Nous avons appris qu’un monopole, contrairement à une firme concurrentielle, fixe un prix au-dessus de son coût marginal. Du point de vue des consommateurs, ce prix élevé rend le monopole non désirable. Cependant, de son côté, le monopole réalise un profit lorsqu’il fixe un prix élevé. Du point du propriétaire de la firme, ce prix élevé rend le monopole très désirable. Est-il possible que les avantages retirés par les propriétaires des firmes dépassent les coûts subis par les consommateurs, de sorte que le monopole soit désirable du point de vue de la société dans son ensemble ?
Nous pouvons répondre à cette question en utilisant l’analyse du bien-être et nous utilisons le surplus total comme mesure du bien-être économique. Rappelons que le surplus total est la somme du surplus du consommateur et du surplus du producteur. Le surplus des consommateurs représente leur volonté de payer pour un bien moins le prix qu’ils paient effectivement pour ce bien. Le surplus des producteurs représente le montant que ces derniers perçoivent pour un bien moins le coût de production du bien. Dans ce cas, il y a un seul producteur, le monopole.
Nous avons établi que l’équilibre de l’offre et de la demande sur un marché concurrentiel n’est pas seulement un résultat naturel, mais également un résultat désirable. En particulier, la main invisible du marché est à l’origine d’une allocation des ressources qui maximise le surplus total, dans le sens où il est le plus grand possible. Comme un monopole conduit à une allocation des ressources différente de celle d’un marché concurrentiel, le résultat doit d’une certaine manière aller à l’encontre de la maximisation du bien-être économique total. C’est ce que nous allons démontrer.
Source : D’après Gregory N. Mankiw, Mark P. Taylors, 2018, Principes de l’économie, Traduction de la 3ème édition anglaise par Elise Tosi, De Boeck supérieur
Etape 1 : Déterminer le niveau de production efficace
A partir d’une représentation graphique du marché monopolistique, nous souhaitons déterminer le niveau de production efficace.
On suppose un marché monopolistique de fourniture de l’eau. Sur la figure 1 ci-dessous, la courbe de demande d’eau (courbe bleue) reflète la valeur que les consommateurs accordent à ce service, elle est mesurée par les volontés à payer des consommateurs pour le service vendu. La courbe de coût marginal (courbe rouge) reflète quant à elle les coûts de production de la fourniture de l’eau du monopole pour chaque unité supplémentaire produite.
Figure 1 : Le niveau de production efficace
Question :
Compléter le texte à trous ci-dessous en observant la figure 1 à l’aide des mots suivants : inférieure, supérieure, égale, faible, grande et des données du graphique.
Pour la quantité produite Q1 de (1) ……. décilitres, la valeur accordée au service de fourniture de l’eau par les consommateurs est de (2)……...€ alors que le coût marginal de production est (3)…………..€, la valeur accordée par les acheteurs est donc (4)………. au coût marginal de production. Le producteur a donc intérêt à augmenter les quantités produites, car chaque unité supplémentaire permettrait d’augmenter son profit. Il retire un gain supplémentaire lorsqu’il augmente sa production. Une production plus (5)……… conduirait donc à l’augmentation des gains à l’échange.
Pour la quantité Q2 de (6)……., c’est-à-dire à l’intersection de la courbe de demande et de coût marginal, la valeur accordée au bien par les consommateurs est de (7)………. €, celle-ci est (8)……….. au coût marginal de production, les gains à l’échange sont mutuellement avantageux. Le producteur et les consommateurs ont maximisé leur surplus respectifs.
Pour la quantité produite Q3 de (9) ……. décilitres, la valeur accordée au service par les consommateurs est de (10)……...€ alors que le coût marginal de production est (11)…………..€, la valeur accordée par les acheteurs est donc (12)………. au coût marginal de production. Le producteur n’aurait aucun intérêt à vendre une partie de sa production à perte. Une partie des échanges réalisés ne seraient donc pas rationnels. Une production plus (13)……… conduirait donc à maximiser les gains des consommateurs et du producteurs, c’est à dire à l’augmentation du surplus total.
Etape 2 : Déterminer le niveau de prix optimal
Le niveau de prix optimal correspond au niveau de prix qui donnerait aux consommateurs un signal précis relatif au coût de production du bien ou service vendu, les incitant à acheter la quantité efficace. Nous souhaitons déterminer le niveau de prix optimal.
Figure 2 : Le niveau de prix optimal
Questions :
1) Identifiez sur le graphique le niveau de prix optimal et reportez cette information sur l’axe des ordonnées.
2) Représentez sur le graphique en bleu l’aire correspondant au surplus du consommateur et d’autre part en rouge l’aire correspondant au surplus du producteur. En déduire l’aire que représente le surplus total pour ce niveau de quantité et de prix optimal.
Etape 3 : Montrer la sous-optimalité économique du monopole
Le monopole est faiseur de prix, il a un pouvoir de marché lui permettant de choisir le prix de vente de son produit ainsi que la quantité à produire. Nous souhaitons montrer l’impact du pouvoir de marché du monopole sur le prix de vente et la quantité produite sur ce marché.
Figure 3 : L’inefficacité du monopole relativement à la situation concurrentielle
Comme le prix fixé par le monopole est égal à sa recette moyenne, la courbe de demande est aussi la courbe de recette moyenne. Ces deux courbes démarrent toujours au même point sur l’axe des ordonnées car la recette marginale de la première unité vendue est égale au prix du bien.
Questions :
Question 1 : Le monopole choisit de produire et de vendre la quantité de service de fourniture d’eau déterminée par l’intersection des courbes de recette marginale et de coût marginal. Or la situation socialement optimale correspond à la quantité déterminée par l’intersection des courbes de demande et de coût marginal. Comparer les deux niveaux de quantité produite en vous appuyant sur des données chiffrées. Montrer l’effet produit par le choix du monopole sur la quantité produite sur ce marché.
Question 2 : Nous pouvons également analyser l’inefficacité du monopole sous l’angle du prix. Le prix de monopole est différent du prix optimal en vous appuyant sur des données chiffrées. Comparer les deux niveaux de prix. Montrer l’effet produit par le choix du monopole sur le prix de vente sur ce marché.
Question 3 : Que peut-on en conclure ?
Etape 4 : Montrer la perte de bien-être engendrée par le monopole
Pour montrer que le monopole est une structure de marché sous-optimale pour la société, nous pouvons évaluer les effets d’un monopole faiseur de prix sur le bien-être (mesuré en termes de surplus économiques) de la société.
On observe une évolution du surplus total et de sa répartition entre consommateurs et producteurs. La figure 4 montre l’apparition d’une perte sèche.
Figure 4 : L’inefficacité du monopole relativement à la situation concurrentielle : l’apparition d’une perte sèche
Questions :
1. Expliquer ce que représente cette perte sèche.
2. Montrer que la répartition du surplus total entre producteur et consommateur a évolué
Voir la correction
Etape 1
Question : Compléter le texte à trous ci-dessous en observant la figure 1 à l’aide des mots suivants : inférieure, supérieure, égale, faible, grande et des données du graphique.
Pour la quantité produite Q1 de (1) ……. décilitres, la valeur accordée au service de fourniture de l’eau par les consommateurs est de (2)……...€ alors que le coût marginal de production est (3)…………..€, la valeur accordée par les acheteurs est donc (4)………. au coût marginal de production. Le producteur a donc intérêt à augmenter les quantités produites, car chaque unité supplémentaire permettrait d’augmenter son profit. Il retire un gain supplémentaire lorsqu’il augmente sa production. Une production plus (5)……… conduirait donc à l’augmentation des gains à l’échange.
Réponse : dans l’ordre des trous : 50 décilitres, 80€, 35€, supérieure, grande
Pour la quantité Q2 de (6)……., c’est-à-dire à l’intersection de la courbe de demande et de coût marginal, la valeur accordée au bien par les consommateurs est de (7)………. €, celle-ci est (8)……….. au coût marginal de production, les gains à l’échange sont mutuellement avantageux. Le producteur et les consommateurs ont maximisé leur surplus respectifs.
Réponse : dans l’ordre des trous : 80 décilitres, 60€, égale.
Pour la quantité produite Q3 de (9) ……. décilitres, la valeur accordée au service par les consommateurs est de (10)……...€ alors que le coût marginal de production est (11)…………..€, la valeur accordée par les acheteurs est donc (12)………. au coût marginal de production. Le producteur n’aurait aucun intérêt à vendre une partie de sa production à perte. Une partie des échanges réalisés ne seraient donc pas rationnels. Une production plus (13)……… conduirait donc à maximiser les gains des consommateurs et du producteurs, c’est à dire à l’augmentation du surplus total.
Réponse : dans l’ordre des trous : 110 décilitres, 35€, 80€, inférieure, faible
Etape 2
1) Identifiez sur le graphique le niveau de prix optimal et reportez cette information sur l’axe des ordonnées.
Réponse : La quantité et le prix optimaux se trouve à l’intersection des deux courbes. Pour une quantité produite optimale de 80 décilitres, le prix optimal est de 60€ le décilitre.
2) Représentez sur le graphique en bleu l’aire correspondant au surplus du consommateur et d’autre part en rouge l’aire correspondant au surplus du producteur. En déduire l’aire que représente le surplus total pour ce niveau de quantité et de prix optimal.
Réponse : Pour une quantité optimale de 80 décilitres produites et vendues et un prix optimal de 60€ le décilitre, le surplus total comprend le surplus des consommateurs et celui du producteur, soit l’aire totale bleue et rouge.
Etape 3
Question 1 : Le monopole choisit de produire et de vendre la quantité de service de fourniture d’eau déterminée par l’intersection des courbes de recette marginale et de coût marginal. Or la situation socialement optimale correspond à la quantité déterminée par l’intersection des courbes de demande et de coût marginal. Comparer les deux niveaux de quantité produite en vous appuyant sur des données chiffrées. Montrer l’effet produit par le choix du monopole sur la quantité produite sur ce marché.
Réponse : La quantité optimale serait de 80 décilitres d’eau vendue. Or le monopole va choisir de produire la quantité de 50 décilitres d’eau. Le monopole produit donc moins (30 décilitres de moins) qu’en situation concurrentielle.
Question 2 : Nous pouvons également analyser l’inefficacité du monopole sous l’angle du prix. Le prix de monopole est différent du prix optimal en vous appuyant sur des données chiffrées. Comparer les deux niveaux de prix. Montrer l’effet produit par le choix du monopole sur le prix de vente sur ce marché.
Réponse : Le prix optimal serait de 60€ le décilitre d’eau vendue. Or le monopole va choisir de fixer son prix à 80€ le décilitre d’eau. Le monopole vend donc le décilitre d’eau plus cher ( 20€ de plus le décilitre d’eau vendue) que la situation concurrentielle économiquement plus optimale.
Question 3 : Que peut-on en conclure ?
Réponse : Le monopole est une organisation du marché inefficace car le prix de vente est supérieur au prix optimal et la quantité offerte est inférieure à la quantité efficace. On peut citer la phrase de Jacques Généreux « Le monopole produirait moins de richesse et les fait payer plus cher à la collectivité ». Le monopole est donc sous-optimal économiquement par rapport à la situation de concurrence, les consommateurs étant les premiers pénalisés par le pouvoir de marché du monopole.
Etape 4
1. Expliquer ce que représente cette perte sèche.
Réponse : La perte sèche résulte de la quantité vendue inférieure à celle de l’optimum social.
On étudie ce qu’il se passe entre la quantité de monopole et la quantité optimale : Quand le monopole fixe un prix au-dessus du coût marginal (courbe rouge), certains consommateurs valorisent le service vendu (courbe bleue) au-dessus de son coût marginal (courbe rouge), mais en dessous de son prix. Ces consommateurs n’achètent donc finalement pas le service vendu. Comme la valeur que ces consommateurs accordent à ce service est malgré tout supérieure au coût marginal, cette situation est inefficace. C’est pourquoi, on parle de perte sèche, c’est une partie de surplus qui est perdu pour toute la collectivité (elle représente le « coût social » du monopole). Cette notion renvoie à la perte d’efficience économique de l’équilibre du monopole relativement à l’équilibre de la concurrence parfaite.
2. Montrer que la répartition du surplus total entre producteur et consommateur a évolué.
Réponse : Le pouvoir de marché du monopole lui permet d’augmenter son propre bien-être (surplus du monopole) au détriment de celui des consommateurs (surplus des consommateurs). La surface jaune illustre le gain de surplus du producteur qu’ont perdu les consommateurs du fait du niveau de prix supérieur à celui du prix optimal. On parle de « rente du monopole » pour cette partie du surplus du consommateur réalisé en situation de concurrence qui est capté par le producteur en situation de monopole.