En 1975, on s’en souvient, la France comptait 8,2 millions d’ouvriers. Depuis le début des années 1980, cependant, le nombre de ces actifs ne cesse de diminuer de 50 000 par an, de sorte qu’au recensement de 1999, le pays en rassemble encore 5,9 millions en emploi auxquels s’ajoute 1,1 million de chômeurs qui ont exercé un métier d’ouvrier . Ils constituent par conséquent un quart de la population active. Cette baisse a concerné en priorité les ouvriers non qualifiés de l’industrie passés dans l’intervalle de 2,5 à 1,1 million. [...] De fait, les ouvriers ou ouvrières du cuir, de la confection, des mines, de la sidérurgie, des chaînes de l’automobile se sont considérablement raréfiés pendant cette période, quand ils n’ont pas totalement disparu. Ce déclin traduit à la fois une transformation de l’organisation du travail (parfois baptisée troisième révolution industrielle), mais aussi une évolution de la division internationale du travail. Une partie croissante des tâches a en effet été mécanisée, voire automatisée dans l’industrie, entraînant la suppression d’un certain nombre de postes de travail. Cette « désouvriérisation » de l’industrie s’est accompagnée d’une modification de la division internationale du travail depuis trente ans : alors que les pays occidentaux monopolisaient pour l’essentiel les activités industrielles jusqu’à la fin des années 1950, un nombre croissant de concurrents est apparu à la faveur d’une part de l’industrialisation accélérée du continent asiatique, d’autre part de la libéralisation des échanges commerciaux à l’échelle européenne et mondiale. […] Les baisses des effectifs dans l’industrie automobile témoignent clairement d’une telle évolution : en 1978, par exemple, la Régie Renault, alors entreprise publique, embauchait 74 700 ouvriers en France, soit 69 % de son personnel ; en 2009, Renault n’en conserve plus que 12 800, soit un peu moins de 35 % !
Source : Xavier Vigna, Histoire des ouvriers en France au XXe siècle, Éditions Perrin, « Pour l'histoire », 2012
Questions :
1/ Que signifie la « désouvriérisation » de l’industrie ?
2/ Quelle en est la conséquence pour les individus dont les parents sont ouvriers ?
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Réponses :
1/ Cette expression de « désouvriérisation » utilisée par Xavier Vigna renvoie au fait que l’industrie emploie de moins en moins d’ouvriers en proportion et en nombre absolu.
2/ Les individus dont les parents sont ouvriers en viennent alors à connaître plus fréquemment une mobilité sociale que l’on peut qualifier de structurelle. C’est renforcé par le fait que la possibilité d’être embauché dans l’entreprise où travaille l’un de ses parents en tant qu’ouvrier diminue, ce qui était pourtant un mode de transmission de l’emploi ouvrier assez important.