Note d'Information DEPP n° 22.17 (juin 2022)
Note du Collectif Maths&Sciences (octobre 2022)
Une enquête de la DEPP conduite auprès d’élèves du secondaire a souligné le manque de confiance en elles des filles et cela indépendamment de leurs résultats, surtout en mathématiques. Parallèlement, le nombre de filles faisant des sciences en terminale ou, plus particulièrement, beaucoup de mathématiques, a énormément baissé depuis la réforme du lycée.
Mots-clés : égalité filles-garçons, confiance en soi, spécialités de première, mathématiques
À l’occasion des évaluations nationales exhaustives de rentrée en 2021 (en français et en mathématiques), des enquêtes ont été menées auprès des élèves de sixième, de seconde générale et technologique, de seconde professionnelle et de CAP pour savoir combien de temps ils passaient à travailler, s’ils pensaient avoir réussi ces évaluations, s’ils étaient confiants pour l’année scolaire à venir et quels étaient leur projet d’orientation (pour les élèves de seconde générale et technologique) ou leur projet post-diplôme (pour les élèves de CAP et de bac professionnel).
La part des élèves qui travaille plus d’une demi-heure par jour à la maison est la plus importante pour les élèves de seconde générale et technologique, aussi bien pendant la semaine que pendant le week-end (respectivement 67,1 % et 78,4 %). Ce sont les filles qui déclarent travailler le plus, quelles que soient les filières. Cependant, ce sont les filles qui ont le moins confiance en elles. Lorsqu’on leur demande si elles pensent avoir réussi le test de français ou de mathématiques, elles répondent moins souvent favorablement que les garçons. Cela est valable à tout niveau et pour toutes les matières (voir tableau ci-dessous), même lorsqu’on considère les élèves ayant le niveau de maîtrise le plus élevé.
Sentiment de réussite aux évaluations (en %)
Le sentiment d’efficacité est plus faible pour les filles, sans être un indicateur fiable de la réussite aux évaluations. En sixième, les filles pensent moins avoir réussi le test de français (-3,7 points par rapport aux garçons) et de mathématiques (-13,6 points) alors que ce sont les filles qui ont les meilleurs résultats en français (+5 points par rapport aux garçons) et que l’écart des résultats en mathématiques est bien moins important (-3 points). En seconde générale et technologique l’écart en mathématiques est important : +17,5 points d’écarts pour les garçons, alors que les résultats donnent +8,3 points en faveur des garçons. L’écart le plus notable concerne l’évaluation en mathématiques en CAP : +18,8 points d’écarts pour les garçons alors que les résultats sont très similaires.
Le manque de confiance des filles ne se voit pas que dans leur appréciation de leur réussite aux tests mais aussi dans leur réponse à la question : « pensez-vous être prêt(e) pour réussir votre année ? ». Indépendamment de la filière, ce sont les garçons les plus confiants, le plus grand écart est en seconde générale et technologique, 12,1 points, c’est aussi la filière où la confiance globale des élèves est la plus faible.
L’orientation et l’éventuelle poursuite d’études dépend aussi du sexe des élèves. En filière professionnelle (seconde professionnelle et CAP), ce sont davantage les filles qui envisagent une poursuite d’étude après le diplôme, plutôt qu’une entrée immédiate dans la vie professionnelle. Parmi les élèves de seconde générale et technologique, ce sont les filles qui sont plus nombreuses à vouloir poursuivre en filière générale (86,4 % contre 81,5% des garçons). Dans les deux cas, c’est parmi les élèves qui maîtrisent le mieux le français et les mathématiques que le pourcentage de ceux voulant aller en première générale est le plus élevé. Le choix de la filière technologique diffère selon le sexe de l’élève : la filière ST2S (sciences et technologies de la santé et du social) attire plus les filles (24,4 points de plus que les garçons), la filière STI2D (sciences et technologies de l'industrie et du développement durable) attire plus les garçons (38,6 points de plus que pour les filles). L’écart est plus faible pour la filière STMG (6,7 points de plus pour les filles).
Parmi les élèves qui envisagent d’aller en première générale, le choix de spécialité diffère beaucoup selon les élèves. Par exemple, 35,5 % des filles déclarent vouloir suivre l’enseignement de LLCER (langues, littératures et cultures étrangères et régionales) contre 15 % de garçons, et 49,2 % des filles veulent choisir la spécialité mathématiques contre 67,9 % des garçons. Ce choix des mathématiques varie selon la maîtrise des élèves : cela concerne 53,8 % des filles avec une maîtrise élevée contre 71,4 % des garçons et 37,9 % des filles avec une maîtrise insuffisante contre 46,2 % des garçons.
Ces volontés affichées des élèves sont en adéquation avec les effectifs dans les spécialités scientifiques (et surtout dans la spécialité mathématiques) qui ont évolué depuis la réforme du lycée. On peut comparer le nombre d’élèves en terminale S en 2019 (avant la réforme) et ceux suivant deux spécialités scientifiques en 2021 (après la réforme). Les spécialités scientifiques étant mathématiques, physique-chimie, sciences de la vie et de la terre (SVT), numérique et sciences informatiques et sciences de l’ingénieur.
Le nombre d’élèves a légèrement baissé en terminale (-3%). Le nombre d’élèves à profil scientifique a quant à lui beaucoup diminué : une baisse de 28 points pour les filles (on passe de 94 522 filles à 67 890) et 20 points pour les garçons. Si l’on considère le nombre d’élèves faisant plus de six heures de mathématiques par semaine (terminale S ou spécialité mathématiques), on remarque une baisse de 61 points pour les filles et 37 pour les garçons. Si l’on regarde le nombre d’élèves suivants plus de huit heures de mathématiques par semaine (terminale S en spécialité mathématiques avec 2019 et spécialité mathématiques avec option mathématiques expertes en 2021), il y a presque autant de garçons (-1 point) mais beaucoup moins de filles (-39 points).
On peut également illustrer ce point en regardant les variations des proportions de filles faisant des mathématiques. 56 % des élèves de terminale sont des filles (en 2019 et 2021). En 2019, 47,5 % des élèves faisant au moins 6 heures de mathématiques sont des filles, en 2021, ce sont 35,7 % des élèves (baisse de 11,8 points). Parmi les élèves faisant plus de huit heures de mathématiques, 37,7 % sont des filles en 2019 contre 29,4 % en 2021 (-8,3 points).
Ces baisses significatives peuvent être expliquées par la liberté du choix de spécialités et le manque de confiance en eux des élèves. Le caractère facultatif de l’option maths expertes décourage davantage les filles, et aggrave les menaces de stéréotypes. L’abandon de la spécialité mathématiques en terminale peut également être lié au fait que les profils féminins sont davantage attirés par la biologie et la santé : abandonner la spécialité mathématiques au profit des mathématiques complémentaires (option facultative de trois heures par semaine) est la seule possibilité pour continuer à faire des mathématiques, de la physique-chimie et des SVT en terminale.
Les filles sont ainsi moins confiantes mais plus travailleuses que les garçons. Elles sont plus susceptibles de poursuivre des études (également dans la filière générale et technologique). Cependant elles sont moins susceptibles de choisir des parcours généraux et technologiques à forte dominante scientifique, en particulier en ce qui concerne les mathématiques.