Dans un système de banque unique
Supposons, pour simplifier, que le système bancaire soit composé d’une seule banque, et qu’il n’existe donc pas de problèmes de conversion d’une monnaie dans une autre. Cette hypothèse sera levée au paragraphe suivant. Prenons le cas d’une entreprise qui emprunte auprès de sa banque. Le mécanisme de la création monétaire se réalise par un accroissement simultané de l’actif et du passif de l’établissement bancaire concerné, illustré par le schéma ci-après :
La monnaie créée se concrétise par une inscription au compte (DAV, pour dépôts à vue) du client emprunteur qui figure au passif du bilan bancaire ; la contrepartie est inscrite à l’actif à un poste créance sur le client. Le remboursement du crédit aboutira, de façon symétrique, à une destruction de monnaie en diminuant à la fois l’actif et le passif du bilan bancaire. La masse monétaire — constituée essentiellement par la monnaie scripturale — s’accroît lorsque les flux de remboursements sont inférieurs aux flux des crédits nouveaux, de la même manière que le niveau d’une piscine s’élève lorsque le flux d’écoulement est inférieur au flux de remplissage.
Tous les crédits ne donnent pas nécessairement lieu à de la création monétaire : c’est le cas d’un crédit « interentreprises », pour lequel le financement s’opère par prélèvement sur ressources existantes. De même en est-il de certains établissements qui ouvrent des comptes à leurs clients — les services financiers de La Poste par exemple — mais ne peuvent financer ceux-ci qu’en drainant une épargne préexistante. Les banques commerciales collectent également de l’épargne ; la part des crédits financés sur épargne ne participe pas, par définition, à la création de monnaie.
Dominique Plihon, La monnaie et ses mécanismes, Repères, La Découverte, 2017
Questions :
1) Pourquoi les dépôts à vue (DAV) figurent-ils au passif de la banque ?
2) Pourquoi le terme « crédit » figure-t-il à l’actif du bilan de la banque ?
3) Pourquoi dit-on usuellement que « les crédits font les dépôts » ?
4) Décrivez le bilan de l’entreprise.
5) Que se passe-t-il lorsque le crédit est remboursé ?
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1) Pourquoi les dépôts à vue (DAV) figurent-ils au passif de la banque ?
Le passif d’un bilan regroupe tout ce que doit un agent économique. Les DAV figurent au passif parce que cet argent a été déposé par un ANF et que cela revient à ce qu’il l’ait prêté à la banque. Elle le lui doit.
2) Pourquoi le terme « crédit » figure-t-il à l’actif du bilan de la banque ?
Cela signifie que la banque possède une créance sur l’entreprise, c’est-à-dire une sorte de promesse de revenus futurs… C’est donc bien un élément de patrimoine.
3) Pourquoi dit-on usuellement que « les crédits font les dépôts » ?
Si l’on observe attentivement le bilan de la banque une fois qu’elle a accordé le crédit à l’entreprise, on voit que c’est l’octroi du crédit qui a créé de fait le dépôt à vue et non l’inverse. Si les dépôts faisaient les crédits, on observerait que le crédit octroyé aurait pour contrepartie l’épargne d’autres agents. Or, ce n’est pas le cas. La banque a créé cette monnaie « ex nihilo » c’est-à-dire à partir de rien.
4) Décrivez le bilan de l’entreprise.
Au passif figure ce qu’elle doit, à savoir son engagement à rembourser (« dette »). A l’actif, la somme empruntée car elle en dispose (« avoir à la banque »).
5) Que se passe-t-il lorsque le crédit est remboursé ?
La monnaie correspondante est détruite. A mesure que l’ANF rembourse le prêt accordé, la monnaie est détruite : chaque mensualité destinée à rembourser le crédit est composée d’intérêts (destinés à rémunérer la banque pour le risque pris) et du remboursement partiel (puisqu’il intervient sur une période plus ou moins longue) du capital emprunté. Ce remboursement correspond de fait à une destruction de monnaie puisqu’il diminue la somme due par l’ANF.
A l’échelle globale, il y a donc incessamment dans l’économie des créations et des destructions de monnaie. Pour que la quantité de monnaie en circulation augmente, il faut que les montants de crédits bancaires accordés par les banques dépassent les remboursements réalisés sur la période. Les flux de création monétaire doivent excéder les flux de destruction de monnaie.