La seule question qui [préoccupe l’employeur] (…) est de savoir quelle quantité de travail il achètera demain sur le marché. [Dans la théorie néoclassique qui postule une situation de concurrence pure et parfaite1, l’employeur est contraint] d’accepter les conditions du marché. (..) [D’un côté, le] taux de salaire est une donnée du marché qui s’impose [à l’employeur]. [D’un autre côté] (..), les rendements du travail sont décroissants, comme les disent les économistes, la productivité marginale du travail est décroissante. Ce qui signifie que lorsque l’on ajoute progressivement des heures de travail à un équipement donné, il arrive un moment où l’augmentation de la production résultant d’une heure de travail devient plus faible que celle obtenue en ajoutant l’heure précédente. (…) Dès lors, passé un certain seuil, lorsque le nombre d’heures de travail augmente (lorsque le collectif de travail s’agrandit), il se glisse un peu de désorganisation dans le processus de production, qui fait que le travail perd de son efficacité. La production continue certes à augmenter, mais de moins en moins vite à mesure que l’on ajoute des heures de travail. Ce que l’on résume en disant que la productivité marginale (le supplément de production apporté par une heure de travail supplémentaire) décroît.
Sous cette hypothèse, la décision d’embauche devient un problème extrêmement simple à résoudre. [L’employeur], qui cherche à réaliser un profit maximum, embauchera… tant que la productivité marginale reste supérieure au salaire horaire ayant cours sur le marché. Comme la productivité marginale décroît à mesure qu’il augmente l’embauche, il arrive forcément un moment où une embauche supplémentaire ne lui ferait plus gagner d’argent, le produit de cette dernière heure embauchée ne compensant plus le salaire déboursé. Quel que soit le niveau de salaire, [l’employeur] clôt sa liste d’embauche au moment où la productivité marginale est égale (ou encore très légèrement supérieure) au salaire. (…) La demande de travail est donc décroissante par rapport au niveau de salaire.
Source : Laurent Cordonnier, Pas de pitié pour les gueux. Sur les théories économiques du chômage, 2000, Le Seuil, 6ème édition
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Note 1 : Le marché du travail est supposé en concurrence pure et parfaite. Sur ce marché, les hypothèses d’atomicité, d’homogénéité, de transparence, de libre entrée/sortie et de mobilité du facteur travail sont supposées respectées.
Questions :
1. De quel type d’agent économique émane la demande de travail ?
2. Selon cette approche microéconomique, comment évolue la demande de travail lorsque le prix augmente ?
3. Comment expliquer cette relation ?
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Questions :
1. De quel type d’agent économique émane la demande de travail ?
Réponse : La demande de travail correspond à la quantité de travail (nombre d’heures de travail) achetée par les employeurs.
2. Selon cette approche microéconomique, comment évolue la demande de travail lorsque le prix augmente ?
Réponse : Selon l’approche micro-économique de base du modèle néoclassique, la demande du travail baisse quand le taux de salaire réel augmente. Le taux de salaire réel correspond au salaire horaire corrigé de l’inflation. Il représente pour l’employeur le coût du travail.
3. Comment expliquer cette relation ?
Lorsque le taux de salaire réel augmente, le coût de travail augmente, sa demande de travail diminue. L’employeur compare le coût du travail à ce que rapporte le salarié nouvellement embauché. En langage économique, il compare le taux de salaire réel du dernier salarié embauché à sa productivité marginale. Plus le taux de salaire réel augmente moins il est incité à embaucher. En effet, la différence coût marginal et productivité marginal se réduisant, le profit que rapportent les salariés décroît au fur et mesure que leur nombre augmente. (Loi des rendements factoriels décroissants, la productivité marginale est supposée décroissante).