Coordination Philippe Deubel et Baptiste MarsollatSi le discours optimiste sur les vertus de l’école continue de défendre l’idée que l’éducation permet de briser le destin social assigné par la naissance, les sociétés ne parviennent pas toujours, tant s’en faut, à éviter que les hiérarchies scolaires ne se transforment en hiérarchies sociales rigides : dans ces conditions, le système scolaire tend à devenir un simple instrument de classement des individus dans le système social, de sélection des élites et d’exclusion des plus démunis. Dans une perspective internationale, François Dubet, Marie Duru-Bellat et Antoine Vérétout se demandent, dans ce récent ouvrage, par quels mécanismes et dans quelles conditions les systèmes scolaires peuvent affecter positivement ou négativement l’intégration et la cohésion des sociétés. Il apparaît que certains systèmes scolaires se révèlent plus inégalitaires que leurs sociétés tandis que des sociétés relativement similaires sur le plan culturel peuvent produire des systèmes scolaires très contrastés. Ainsi les Etats-Unis offrent-ils un style d’éducation plutôt bienveillant et compréhensif à l’égard des élèves (une « communauté bienveillante »), mais valorisent sur le marché du travail une compétition sociale et professionnelle intense. L’analyse proposée par nos trois auteurs conduit à dépasser le fatalisme sociologique de la pure reproduction sociale aussi bien que la vision prophétique et volontariste d’une école nécessairement juste et capable de transformer le monde.
L'ouvrage
Intégration et cohésion
Malgré la redoutable difficulté d’une comparaison pertinente des sociétés et des systèmes scolaires, les auteurs se sont efforcés de confronter ces différents ensembles sociaux en utilisant le critère de l’intégration (structure sociale et inégalités dans la distribution des positions sociales) et celui de la cohésion (soit les valeurs qui font le lien social, la confiance, la coopération).
Ainsi, l’ampleur des inégalités, le dynamisme du marché du travail et l’attribution des statuts sociaux entraînent une intégration plus ou moins forte des sociétés (leur degré d’intégration se mesurant à la faiblesse du chômage et des inégalités). De la même manière, un système éducatif qui scolarise longtemps les élèves dans un cursus unique sera jugé plus intégré qu’un système scolaire qui pratique une sélection précoce et laisse sortir un nombre important d’élèves sans diplôme au terme du cursus obligatoire.
La cohésion des sociétés repose quant à elle sur un ensemble de valeurs, de représentations et de croyances partagées, favorisant la confiance et la solidarité dans les rapports sociaux, mais aussi la confiance en soi, dans les autres et dans les institutions, élément essentiel à la croissance et au développement harmonieux d’une nation. Si les analyses classiques de la France en termes de « société bloquée » par Michel Crozier ou celles, plus récentes, d’Algan et Cahuc sur la « société de défiance » tendent à pointer l’excès de foi dans l’Etat central, le repli corporatiste, la faiblesse de la vie associative et le manque de civisme, les pays qui présentent des caractéristiques inverses (comme les Etats-Unis) enregistrent pourtant des taux de criminalité bien plus élevés et une importante méfiance réciproque entre communautés, malgré l’image tocquevillienne d’une riche démocratie locale et d’une vie communautaire intense. L’analyse de différents pays développés en fonction de ces quelques critères montre que l’intégration et la cohésion ne vont pas toujours de pair, les sociétés les plus intégrées n’étant pas toujours les plus « cohésives ». Ainsi, certaines d’entre elles apparaissent peu intégrées mais très cohésives (comme les Etats-Unis) alors que d’autres semblent plus fortement intégrées mais moins cohésives (comme la France).
Par ailleurs, l’éducation transmet des normes et des valeurs qui contribuent à rendre les systèmes scolaires plus ou moins cohésifs, en créant et renforçant (ou non) un esprit de groupe et un sentiment de confiance en soi et dans les autres, dans le style pédagogique et les traditions propres à chaque société. Dans ce cas aussi, le degré de cohésion de chaque société ne reflète ni ne détermine exactement le niveau de cohésion des systèmes scolaires, certains pays pouvant avoir des écoles très cohésives et une société qui l’est beaucoup moins.
« Crédentialisme » et paradoxe écologique
Il est ainsi possible de caractériser la distance sociologique entre les sociétés et leur école à l’aide de ces deux critères (intégration et cohésion) et de construire une comparaison raisonnée, malgré les limites inhérentes à un exercice qui tend inévitablement à simplifier une réalité très diverse et complexe. Les corrélations peuvent en effet se révéler fragiles et rencontrer rapidement leurs limites tandis que le benchmarking, nécessairement normatif, peut conduire à imposer un modèle idéal de référence (comme les sociétés scandinaves) qui n’en demeure pas moins discutable sous d’autres rapports.
En s’appuyant sur les grandes enquêtes internationales (World Value Survey, International Social Survey Programme, données de l’OCDE), il reste toutefois possible de dégager quelques éléments saillants de rupture et de continuité entre les systèmes scolaires et les systèmes sociaux. Dans ce paysage, la France offre un visage paradoxal puisque les inégalités y sont plus fortes à l’école que dans la société alors que l’école est moins cohésive que la société. A l’inverse, l’Italie présente de faibles inégalités scolaires mais de plus fortes inégalités sociales (à l’instar de l’Angleterre), tandis que l’école y est nettement plus cohésive que la société.
La notion de « crédentialisme » permet d’expliquer la distance qui existe entre les inégalités scolaires et les inégalités sociales. Les sociétés se caractérisent en effet par des degrés variables de confiance dans la capacité des diplômes à garantir la justice et l’efficience économique, à travers leur influence plus ou moins déterminante sur l’attribution des emplois. Dans les sociétés où le diplôme joue un rôle prépondérant en termes d’insertion sur le marché du travail, chacun a le sentiment de jouer gros dans la compétition scolaire et l’influence des inégalités sociales de départ sur les inégalités scolaires devient alors très forte (la cohésion du système scolaire peut d’ailleurs en pâtir dans la mesure où les camarades de classe deviennent prioritairement des rivaux dans la concurrence scolaire). La France valorise ainsi le mérite scolaire davantage que la réussite économique et professionnelle, ce qui explique non seulement le lien très étroit entre les diplômes obtenus et la position dans l’échelle sociale, mais aussi le haut niveau de reproduction sociale (et sans doute le fait que la théorie de la reproduction sociale soit née en France et non ailleurs…). Dans d’autres pays, la compétition sociale est moins forte car les individus savent que leur destin social ne se joue pas (seulement) à l’école, même si la reproduction sociale (tout aussi forte) peut s’opérer par d’autres voies (réseaux sociaux notamment). En Allemagne, les relations industrielles, le système de formation professionnelle et la mobilité au cours de la vie active permettent aux individus d’échapper au déterminisme de la formation initiale pour réduire les inégalités professionnelles, malgré les fortes inégalités scolaires dans un système décentralisé.
Le développement de la scolarisation peut également avoir des effets pervers, dans la mesure où les phénomènes collectifs ne constituent pas la somme arithmétique des intérêts individuels (les sociologues parlent de « paradoxe écologique ») : s’il est bon que chaque jeune obtienne le bac à titre individuel pour renforcer son capital humain et ses chances d’insertion sur le marché du travail, il peut se produire une baisse de la valeur relative des diplômes lorsqu’ils se multiplient (à l’instar de l’érosion de la valeur des signes monétaires), tandis que le sort réservé à ceux qui ne l’obtiennent pas peut se dégrader. Le jeu à somme positive de l’investissement scolaire (plus de confiance dans la société et plus de capital humain) peut ainsi se transformer en jeu à somme nulle (les bénéfices glanés par les uns se paient par la détérioration de la situation des autres).
En croisant les données concernant l’intégration et la cohésion, on voit se dessiner quatre ensembles de sociétés (sur le modèle des typologies proches de celles élaborées par Gosta Esping-Andersen et Bruno Amable) : les pays libéraux (Etats-Unis, Royaume-Uni, Canada), qui combinent un marché du travail dynamique, de grandes inégalités sociales et une faible redistribution ; les pays sociaux-démocrates (comme les pays scandinaves ou la Suisse) qui disposent d’un marché du travail dynamique et d’une relative égalité sociale grâce à un puissant État providence, même si les étrangers y sont peu nombreux et relativement plus discriminés qu’ailleurs ; les pays corporatistes du cœur de l’Europe (France, Allemagne, Belgique, Autriche) qui se caractérisent par un marché du travail peu dynamique, un taux de chômage élevé et des inégalités relativement contenues grâce à une forte redistribution et malgré la dualité du marché du travail (importantes protections pour les titulaires d’un emploi stable et forte précarité pour ceux qui n’y accèdent pas). Le dernier ensemble apparaît plus composite que les autres puisqu’il regroupe les pays méditerranéens et certains pays de l’ancien bloc communiste : hormis quelques points communs, comme l’existence d’un État providence plus actif que dans les pays libéraux, le niveau de vie y est inférieur et la part des étrangers dans la population relativement faible (la Hongrie, la Pologne et la Slovaquie étant regroupées par les auteurs dans le sous-ensemble du « capitalisme tardif »).
La cohésion des sociétés se mesure quant à elle à la fois par la confiance (entendue comme un ensemble de croyances et d’attitudes communes) et par la densité de la vie sociale et de la société civile, c’est-à-dire par le capital social, soit l’intensité de la coopération horizontale entre les acteurs (au sens où l’entend Robert Putnam). En France par exemple, le régime républicain (décrit par Rousseau et Durkheim en leur temps) et le recours à l'État central incarnant l’unité morale de la nation ont rendu le capital social et la confiance dans les autres moins nécessaires que dans les pays où la société civile joue un rôle plus important.
Inégalités scolaires, reproduction et hiérarchies sociales
S’agissant des systèmes éducatifs, les comparaisons internationales disponibles se sont développées sur la base des enquêtes PISA (Programme for International Student Assessment) de l’OCDE qui mesurent le niveau moyen et les performances des élèves ainsi que la rentabilité des diplômes au sein de diverses sociétés. Les auteurs croisent également les données des taux de scolarisation avec les inégalités scolaires constatées pour mesurer le niveau d’intégration du système scolaire : plus les écarts de performances entre les élèves sont faibles, plus l’influence de l’origine sociale des élèves sur leurs performances l’est aussi. Inversement, plus les inégalités de performance des élèves sont fortes, plus leur origine sociale détermine ces inégalités : les inégalités scolaires sont donc fortement déterminées par les inégalités sociales situées en amont de l’école.
Pour autant, les comparaisons internationales montrent que les systèmes éducatifs conservent une certaine capacité de réduire ou d’accentuer ces inégalités. Il ne suffit pas d’ouvrir davantage le système scolaire et d’allonger la durée des études pour réduire les inégalités éducatives (il ne suffit pas d’ouvrir l’école pour la rendre plus juste), même si le niveau global des élèves progresse incontestablement avec l’accroissement des taux de scolarisation. Les données PISA sur les expériences scolaires des élèves indiquent également que la confiance dans l’utilité de l’école varie fortement d’un pays à l’autre : certains systèmes scolaires (organisation générale, style éducatif, pratiques pédagogiques) génèrent un niveau élevé de cohésion et de confiance (dans les enseignants, les camarades de classe) alors que d’autres le font nettement moins. Le Japon, l’Allemagne et la France présentent par exemple un bas niveau de cohésion (faible confiance dans l’institution décrite comme un « autre monde »), tandis que les Pays-Bas, le Danemark, le Portugal ou le Royaume-Uni affichent de plus hauts niveaux de cohésion.
D’autre part, si l’on observe une corrélation assez nette entre la part de la richesse nationale consacrée à l’éducation et les performances scolaires (l’accroissement des ressources allouées à l’éducation permet d’élever le taux de scolarisation et le niveau moyen des élèves), l’efficacité de la dépense peut varier fortement : ainsi à niveau de dépense à peu près équivalent, la France enregistre de moins bons résultats que la Finlande ou le Japon. Néanmoins, on n’enregistre pas de corrélation nette entre la part de la richesse nationale consacrée à l’école et le niveau des inégalités scolaires (la Finlande, très égalitaire, consacre environ 6% de son PIB à l’éducation, tout comme la France, nettement plus inégalitaire).
S’agissant des indicateurs de ségrégation sociale et scolaire, ils montrent, sans surprise, que les pays du Nord sont relativement peu ségrégatifs alors que l’Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas le sont nettement plus. Le lien demeure très net entre la ségrégation des publics et les inégalités scolaires, la mixité des établissements étant associée à des écarts plus faibles entre les élèves tandis que les classes de niveau et la sélection précoce sont liées à des inégalités plus fortes. Par contre, il n’existe guère de corrélation entre la ségrégation scolaire et la cohésion : à ce niveau de données agrégées, un contexte de mixité sociale ne semble pas engendrer une expérience scolaire plus positive en ce qui concerne le vécu des élèves (équité et cohésion ne vont pas forcément de pair).
Ecole et société : entre encastrement et autonomie
Les auteurs s’intéressent ensuite à l’hypothèse d’une continuité parfaite entre les sociétés et leurs écoles, par l’examen d’un échantillon de pays comparables. L’étude de cette problématique est associée à un enjeu politique majeur : la détermination de la marge de manœuvre réelle des politiques scolaires et l’espace des choix qui existe entre le fatalisme intégral (la société a l’école qu’elle mérite) et le volontarisme pur (l’école peut transformer la société). On constate par exemple que l’ampleur des inégalités sociales de départ ne détermine pas mécaniquement l’ampleur des inégalités scolaires, pas plus d’ailleurs qu’une école égalitaire n’est en mesure de réduire systématiquement les inégalités sociales. On observe néanmoins une forte continuité culturelle entre la cohésion sociale et la cohésion scolaire : les valeurs, les attitudes et les styles culturels propres à une société pèsent fortement sur son système scolaire, parfois davantage que les mécanismes d’intégration économique et sociale (comme le dynamisme du marché du travail). La faible corrélation entre les inégalités sociales et les inégalités scolaires, ainsi qu’entre l’ampleur des inégalités scolaires et celle des inégalités de revenus à l’échelle internationale, démontre que l’école n’est pas seule à produire les mécanismes de différenciation sociale et la stratification. Il convient à cet égard de souligner que chaque société détermine le destin social des moins qualifiés et pallie plus ou moins le déficit de formation initiale par des parcours de formation tout au long de la vie (comme les travaux de Louis Chauvel l’ont également démontré).
Les systèmes scolaires ont un impact plus ou moins fort sur la cohésion des sociétés en fonction de l’histoire économique et sociale ainsi que des traditions et de la culture considérées : une conclusion forte de cette étude est donc que les sociétés et leur école ne sont pas dans une situation de parfaite interaction, les inégalités, la pauvreté ou l’état du marché du travail ayant tout autant d’impact sur la cohésion sociale globale. En France, l'État a historiquement construit l’école sur un modèle universaliste tendu vers l’élitisme républicain et le rejet de l’éducation proprement dite dans la sphère privée (d’où une certaine mise à l’écart des parents), de telle manière que l’on observe une homologie forte entre l’école et la société nationale : dans ce type de pays, l’emprise des diplômes (sur l’emploi et les salaires) explique le poids considérable des inégalités scolaires dans la formation des hiérarchies sociales. Les titres scolaires ont une forte emprise sur le système social et expliquent le niveau élevé de reproduction, ainsi que l’intensité de la compétition scolaire que se livrent les familles (établissements, filières, etc.), au contraire d’autres pays où ces hiérarchies dépendent de mécanismes et de processus qui échappent largement à l’école (comme dans le cadre du modèle anglo-saxon). La valorisation excessive de la justice méritocratique et la légitimation des inégalités scolaires risque d’enfermer les sociétés démocratiques dans un piège, puisque ce type d’argument favorise une emprise scolaire toujours plus forte et une concurrence exacerbée qui élimine les moins bien dotés et renforce la reproduction sociale. En outre, l’emprise scolaire peut miner la cohésion sociale et la confiance si elle se traduit par un verrouillage de l’accès aux emplois et statuts valorisés (ainsi l’Espagne, la France et le Japon se caractérisent par une forte emprise des diplômes et une faible cohésion, à l’inverse du Danemark ou de l’Angleterre).
Par ailleurs, la confiance dans l’institution est atteinte lorsque les élèves estiment que leur destin social dépend avant tout de la réussite de leur parcours scolaire (tout semble se jouer à l’école) : dans ces conditions, l’échec scolaire et la frustration sont d’autant plus douloureusement ressentis qu’ils préfigurent une forte probabilité d’échec social, rendu légitime par l’emprise de l’école sur la société et la puissance du discours méritocratique. Dans des sociétés individualistes et atomisées où la compétition pour obtenir les meilleures places s’intensifie, l’école est ainsi investie de la mission redoutable de réaliser l’égalité des chances, de maintenir la cohésion sociale et d’ancrer les valeurs de la participation démocratique : l’observation des relations entre les systèmes sociaux et les sous-systèmes scolaires dans le monde conduit à conclure à une certaine divergence des deux, hormis pour les pays scandinaves. S’il ne faut pas négliger l’impact en amont des inégalités sociales sur les inégalités scolaires, la reproduction se construit au moins autant après l’école, en fonction de l’emprise des titres scolaires sur la structure sociale. En définitive, « on peut donc militer pour une école plus compréhensive et plus accueillante sans penser pour autant que cette école là changera le visage de la société. A l’opposé, il n’y a pas à attendre que la société devienne meilleure pour améliorer l’école. Il est possible de lire dans ce constat la fin d’un certain prophétisme scolaire, mais on peut aussi y percevoir de bonnes raisons d’espérer dans l’éducation elle-même ».
Les auteurs
- François Dubet est professeur à l’université de Bordeaux 2 et à l’EHESS. Dernier ouvrage paru : Les places et les chances (Seuil/La république des idées, 2010).
- Marie Duru-Bellat est professeur à Sciences Po et chercheur à l’Observatoire sociologique du changement. Dernier ouvrage paru : Le Mérite contre la justice (Presses de Sciences Po, 2009).
- Antoine Vérétout est ingénieur d’études au LAPSAC-université de Bordeaux 2. Ses travaux portent sur les questions de travail et d’emploi.
Quatrième de couverture
Une vision commune voudrait que l’éducation scolaire contribue à créer des sociétés meilleures. Mais comment l’école aurait-elle la capacité quasi miraculeuse de transformer la société ? Plutôt que de croire ou non à ses vertus, les sociologues François Dubet, Marie Duru-Bellat et Antoine Vérétout ont cherché à comprendre, en comparant les sociétés et les systèmes éducatifs d’une trentaine de pays, par quels mécanismes et sous quelles conditions l’école affecte positivement la société. Ni le déterminisme fataliste de la simple reproduction sociale, ni le volontarisme héroïque d’une école capable de changer le monde ne résistent aux faits. Comment les sociétés utilisent-elles les qualifications scolaires ? Quelle est l’emprise du diplôme sur l’emploi et sur la position sociale ? C’est de ce choix politique que dépend le rôle de l’école dans la société. Quand un pays considère que le diplôme doit déterminer strictement la position sociale, la lutte pour son obtention pèse lourdement sur le système scolaire, au détriment de sa dimension éducative et culturelle. Trop d’école tue l’école. A l’opposé, quand un pays croit moins à l’école, il développe d’autres systèmes d’accès à l’emploi, le jeu scolaire y est plus détendu, mais la société crée d’autres inégalités. C’est dans le jeu de ces deux mécanismes que se tiennent les différences entre les sociétés et c’est en agissant sur cette charnière que les politiques peuvent corriger les inégalités.