Document 9 : L’enjeu des corona et euro bonds dans la zone euro

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Après avoir émis l’hypothèse de recourir aux eurobonds au sein de la zone euro en raison des effets de la crise des années 2007-2008, voici qu’apparaît l’idée des coronabonds (ou recovery bonds) du fait de la pandémie qui touche l’Union européenne (UE) depuis plusieurs semaines. […] Les eurobonds permettent aux pays européens de la zone euro de financer leur déficit. Ces titres sont libellés en euros. Au lieu d’une garantie nationale qui caractérise une obligation nationale, les eurobonds bénéficient de la garantie européenne. Il s'agit d'emprunts émis en commun par les pays de la zone euro sur les marchés internationaux. Ce dispositif est particulièrement utile pour les pays très endettés (tableau 1) dont on sait qu’ils vont l’être encore davantage d’ici l’année prochaine.

Bien que le niveau de la dette publique des pays de la zone euro suivait une tendance baissière avant la crise, le niveau atteint par certains pays reste inquiétant et c’est en raison de cette inquiétude que les bons élèves ne veulent pas entendre parler d’une mutualisation des dettes.

La mutualisation des dettes consiste à opter pour un financement commun des dettes publiques et marquerait une étape capitale dans les structures de gouvernance de l’eurozone vers le fédéralisme. Il ne s’agit pas pour un pays de la zone euro de rembourser la dette contractée par un autre pays. Seule, la faillite d’un pays membre de la zone obligerait les autres pays à se substituer à cette défaillance et c’est pour cela que des pays comme l’Allemagne, l’Autriche ou les Pays-Bas ont de sérieux doutes. S’il y avait une garantie que l’émission de titres en commun évite tout défaut de paiement, les points de vue se rapprocheraient probablement. Mais cette garantie n’est pas totale. Il convient toutefois de préciser qu’en l’absence d’une mutualisation des dettes, un défaut de paiement de l’un des pays membres reste toujours possible.

Un coronabond aurait sur certains points les mêmes caractéristiques qu’un eurobond et aurait pour objectif de financer les dépenses dues aux conséquences macroéconomiques du coronavirus. Il s’agirait d’une mesure temporaire, tout comme la mutualisation des dettes d’ailleurs, et en aucun cas, les titres émis ne seraient destinés à financer les déficits publics nationaux contractés par ailleurs. Il aurait comme atout pour les pays très endettés de pouvoir emprunter à un taux plus faible car la BCE offre davantage de garanties tandis que les pays faiblement endettés subiraient un coût car ce même taux d’intérêt serait supérieur à celui obtenu en empruntant sur une base domestique.

Laurent Baechler, Arnaud Leconte, Jean-Claude Vérez, « L‘enjeu des corona et euro bonds dans la zone euro », CIFE Note de recherche n°103, 15 mai 2020.

Questions :

27) Qu’est-ce qu’un eurobond ? Qu’est-ce qui distingue un eurobond d’un coronabond ?

28) Quel est l’intérêt de des corona et euro bonds ?

29) D’après le tableau, quels pays ont davantage intérêt à l’adoption du système de coronabonds ?

30) Quel pourrait-être le risque lié à la mutualisation des dettes ?

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27) Qu’est-ce qu’un eurobond ? Qu’est-ce qui distingue un eurobond d’un coronabond ?

 

Les eurobonds – ou euros obligations – sont un système d’emprunt commun entre les 19 pays de la zone euro. Les obligations sont alors émises au niveau européen avec un taux d’intérêt unique qui est une moyenne de ceux auxquels les différents pays membres se financent. Il s’agit donc d’un mécanisme de mutualisation des dettes au sein de l’union économique et monétaire. Les coronabonds sont des eurobonds voués à exister temporairement, dans le but de financer la sortie de la crise liée à la pandémie de Covid-19.

28) Quel est l’intérêt de des corona et euro bonds ?

Les corona et eurobonds permettent de mutualiser les dettes. Les pays empruntent alors à un taux d’intérêt commun, moyenne des différents taux d’intérêt souverains des pays membres. Ainsi, les pays fortement endettés et davantage fragilisés vont jouir de taux d’intérêt plus faibles que le taux d’intérêt dont ils auraient bénéficié en l’absence de mutualisation des dettes. Le système d’eurobonds permet alors de réduire les écarts entre les pays membres et d’homogénéiser les perspectives de sortie de crise.

29) D’après le tableau, quels pays ont davantage intérêt à l’adoption du système de coronabonds ?

Ce sont les pays les plus endettés qui ont davantage intérêt à la mutualisation des dettes en bénéficiant d’un taux d’intérêt commun. Pour la Grèce, l’endettement public sera de l’ordre de 195 % du PIB d’ici 2021 et de près de 150% pour l’Italie selon les prévisions d’Eurostat. A l’inverse, l’endettement public de l’Allemagne ne devrait pas excéder les 70% du PIB. L’Allemagne a donc moins intérêt à la mise en place des coronabonds que la Grèce et l’Italie car elle emprunterait à un taux supérieur à son taux d’intérêt souverain.

30) Quel pourrait-être le risque lié à la mutualisation des dettes ?

Le risque de la mutualisation des dettes est celui du risque d’aléa moral : les pays les moins vertueux en termes d’endettement public auraient intérêt à laisser filer leurs déficits car ils bénéficient de taux d’intérêt plus faibles qu’en l’absence de mutualisation des dettes, grâce aux efforts des pays les moins endettés. Cependant, tous les pays ont intérêt à réduire leur dette ce qui relativise le risque d’aléa moral.

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