Banque mondiale

Définition :

la Banque mondiale est une organisation créée en 1944, qui fait partie du système de l’ONU et dont la mission principale est de favoriser le développement économique.

L'essentiel :

Comme le FMI, la Banque mondiale est une organisation qui est issue des accords de Bretton Woods signés en 1944. Le but de la conférence de Bretton Woods était d’organiser l’économie mondiale d’après guerre. Si l’idée d’une banque pour financer la reconstruction d’après-guerre est d’abord un projet des États-Unis, c’est John Maynard Keynes qui a présidé le groupe de travail sur cette banque. Au départ, l’idée était surtout de mettre en place une banque pour aider à la reconstruction de l’Europe, mais ses missions ont été étendues au financement du développement, concept qui émerge dans les années 1940.

C’est donc en 1944 qu’est créée la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD), dont le siège est situé à Washington et qui démarre ses activités deux ans après sa création. En 1947, cette banque, dont la première mission est de financer les pays meurtris par la guerre, accorde un prêt de 250 millions de dollars à la France. L’année suivante, un prêt est accordé au Chili, c’est le premier qui ne concerne pas la reconstruction d’après-guerre, mais véritablement le développement. La BIRD, forte de ses 189 membres est aujourd’hui le principal prêteur public d’argent au monde. Son activité de financement de la reconstruction est aujourd’hui devenue marginale, elle finance essentiellement le développement. En 1956, la création de la Société financière internationale lui permet d’intervenir également dans le financement du secteur privé. Cependant, l’action de la Banque mondiale va au-delà du financement.

 

Ainsi, dès 1960 l’Association internationale de développement est créée pour aller au-delà de la reconstruction des économies touchées par la guerre et se concentrer sur les pays les plus pauvres au monde. Sa principale mission est d’allouer des prêts à taux d’intérêt faible ou nul et de conseiller les gouvernements des 75 économies les plus pauvres au monde. Depuis plusieurs années, elle concentre aussi son activité autour de la prévention des risques et les réparations liées aux aléas climatiques.

Le CIRDI, Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements est également une émanation de la Banque mondiale, créé en 1966. Sa mission est de régler les conflits, le plus souvent entre un investisseur privé et un État, concernant un investissement international tel qu’un IDE. Son objectif est de promouvoir et de réguler les investissements internationaux, vus comme vecteurs de développement pour de nombreuses économies. Ce Centre a été complété, en 1988, par l’Agence multilatérale pour la garantie des investissements (AMGI, souvent désignée par son acronyme en anglais, MIGA), qui assure la couverture des risques liés aux émissions de garanties pour les investissements internationaux. On parle aujourd’hui du « groupe » Banque mondiale pour insister sur le fait que l’organisation regroupe 5 organismes, dont les missions diffèrent entre elles et se complètent.

 

L’histoire de la Banque mondiale est d’abord celle d’une organisation qui voit sa taille et ses prérogatives augmenter de façon régulière, notamment sous l’impulsion de son président Robert Mc Namara, en poste de 1968 à 1981, mandat le plus long à la tête de l’organisation. La Banque vise non seulement à fournir des fonds aux économies en développement, mais aussi à être un lieu de recherche sur le développement. Cette volonté se concrétise en 1973 avec la création du poste d’économiste en chef de la Banque mondiale, poste occupé entre autres par Joseph Stiglitz, William Easterly, Carmen Reinhart ou François Bourguignon. La Banque mondiale publie aussi chaque année un important Rapport sur le développement dans le monde et c’est elle qui est chargée de mesurer l’IDH des pays.

 

La Banque mondiale peut se targuer de réussites importantes, elle a aidé à la reconstruction d’économies dévastées par la guerre, a participé à la réduction de la pauvreté dans le monde et a aidé à juguler certaines crises, telles que celle de la dette au Mexique dans les années 1980 ou la crise asiatique en 1997.  Cependant, elle a été critiquée sur de nombreux points.

D’abord, la Banque mondiale défend une approche « conditionnelle » des prêts : en contrepartie de l’aide au développement, elle appelle à des changements structurels, supposés permettre aux pays de se développer. Ces changements structurels sont à associer à ce qu’on appelle le « Consensus de Washington ». Comme pour le FMI, cela se traduit par les « programmes d’ajustements structurels », mesures de libéralisation de l’économie, incitant à la privatisation des entreprises d’État, à la réduction des dépenses publiques et appelant à lutter activement contre la corruption. Le premier pays à avoir connu un tel plan est la Turquie en 1980. Joseph Stiglitz, qui a été économiste en chef de la Banque mondiale a été l’un des critiques les plus féroces de ces politiques, dont l’efficacité s’est avérée assez faible, alors qu’elles ont souvent déstabilisé les pays les ayant mises en place. On peut aussi citer William Easterly qui insiste sur le fait que la vision de la croissance économique de la Banque mondiale était construite autour d’un lien direct entre investissement économique et croissance et non pas sur le progrès de la productivité. Cette critique a donné lieu à un changement de doctrine au sein de la Banque mondiale avec le développement, de concert avec le FMI, des « stratégies de réduction de la pauvreté », centrée davantage sur les indicateurs de développement que sur les mesures de libéralisation.

Cependant, c’est sur un plan plus politique que la Banque mondiale a été contestée. Elle n’échappe pas aux difficultés de l’ensemble des organisations de l’ONU de permettre une approche multilatérale dans un monde de plus en plus fragmenté. Le développement économique est également rattrapé par des enjeux politiques. La Banque mondiale est ainsi critiquée comme étant sous la dépendance du gouvernement des États-Unis. Depuis sa création, et sauf dans le bref intérim assuré en 2019 par la Bulgare Kristalina Georgieva, la Banque a toujours été présidée par un homme issu des États-Unis et nommé, selon un accord implicite, par le gouvernement des Etats-Unis. Même s’il est né en Inde, le président du groupe Banque mondiale nommé en 2023, Ajay Banga ne fait pas exception. La distribution des prêts est parfois influencée par des partis-pris idéologiques. Le cas le plus flagrant concerne sans doute le Chili sous le gouvernement socialiste de Salvador Allende qui s’est vu refuser des prêts. Paul Romer a reconnu, dans une interview en 2018 que dans ce même pays, le gouvernement de gauche de Michelle Bachelet aurait aussi été désavantagé par le groupe Banque mondiale. En 2015, le Rapport spécial de l’ONU sur l’extrême pauvreté pointe du doigt le fait que la Banque mondiale « s’assied sur les droits humains » et le fait qu’elle ne se soucie pas des conséquences environnementales des investissements qu’elle finance est aussi mis en avant par de nombreuses ONG.

La Banque mondiale est donc aujourd’hui une organisation en crise et qui cherche à se redéfinir.

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