Avant même que ce glissement de la courbe de Phillips ait été constaté dans les faits, M. Friedman (1968) et E. Phelps (1967) avaient prédit, sur la base d'arguments théoriques, qu'il n'y avait pas d'arbitrage possible à long terme. Ils sont arrivés à cette conclusion en mettant en évidence le rôle des anticipations. En cas de hausse de salaire, les salariés pensent d'abord qu'ils bénéficient d'une hausse de pouvoir d'achat et augmentent leur consommation. Ils se rendent rapidement compte que les prix ont augmenté et qu'ils ont été victimes d'une illusion monétaire et ils calibrent leur dépense sur leur revenu réel permanent. L'effet de la dépense sur l'activité économique a été aussi éphémère que l'illusion monétaire elle-même. Mais si les gouvernements persistent à promouvoir une inflation élevée, ils ajustent leurs anticipations d'inflation à la hausse et réclament des augmentations de salaire en conséquence. Alors que l'inflation avait réduit le coût réel du travail et stimulé l'embauche, l'anticipation de l'inflation accroît les revendications sociales et oblige les entrepreneurs à maintenir les salaires réels. A partir de ce moment, l'inflation augmente en permanence et l'effet sur l'activité et le chômage disparaît rapidement.
SES Melchior : la courbe de Phillips pour E. Phelps et M. Friedman
Question 18 : elle est la traduction de la courbe de Phillips pour les monétaristes ? Quel lien avec l’interprétation de l’inflation ?
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Question 18 : traduite graphiquement, cette différence entre le court et le long terme signifie que si la courbe de Phillips présente une pente négative à court terme, elle devient verticale à moyen-long terme. On retrouve là un grand enseignement monétariste. L'inflation et le chômage ont des déterminants totalement différents : l'inflation est un phénomène monétaire ; à l'inverse, le chômage résulte de déterminants réels, comme par exemple le niveau des salaires réels, l'efficacité du processus de recherche sur le marché du travail, l'inadéquation qualitative entre l'offre et la demande de travail, etc. Sur le long terme, une expansion monétaire ne modifie en rien ces déterminants réels. L'interprétation de Phelps et de Friedman fait de la courbe de Phillips un phénomène essentiellement transitoire lié à une situation de déséquilibre, elle-même liée à une erreur d'anticipation. L'élément fort de cette approche, c'est la réinterprétation de la notion d'anticipation. Ainsi, Phelps et Friedman estiment qu'il serait plus judicieux d'introduire le taux d'inflation anticipé (plutôt que le taux d'inflation observé) dans l'équation des salaires. Cela va permettre de refonder la relation de Phillips (on parle désormais de « courbe de Phillips augmentée des anticipations »).