C’est sur les conseils de ses professeurs du lycée que Mathieu, fils d’ouvrier, a suivi une classe préparatoire aux grandes écoles (CPGE) et intégré HEC(1). Ce sont aussi des enseignants de lycée qui ont guidé Laura (Essec(1)), fille d’un ouvrier et d’une employée immigrés portugais, vers la CPGE. Ces élèves ne possèdent pas véritablement au départ d’informations sur l’orientation, leur famille ayant une faible connaissance du système scolaire. Ils profitent, en revanche, la plupart du temps, de circonstances et de rencontres avec des acteurs extérieurs à la famille pour s’informer et confirmer leurs orientations. La figure de l’enseignant comme aiguilleur scolaire est récurrente et patente. Si les conseils d’orientation peuvent être ponctuels pour certains, ils jalonnent, pour d’autres, l’ensemble de la scolarité. Erwan (qui fait Polytechnique(1)) déclare avoir eu des professeurs décisifs dans ses choix d’orientation tout au long de son parcours scolaire : à l’école primaire, une institutrice l’oriente vers un collège doté d’une classe européenne ; au collège, un professeur lui déconseille de prendre une option technologique tandis qu’un autre l’encourage notamment à s’inscrire dans un lycée renommé ; au lycée, il apprendra l’existence des CPGE ; enfin en CPGE, un enseignant lui donnera des conseils stratégiques pour augmenter ses chances d’atteindre l’X (école polytechnique).
Les orientations successives engagent inexorablement en fermant et en ouvrant des portes. Les enseignants éclairent le chemin vers la riuscita, la « bonne issue ». S’ils forment et informent, d’autres acteurs guident ces élèves de milieux populaires dans les carrefours de l’orientation scolaire. Par exemple, Stéphanie, normalienne(2), fille d’employés non diplômés, bénéficiera de l’intervention dans son orientation du père de sa meilleure amie : « Il m’a déjà fait part de l’existence des classes préparatoires, qu’évidement je ne connaissais pas, et que je n’aurais, sans doute pas, connues sans lui (…), il m’a dit qu’il fallait que j’aille à Henri IV. » […] Ces élèves, en se saisissant des informations absentes de leur cercle familial, maintiennent voire renforcent leur excellence au fil des épreuves scolaires.
(1)Grandes écoles de commerce ou d’ingénieur.
(2)Diplômée de l’Ecole Normale Supérieure, école qui propose une formation en 4 ans de haut niveau, dans des domaines variés : lettres et langues, arts et design, sciences humaines et sociales, droit, économie et management, sciences et technologies, sport.
Source : « Parcours de réussite en milieu populaire », Castets-Fontaine Benjamin, Sciences Humaines, Octobre 2011.
Questions :
1) A l’aide du texte, complétez le tableau ci-dessous :
2) D’après les statistiques étudiées dans ce chapitre, pourquoi peut-on qualifier les parcours de ces jeunes de trajectoires improbables ?
3) Comment l’auteur explique-t-il ces trajectoires ?