Définition :
Situation d’une économie stable, sans croissance, ni décroissance.
L'essentiel
Dès le début du XIXe siècle, pendant la 1ère révolution industrielle, l’un des premiers économistes classiques, David Ricardo, a envisagé la fin de la croissance économique, un « état stationnaire ». Il estimait que l’économie tend naturellement vers une situation de croissance nulle.
Dans son ouvrage Principes de l’économie politique et de l’impôt, publié en 1817, Ricardo explique que des mécanismes économiques s’opposent à ce que la croissance économique soit durable sur le long terme. On est alors au commencement de la révolution industrielle, l’économie est encore très fortement agraire. D’ailleurs, Ricardo considère que les propriétaires terriens ont une place importante dans la société et l’économie puisqu’ils louent leurs terres et en dégagent des rentes. Or, l’expansion démographique, augmente les besoins humains en nourriture, notamment en blé, base de l’alimentation de l’époque, et incite à utiliser de plus en plus de terres. Mais, la loi des rendements décroissants, décrite par J. Turgot au XVIIIème siècle, conduit à défricher et cultiver de nouvelles terres qui sont, logiquement, moins fertiles.
La mise en culture de ces terres moins fertiles nécessite plus de travail, ce qui tend à augmenter le coût de production et finalement le prix du blé. Comme le salaire de l’ensemble des travailleurs, salaire dit de subsistance (permettant de reconstituer de la force de travail et de nourrir une famille) dépend directement du prix du blé, l’ensemble des salaires est donc amené à augmenter. Les rentes des propriétaires fonciers augmentent mécaniquement elles-aussi car les propriétaires des terres les plus fertiles bénéficient d’une rente différentielle (différence entre le rendement de leur terre et celui des terres les moins fertiles). C’est donc toute la répartition des revenus qui est modifiée. Si les salaires et les rentes augmentent, les profits sont conduits à stagner voire diminuer. Ricardo y voit la source d’une baisse de l’accumulation du capital : les investissements et la création de richesses qui en dépend stagnent voire baissent. Ricardo voit dans le libre-échange une force contraire permettant de limiter ce processus.
Cette réflexion sur l’état stationnaire a été reprise, dans les années 1930, à la suite du Krach boursier de 1929 et de la crise économique qui a suivi, par Alvin Hansen qui pose la notion de « stagnation séculaire ». Mais c’est surtout la croissance faible dans de nombreux pays après la Grande Récession de 2009 qui a remis au premier plan cette idée. En 2013, Lawrence Summers réactualise la notion, suivi par de nombreux économistes qui s’interrogent sur les origines du phénomène de croissance lente.
Certains, comme Michel Aglietta, mettent l’accent sur les relations entre l’économie réelle et la finance : le cycle financier mènerait vers la stagnation séculaire. C’est en partie le propos de son ouvrage Capitalisme, temps de rupture.
D’autres économistes, Robert Gordon en tête, identifient six « vents contraires » qui conduiraient inexorablement à la fin du progrès technique et à la fin de la croissance. Ces obstacles sont la démographie, les inégalités, l’éducation, la mondialisation, les contraintes environnementale et les limites de l’Etat-Providence. Plus optimistes, Philippe Aghion et Peter Howitt, s’intéressent à la diffusion des gains de productivité et du progrès technique et réfléchissent à la possible sortie de la croissance ralentie par le biais de nouvelles vagues d’innovations et d’institutions favorables au progrès technique. L’un des enjeux tient donc à la capacité des technologies de l’information et de la communication et de l’intelligence artificielle à générer une croissance comme d’autres innovations ont pu le faire auparavant