Document 6 : Un exemple : l’abrogation de la loi de Glass Steagall

Facile

Le 13 mai 1996, les principaux banquiers américains sont reçus quatre-vingt dix minutes à la Maison Blanche par le président Bill Clinton, le Secrétaire du Trésor (équivalent Ministre des Finances en France) Robert Rubin (ex directeur de Goldman Sachs), l'adjoint chargé des affaires monétaires John Hawke, le trésorier du Parti démocrate, Marvin Rosen, et le directeur de la régulation des banques Eugene Ludwig. D'après le porte parole de ce dernier, « les banquiers discutèrent de la législation à venir, y compris des idées qui permettraient de briser la barrière séparant les banques des autres institutions financières ». Pour Burt Haig, directeur du mensuel Financial Work, en facilitant le déclenchement de la crise des subprimes en 2007, ce café de travail « pourrait avoir coûté quelques milliers de milliards de dollars à l'économie mondiale, favorisé l'envol de la dette des États et provoqué la perte de dizaines de millions d'emplois ».

Au total, 103 cafés de travail ont lieu à la Maison Blanche. Le porte parole du président fait valoir que ces cafés de travail devaient « permettre aux membres des agences de réglementation de mieux connaitre les questions de l'industrie en cause ».

Au cours de l’année 1996, le Secrétaire du Trésor (équivalent du ministre des Finances en France) dépose une série de demandes de modification législative visant à l'abrogation de la loi Glass Steagall.

L'abrogation définitive intervient en 1999, sous la présidence Clinton : le congrès est majoritairement républicain, mais de nombreux démocrates votent en faveur de l'abrogation. Elle permet aux banques d'utiliser les dépôts des clients pour investir sur les marchés. Elle permet la fusion de Citicorp et Travelers Group pour former Citigroup.

Joseph Stiglitz : La fin de la Glass Steagall Act : journal American financial review n° 56 de 2001

Question

11) Pourquoi la fin de la spécialisation bancaire aux Etat-Unis et interprétations de J. Stiglitz ?

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11) L’abrogation de la loi avait pour objectif d’inciter les banques à plus de compétitivité afin de faire baisser les taux d’intérêt. Elle a aussi pour but d’accroître la taille des banques américaines concurrencées par les groupes financiers. Pour J. Stiglitz, l'abrogation de cette loi a été une des causes de la fragilisation du système bancaire américain, et a changé la culture de prudence des banques de dépôt vers la culture du risque des banques d'affaires.  Il considère qu'il s'agit d'une erreur mais il estime toutefois que cette décision n'est pas la cause de la crise financière, qui trouve son origine dans la faillite de la banque Lehman Brothers. Dans son livre Quand le capitalisme perd la tête, il affirme qu’il est nécessaire de revenir sur la loi de 1993, même s’il est impossible de la faire renaître de manière identique car le système financier du 21e siècle est fort différent de celui qui existait dans les années 1930. Cela dit, pour ce prix Nobel, la notion de séparation des métiers de banquier est fondée. Par exemple, il ne faut pas que les institutions de dépôt fassent de la spéculation. C'est pourquoi il est important que les gouvernements fassent quelque chose en ce sens.  Aux Etats-Unis, la crise financière de 2008 remet sur le devant de la scène la question de la pertinence d’une séparation des fonctions bancaires. P. Volcker avance l’idée d’un retour à la loi Glass-Steagall par le biais d’une remise en vigueur du texte originel (Banking Act de 1933). Le Dodd-Frank Reform de 2010 est partiellement inspiré de cette proposition.

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