Fin 2020, le taux de chômage en France (hors Mayotte) s’est établi à 8,0 %. Soit quasiment son niveau d’avant-crise un an auparavant, lequel était le plus bas depuis fin 2008. Le marché du travail a été fortement affecté par la crise sanitaire. Au cours de l’année 2020, le taux de chômage a nettement baissé au deuxième trimestre (7,1 %) avant de rebondir au troisième (9,1 %) pour finalement s’établir à 8,0 % au quatrième trimestre, légèrement au-dessous de son niveau d’avant crise (8,1 % au quatrième trimestre 2019). Au total, le taux de chômage atteint en moyenne 8,0 % en 2020, soit 0,4 point de moins qu’en 2019. Mais cette baisse sur l’année est pour partie « en trompe-l’œil ».
Le premier confinement, qui a fortement limité les démarches de recherche d’emploi et réduit la disponibilité pour travailler, s’est traduit par un recul du chômage en trompe-l’œil. En raison des restrictions d’activité, de nombreuses personnes sans emploi ont en effet basculé vers l’inactivité, notamment faute de pouvoir réaliser des recherches actives d’emploi dans les conditions habituelles. Or l’inactivité, même contrainte du fait des restrictions sanitaires, ce n’est pas du chômage.
Ainsi, le taux de chômage a reculé de 2,7 points en mars 2020 et de 2,6 points en avril 2020, par rapport aux mêmes mois de 2019 (voir graphique ci-dessus). Avec la levée du premier confinement, le taux de chômage a rebondi, avant de repasser au dernier trimestre en deçà de son niveau de 2019 en partie, pour les mêmes raisons qu’au printemps. En excluant les deux périodes de confinement de 2020 (de mi-mars à mi-mai puis de fin octobre à mi-décembre) et les périodes équivalentes de 2019, le taux de chômage est quasi stable entre 2019 et 2020 (8,5 % après 8,4 %).
On peut considérer que la définition du chômage selon le BIT comporte des critères trop restrictifs. Il est vrai, par exemple, que quand un répondant de l’enquête Emploi sans emploi prend trois semaines de congés, il n’est plus disponible et bascule de la catégorie du chômage vers celle du halo autour du chômage. Il est aussi vrai que le caractère restrictif de ces critères a été renforcé par le contexte de crise : de nombreuses personnes n’ont pas pu effectuer d’actes positifs de recherche d’emploi non pas de leur fait mais parce que les confinements et les restrictions d’activité les en empêchaient.
En contrepartie de cette baisse, le halo autour du chômage augmente en 2020. Sur l’année, il concerne en moyenne 4,6 % des personnes âgées de 15 à 64 ans, soit + 0,8 point sur un an. Cette proportion est la plus élevée depuis le début de la série en 2003. La hausse a notamment été très marquée au deuxième trimestre 2020 (+ 2,2 points sur un an). Pendant le premier confinement, une part importante de personnes qui auraient été considérées comme chômeurs au sens du BIT sont de fait dans le halo autour du chômage.
Au total, en cumulant chômage et halo autour du chômage, 4,2 millions de personnes sont sans emploi et souhaitent travailler en moyenne sur l’année en 2020, soit 10,3 % des 15-64 ans. Cette proportion augmente de 0,4 point en moyenne sur un an, après un recul de même ampleur en 2019. La part des personnes sans emploi et souhaitant travailler augmente pour les 15-24 ans (+ 0,9 point) et les 25-49 ans (+ 0,5 point), mais elle est stable pour les 50-64 ans (− 0,1 point).
De plus, en moyenne sur l’année 2020, 6,2 % des personnes en emploi déclarent avoir été tout ou partie de la semaine en situation de chômage partiel ou technique. Ce recours inédit a été permis grâce à un renforcement du dispositif d’activité partielle visant à limiter le recul de l’emploi. Le chômage partiel ou technique a très fortement augmenté au début du premier confinement, atteignant jusqu’à un quart de l’emploi total en avril 2020. Il a reflué à l’été, avant de croître à nouveau pendant le deuxième confinement, mais avec une ampleur bien moindre. Alors que pendant le premier confinement, le chômage partiel ou technique a concerné, dans des proportions variables, l’ensemble des secteurs, lors du deuxième confinement, il a été très concentré dans les secteurs les plus touchés par les restrictions sanitaires. Si le recul de l’emploi est contenu grâce au chômage partiel ou technique, le volume d’heures travaillées par emploi recule fortement. En effet, une part plus importante que d’habitude de personnes en emploi n’ont pas ou peu travaillé pendant les périodes de confinement.
Sources : d’après Wladimir Passeron, « Pourquoi le chômage n’a-t-il pas augmenté avec la crise en 2020 ? », blog Insee, 18 mai 2021 ; Yves Jauneau et Joëlle Vidalenc, « Une photographie du marché du travail en 2020 », Insee première, 18 mars 2021.
Questions :
1) Les confinements ont-ils engendré une hausse du chômage ? Pourquoi ?
2) Le marché du travail s’est-il pour autant amélioré ? Expliquez.
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1) Les confinements ont-ils engendré une hausse du chômage ? Pourquoi ?
Les confinements de l’année 2020 ont créé des chocs négatifs sur l’économie française, réduisant ainsi l’activité des entreprises. Une hausse du chômage pouvait donc être légitimement anticipée. Cependant, ce n’est pas ce qu’il s’est passé. Cela peut être expliqué par la définition même du chômage retenue par l’Insee pour évaluer le nombre de chômeurs. Durant les confinements, le critère de « recherche active » d’emploi n’a pu être satisfait par de nombreux demandeurs d’emplois qui étaient de fait empêchés dans leurs démarches. Ils étaient alors considérés comme inactifs, et non comme chômeurs, ce qui a participé à baisser le taux de chômage. De plus, avec le développement du dispositif de chômage partiel, de nombreux salariés ont conservé leur emploi grâce à l’intervention des pouvoirs publics alors que sans celle-ci, leur employeur aurait été contraint à les licencier. Ils ont donc continué à être considéré comme en emploi et n’ont pas grossi le contingent de chômeurs dans les statistiques.
2) Le marché du travail s’est-il pour autant amélioré ? Expliquez.
La situation sur le marché du travail ne s’est pour autant pas améliorée en 2020 malgré la baisse du taux de chômage. Le halo autour du chômage est devenu plus important. La part des personnes sans emploi et souhaitant travailler, mais ne remplissant pas tous les critères du BIT (en termes de recherche active d’emploi surtout), a augmenté. De plus, le volume d’heures travaillées par emploi a baissé notablement en 2020 en raison des confinements, ce qui n’est pas signe de bonne santé du marché du travail. Grâce au dispositif de chômage partiel, des personnes ont conservé leur emploi mais ont moins travaillé que durant les périodes normales.