« Au XIXe siècle, une controverse célèbre sur m’émission de monnaie scripturale a lieu en Angleterre. On parle à cette époque de la Currency School (école de la parité ou école de la circulation), qui est le principe selon lequel les billets émis par la Banque centrale doivent être la stricte contrepartie de ses réserves en or. La couverture billet-or doit être totale et la quantité de billets en circulation ne doit s’accroître que lorsque la quantité d’or augmente sous l’effet d’une balance commerciale excédentaire ou de la hausse du taux de change. A partir des années 1810-1814 à la suite de la publication du Bullion report sur les causes de l’inflation, une controverse s’est développée à propos de l’émission de monnaie dans le cadre du régime de l’étalon-or. Par simplification, on regroupe les différents protagonistes en deux écoles : la Currency School représentée par D. Ricardo et Lord Overstone et la Banking School (école des banquiers) par T. Tooke et J. Fullarton, les premiers anti-dichotomistes. Le principe de ce dernier énonce que la quantité de monnaie en circulation doit avant tout dépendre des besoins des agents économiques et défend donc un certain laxisme monétaire ; la masse monétaire doit être adaptée aux besoins des affaires, l'importance de l'or et de l'argent est donc ici minimisée ».
M. De Mourgues La monnaie : systèmes financiers et théories monétaires (Economica 1993) p 32
Questions :
5 ) Que révèle cette opposition théorique et politique en Angleterre au début du XIXe siècle ?
6 ) Quelle courant s’imposa à l’époque ?
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5) L'émission trop importante de billets de banque en réduit la valeur (relativement aux autres biens), et provoque de l'inflation. Pour Ricardo, l'inflation dérive en grande partie de l'émission trop importante de billets de banque. Cette constatation de base se retrouve dans toutes théories de la monnaie, mais elles divergent sur la référence en fonction de laquelle on détermine la quantité acceptable de monnaie. Pour les tenants de la currency school, la référence c'est la monnaie métallique, et plus spécifiquement l'or puisque c'est le métal monétaire au Royaume-Uni à l'époque de cette controverse. Donc la Banque d'Angleterre devrait ne mettre en circulation des billets de banque qu'à hauteur de la quantité de métal précieux qu'elle détient. Ainsi la stabilité de la valeur des billets sera garantie conformément au standard d'étalon or.
La controverse naît de la pratique de la banque d'Angleterre, qui suspend la convertibilité en or de ses billets entre 1797 et 1819, et augmente son émission en se basant sur d'autre biens que l'or, en application de la doctrine des effets réels. La Currency school s'oppose à la Banking school, qui argumente que la valeur des devises peut être naturellement régulée par le désir des déposants en banque de convertir leur monnaie fiduciaire en or. Un des éléments de la controverse est (déjà) l'idée que la croissance économique, en augmentant la quantité de biens, provoque une raréfaction relative de l'or (de la monnaie) qui en augmente indûment le prix (déflation), ce qui freinerait la croissance.
6 ) les partisans de la Currency School obtiennent gain de cause avec le Bank Charter Act de 1844 (loi bancaire de R. Peel) : la Banque d’Angleterre est divisée en deux départements : celui de la banque et celui de l’émission, le premier ne pouvant recevoir de billets du second qu’en échange d’un montant égal en or. La réglementation s’est réalisée en trois étapes, 1826, 1833 et 1844. En pratique cependant, des suspensions auront lieu à plusieurs reprises (1847, 1866). Mais l’école des banquiers l’emporte en France à la même époque et elle s’éloigne de la théorie quantitative de la monnaie.