Malgré la demande insistante des présidents des principales institutions -Conseil, Commission et Parlement européens- appelant tous trois les gouvernements à ouvrir en 2020 les négociations d'adhésion avec l'Albanie et la Macédoine du Nord, la France y a mis son veto, mardi, à l'occasion de la réunion des ministres des Affaires européennes à Luxembourg.
Le gouvernement français est resté très isolé puisqu'il est le seul des Vingt-huit pays membres à avoir refusé de lancer les discussions avec Skopje sur les 35 chapitres de négociations qui marquent pour un pays candidat à l'adhésion l'adoption de l'acquis communautaire. En ce qui concerne l'Albanie, la France a été rejointe par trois de ses partenaires , les Pays-Bas, le Danemark et l'Espagne.
[…] Côté français, on estime qu'en dépit de ces efforts, ni les pays candidats, ni l'Union européenne ne sont prêts à un nouvel élargissement. En juin dernier, lorsque les ministres européens, saisis de la même question, avaient pour la deuxième fois refusé de donner leur feu vert, la France avait insisté pour préciser, dans le communiqué, que l'admission de nouveaux membres devait tenir compte de « la capacité du bloc à les intégrer ». Ce qui n'avait pas empêché la Commission européenne de programmer un nouveau tour de table après les élections européennes. Le sujet de l'élargissement avait pris à l'époque un tour très politique, l'opposition en France reprochant au président de la République Emmanuel Macron de ne dissimuler que provisoirement, le temps du scrutin, ses intentions d'accueillir des pays des Balkans dans l'Union.
[…] Le chef de l'Etat n'a semble-t-il pas changé d'avis depuis. Mardi, la secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, Amélie de Montchalin a refusé de démarrer les négociations d'adhésion tant que les Européens n'auront pas réaménagé les règles qui président aux négociations d'adhésion. « Le processus est trop bureaucratique et trop juridique », indique une source française et il ne permet à aucun moment un retour en arrière si les circonstances l'exigent. La question devrait être débattue jeudi ou vendredi au sommet européen.
Les dérives constatées envers les standards démocratiques chez les plus « jeunes » des Etats membres entrés en 2004 et 2007, Pologne, Hongrie, et Roumanie d'un côté, une opinion publique française peu enthousiaste vis-à-vis de nouveaux élargissements de l'autre, expliquent l'attitude du gouvernement français. Plus fondamentalement, il y a chez le président français Emmanuel Macron la conviction que les nouveaux pays membres ne partagent pas la vision européenne des pays fondateurs. « Si l'on veut une Europe plus intégrée, avec davantage d'harmonisation fiscale et sociale, cela ne peut pas se faire avec une Europe qui s'élargit sans cesse » ajoute une source proche de l'Elysée.
Catherine Chatignoux, « Paris bloque l'adhésion de la Macédoine du nord et de l'Albanie », Lesechos.fr, publié le 15 oct. 2019 à 6:30.
Questions :
9) Pourquoi la France a-t-elle voté contre l’adhésion de l’Albanie et de la Macédoine du Nord lors du sommet européen d’octobre 2019 ?
10) En quoi l’approfondissement politique semble-t-il un préalable à l’élargissement géographique ?
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9) Pourquoi la France a-t-elle voté contre l’adhésion de l’Albanie et de la Macédoine du Nord lors du sommet européen d’octobre 2019 ?
. Emmanuel Macron s’est opposé à l’adhésion de l’Albanie et de la Macédoine du Nord en affirmant qu’il est nécessaire de renforcer le processus d’intégration européen avant d’élargir l’Union européenne.
10) En quoi l’approfondissement politique semble-t-il un préalable à l’élargissement géographique ?
A l’instar du président français, on peut considérer que l’approfondissement de l’UE est nécessaire à son élargissement dans la mesure ou l’intégration de nouveaux membres accroit l’hétérogénéité économique et politique au sein de l’union. Les différences économiques, sociales et politiques peuvent ainsi freiner la cohésion de l’UE. Un fonctionnement solide des institutions européennes apparait alors être un préalable à l’introduction d’économies hétérogènes. Cela signifie davantage de pouvoir aux institutions européennes, davantage de politiques communes avec une harmonisation des moyens et des objectifs à l’échelle européenne. Par ailleurs, l’exemple du Brexit a révélé les failles du processus d’adhésion qui devrait alors être réformé, notamment pour inclure les modalités de sortie de l’UE.