Diane, 31 ans, a grandi « à la lisière d’un quartier difficile » dans un logement qu’elle décrit comme insalubre, dans une banlieue d’Amiens. Sans salle de bains, avec les toilettes à l’extérieur, elle y vit seule avec son père, ouvrier-électricien intérimaire dans le bâtiment, et sa mère, diplômée d’une maîtrise de droit et agent de la Poste de catégorie C (« elle a totalement dévalorisé son diplôme »). Ses parents déménageront à ses 14 ans, dans une maison où elle obtiendra enfin sa propre chambre mais qui n’est toujours pas équipée de salle de bains. Diane ne jouira de sa première salle de bains avec douche qu’un an après son baccalauréat lorsqu’elle s’installe à Paris pour ses études, ce qu’elle vivra comme l’accession à un luxe immense. [...]
Diane dédaignant les projets que son père avait pour elle, celui-ci va aller jusqu’à refuser de signer le dossier de candidature de sa fille à l’entrée à Sciences Po Paris sur mention Très Bien. Ne pouvant entrer à Sciences Po, elle s’inscrit donc en classe préparatoire littéraire à Amiens, le temps d’être majeure et de décider elle-même de son orientation. Elle use de cette liberté nouvelle dès l’année suivante en rejoignant le lycée Henri-IV pour son année de khâgne et elle commence ainsi une longue carrière d’étudiante parisienne. [...]
Après son admission à l’ENA, sa mère lui demande si elle est sûre de pouvoir trouver un travail à la sortie de sa « formation ». Diane a ainsi du mal à trouver sa place entre les études et sa famille.
Source : Jules Naudet, Entrer dans l’élite. Parcours de réussite en France, aux États-Unis et en Inde, PUF, 2012.
Questions :
1/ Pourquoi peut-on dire que Diane a connu une mobilité intergénérationnelle ?
2/ Quelles conséquences cette mobilité a-t-elle eu sur sa mobilité géographique ?
3/ Quel a été le principal moteur de sa mobilité sociale ?
4/ La mère de Diane a-t-elle connu un déclassement ?
Voir la correction
Réponses :
1/ Les parents de Diane sont ouvriers et employée. Elle fait des études à l’ENA pour intégrer la haute fonction publique (elle « entre dans l’élite » pour reprendre le titre de l’ouvrage de Jules Naudet). On perçoit dans le texte le fait que cette mobilité sociale correspond aussi à un changement de mode de vie et de statut social (exemple de la salle de bains).
2/ Pour poursuivre ses études, elle s’est rendue d’abord à Amiens (elle habitait dans la banlieue de cette ville), puis à Paris.
3/ Sa mobilité sociale est permise par l’école. Elle atteint un statut social favorisé grâce à sa réussite scolaire.
4/ Malgré un niveau d’études élevé, elle occupe une profession peu qualifiée. On ne connaît pas son origine sociale, donc il est difficile de parler d’un déclassement intergénérationnel, mais elle subit une forme de déclassement relatif : elle aurait pu accéder à une position plus favorisée.