares au sein d’une même PCS, comme fait à la question 2).

4/ Par cette phrase, le sociologue veut dire que pour étudier la mobilité des individus, il est important d’avoir une vision assez précise de leur position de départ. La profession des parents ne suffit pas toujours à situer une personne dans l’espace social, et connaître la position des grands-parents ou savoir que la personne a migré peut donner des pistes pour connaître les facteurs de mobilité ou de reproduction sociale qui jouent sur la personne.

 

Document 7 Les tables de mobilité, une information partielle ?

Facile

Les employés et les ouvriers sont les plus sujets au sentiment de déclassement : 30 % d’entre eux se sentent déclassés et ils représentent près de 60 % des personnes qui se sentent déclassées. 53 % des employés et ouvriers non qualifiés ont une position sociale moins élevée que celle de leur père et 36 % se sentent effectivement déclassés. La mobilité sociale descendante et le sentiment de déclassement sont, logiquement, moins fréquents chez les employés et les ouvriers qualifiés, avec des taux respectifs de 19 % et de 26 %.

Au sein des employés et des ouvriers, le sentiment de déclassement varie fortement selon les professions. Il est ainsi plus élevé pour les ouvriers agricoles (45 %), les caissiers (43 %), les serveurs, aides de cuisine et employés d’hôtel (40 %) ou encore les vendeurs non spécialisés (37 %). Dans ces professions, les conditions d’emploi sont en effet moins favorables (davantage de temps partiel, risque de chômage plus élevé et revenu plus faible) et les mobilités sociales descendantes plus fréquentes. À l’inverse, le sentiment de déclassement est plus faible chez les ouvriers qualifiés, notamment ceux de l’industrie, du bâtiment et des travaux publics ou de la mécanique et du travail des métaux, pour lesquels la mobilité sociale descendante est très rare (environ 10 %). Ce sentiment est également peu répandu parmi les militaires, les policiers, les surveillants pénitentiaires et les pompiers (17 %). Ces professions s’inscrivent plus souvent dans une trajectoire sociale descendante (environ 30 %), mais le risque de chômage y est plus faible et les rémunérations plus élevées que pour les autres employés ou ouvriers.

Source : Tiaray Razafindranovona, « Malgré la progression de l’emploi qualifié, un quart des personnes se sentent socialement déclassées par rapport à leur père », Insee Première n°1659,2017

 

Questions :

1/ Comment les tables de mobilité peuvent-elles permettre de mesurer le déclassement ?

2/ Au-delà de leur mobilité descendante, qu’est-ce qui peut expliquer le sentiment de déclassement pour les ouvriers agricoles, les caissiers ou encore les serveurs ? Ceci peut-il être mesuré dans les tables de mobilité ?

3/ Pourquoi le sentiment de déclassement est-il moins fort pour les militaires, les policiers ou encore les pompiers que pour d’autres employés ? Ceci peut-il être mesuré dans les tables de mobilité ?

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Réponses :

1/ Les tables de mobilité permettent de mesurer la mobilité intergénérationnelle. On peut y observer des déplacements « vers le bas » : par exemple, des ouvriers qualifiés vers les ouvriers non qualifiés, des cadres vers les professions intermédiaires, des professions intermédiaires vers les employés…

2/ Ces catégories regroupent des personnes qui ont assez souvent connu un déclassement réel par rapport à leurs parents, mais c’est aussi parce qu’elles ont des emplois avec des conditions défavorables qu’elles ont le sentiment d’être déclassées. Une plus faible rémunération, un fort risque de chômage, un emploi précaire ou à temps partiel peuvent créer un sentiment de déclassement. Ces éléments ne sont pas objectivés dans les tables de mobilité où tous les individus sont regroupés par PCS, quelle que soit leur rémunération, leur contrat de travail, et ou les chômeurs sont classés avec les personnes en emploi.

3/ Ces catégories sont peu concernées par le risque de chômage (ce sont pour la majorité des fonctionnaires) et reçoivent une rémunération plutôt élevée par rapport aux autres employés ou ouvriers. Ils peuvent avoir l’impression d’avoir connu une certaine forme d’ascension sociale par rapport à des parents ouvriers par exemple. Ceci ne peut pas se voir dans les tables de mobilité classiques qui ne font pas de distinction au sein de la catégorie employé et dans lesquelles la rémunération n’apparaît pas.

Exercice 1. En France en 2003

Modéré

En France, en 2003, selon l’Insee, 4 157 038 femmes âgées de 40 à 59 ans étaient actives selon l’enquête FQP de l’Insee. Parmi elles, 140 639 étaient agricultrices exploitantes et 541 532 avaient un père agriculteur exploitant. À la même date, 83 808 femmes de 40 à 59 ans sont agricultrices et filles d’agriculteurs.

Questions :

1/ Calculez la part des filles d’agriculteurs devenus agricultrices.

2/ Calculez la proportion de filles d’agriculteurs parmi les agricultrices.

3/ Laquelle des deux données calculées aux questions 1 et 2 doit figurer dans la table de recrutement des femmes âgées de 40 à 59 ans en 2003 ?

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Réponses :

1/ Le calcul est le suivant : 83 808/541 532 = 0,155.

Le résultat peut être lu de la façon suivante : Sur 100 filles d’agriculteurs âgées de 40 à 59 ans en 2003, 15,5 environ sont devenues agricultrices exploitantes.

2/ Le calcul est le suivant : 83 808/140 639 = 0,596,.

Le résultat peut être lu de la façon suivante : Sur 100 filles d’agriculteurs âgées de 40 à 59 ans en 2003, 59,6 environ sont devenues agricultrices exploitantes.

3/ La table de recrutement indique la proportion de femmes issues des différentes catégories sociales pour chaque PCS : c’est donc la réponse à la question 2 qui doit figurer dans cette table.

Exercice 2. PCS des femmes de 35 à 59 ans

Facile

Questions :

1/ Vrai ou faux : il s’agit d’une table d’origines.

2/ Vrai ou faux : 100 % des pères sont agriculteurs exploitants ?

3/ Vrai ou faux : 1,3 % des femmes de 35 à 59 ans sont agricultrices exploitantes ?

4/ Complétez : Sur 100 filles de cadres, environ ……… sont devenues cadres et environ …………. sont devenues ouvrières.

5/ Choisissez la bonne réponse : parmi les filles d’ouvriers, la part des employées est …………… à la part des ouvrières.

 

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Réponses :

1/ Vrai ou faux : il s’agit d’une table d’origines.

1/ Faux : il s’agit d’une table de recrutements (ou origines)

2/ Vrai ou faux : 100 % des pères sont agriculteurs exploitants ?

2/ Faux : le 100 % dans la marge signifierait plutôt que sur 100 pères agriculteurs exploitants, 100 sont agriculteurs exploitants…

3/ Vrai ou faux : 1,3 % des femmes de 35 à 59 ans sont agricultrices exploitantes ?

3/ Vrai : la dernière ligne indique la structure des emplois des femmes de 35 à 59 ans.

4/ Sur 100 filles de cadres, environ 41,7 sont devenues cadres et environ 10,2 sont devenues ouvrières.

5/ Parmi les filles d’ouvriers, la part des employées est supérieure à la part des ouvrières.

Exercice 3. Indiquez si la proposition est vraie ou fausse et justifiez.

Difficile

Questions :

1/ Les tables de mobilité permettent de mesurer à la fois la mobilité professionnelle et la mobilité intergénérationnelle.

2/ Les tables de mobilité sont construites à partir des PCS.

3/ Les tables de mobilité renseignent sur l’immobilité sociale.

4/ Les tables de mobilité renseignent sur la structure sociale.

5/ Les tables de mobilité permettent de comparer la position sociale des individus à celle de l’un de leur parent.

6/ Plus les individus dans les tables de mobilité sont jeunes et mieux elles rendent compte de la mobilité sociale.

7/ Une personne qui a un CDI peut être considéré comme mobile socialement par rapport à son père si son dernier n’a occupé que des emplois précaires.

8/ Les tables de mobilité renseignent sur l’accumulation du patrimoine par les ménages.

9/ Un changement de position sociale entre deux professions indépendantes se voit dans une table de mobilité construite avec les PCS.

10/ À cause de leurs limites, les tables de mobilité ne servent à rien.

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Réponses :

1/ FAUX : elles ne donnent des indications que sur la mobilité intergénérationnelle.

2/ VRAI : en général, on retient les 6 PCS d’actifs.

3/ VRAI : cette immobilité se lit sur la diagonale de la table étudiée.

4/ VRAI : cette structure se lit sur la marge de la table.

5/ VRAI : c’est le principe de construction de ces tables.

6/ FAUX : en prenant des individus « trop jeunes », le risque est de négliger la mobilité professionnelle qui peut se produire fréquemment aux plus jeunes âges sur le marché du travail.

7/ VRAI : il s’agit d’un changement de position sociale. Ce changement ne sera pas vu dans les tables de mobilité.

8/ FAUX : les données utilisées, en général, ne concernent pas directement le patrimoine.

9/ FAUX : en retenant les PCS au niveau le plus agrégé, les tables de mobilité ne renseignent pas sur ce type de mobilité.

10/ FAUX : leurs limites font qu’elles gagnent à être complétées par d’autres analyses, mais on ne peut bien-sûr pas dire que les tables de mobilité ne servent à rien !

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