La banque centrale émet deux types de monnaies : les billets pour lesquels elle a un monopole, et de la monnaie scripturale qui circule essentiellement entre les intermédiaires financiers. Tous les établissements de crédit, ainsi que le Trésor public dont la banque centrale gère les disponibilités, ont obligation de détenir un compte courant à la banque centrale qui leur permet de régler entre eux leurs dettes. C’est par l’intermédiaire de ce compte que s’effectuent les opérations de « compensation » entre banques […].
De plus, la banque centrale gère les réserves de change du pays : les banques s’adressent à elle pour acheter ou vendre des devises étrangères lorsqu’elles ne peuvent équilibrer ces opérations entre elles sur le marché des changes.
Ce rôle de « banque des banques » donne à sa monnaie — la monnaie centrale — une importance capitale dans la réalisation de l’unité du système monétaire. La banque centrale a une fonction de « bouclage » de la liquidité du système monétaire : elle alimente ce dernier en liquidité et utilise cette fonction pour influencer le processus de création monétaire d’après ses objectifs de politique monétaire […]. En cas de difficultés, lorsqu’il y a un risque grave d’insuffisance de liquidité dans le système de paiement — par exemple, à la suite de la défaillance d’un établissement —, la banque centrale peut intervenir pour éviter une crise : on qualifie cette fonction de prêteur en dernier ressort.
Au total, les comptes courants banque centrale par lesquels circule la monnaie centrale permettent :
—le règlement des opérations de compensation des banques ;
—la conversion de la monnaie scripturale bancaire en billets ;
—enfin, la communication avec l’ensemble des monnaies étrangères grâce aux comptes que les institutions internationales ou étrangères détiennent à la banque centrale.
La monnaie centrale a ainsi une suprématie sur les autres formes de monnaies auxquelles elle est hiérarchiquement supérieure, ce qui en fait un instrument de la politique monétaire. En effet, c’est en agissant sur la quantité de monnaie centrale en circulation, principalement par le canal des interventions sur le marché monétaire, que les banques centrales cherchent à réguler la création monétaire et les taux d’intérêt.
Plihon, La monnaie et ses mécanismes, Repères, La Découverte, 2017
Questions :
1) Pourquoi dit-on que la banque centrale est la « banque des banques » ?
2) Pourquoi les comptes que les banques de second rang détiennent à la banque centrale sont-ils si importants ?
3) Qu’est-ce que la « monnaie banque centrale » ou « monnaie centrale » ?
4) Par quelle institution bancaire la monnaie banque centrale est-elle émise ?
5) Quelle forme peut prendre la « monnaie banque centrale » ?
6) Pourquoi cette monnaie banque centrale est-elle si importante ?
7) Quelle fonction remplit la banque centrale en cas de crise de liquidité ?
8) Pourquoi peut-on dire que le système bancaire est un système à double niveau ?
9) Quelles sont les deux premières limites au « super-pouvoir » de création monétaire des banques commerciales ?
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1) Pourquoi dit-on que la banque centrale est la « banque des banques » ?
La banque centrale est la banque des banques parce que chaque banque commerciale (et le Trésor public) doit obligatoirement disposer d’un compte à la banque centrale, de la même manière que les agents non financiers (ANF) disposent d’un compte dans lesdites banques. On dit aussi que la banque centrale est la banque de premier rang et les banques commerciales, les banques de second rang.
2) Pourquoi les comptes que les banques de second rang détiennent à la banque centrale sont-ils si importants ?
C’est grâce à ces comptes que les banques commerciales réalisent leurs opérations de compensation et se refinancent. En effet, elles ont obligation d’équilibrer leur bilan chaque jour et cela est possible grâce à ce compte en particulier.
3) Qu’est-ce que la « monnaie banque centrale » ou « monnaie centrale » ?
C’est la monnaie qui permet aux banques commerciales (et au trésor) de régler les dettes que ces établissements peuvent avoir les uns vis-à-vis des autres. C’est une monnaie supérieure à celle créée par les banques de second rang.
4) Par quelle institution bancaire la monnaie banque centrale est-elle émise ?
Par la banque centrale
5) Quelle forme peut prendre la « monnaie banque centrale » ?
- billets et pièces en circulation (c’est la seule monnaie banque centrale à laquelle les ANF ont accès)
- monnaie scripturale (écritures sur les comptes détenus par les banques commerciales (et le Trésor) à la banque centrale)
6) Pourquoi cette monnaie banque centrale est-elle si importante ?
Elle permet à la banque centrale
- de remplir sa fonction de « bouclage » du système monétaire, c’est-à-dire les règlements entre les circuits bancaires différents ;
- d’atteindre ses objectifs en termes de quantité de monnaie en circulation et de mettre en œuvre la politique monétaire.
7) Quelle fonction remplit la banque centrale en cas de crise de liquidité ?
Elle remplit la fonction de prêteur en dernier ressort
8) Pourquoi peut-on dire que le système bancaire est un système à double niveau ?
- au premier niveau il y a les relations entre les banques commerciales et les ANF (dans l’exemple ci-dessus, les entreprises E et R et les banques B et C) ;
- au second niveau, il y a les relations entre la banque centrale et les banques commerciales (appelées aussi banques de second rang à juste titre).
La monnaie scripturale qui circule sur les comptes que les ANF détiennent chez les banques commerciales n’est pas la même monnaie scripturale que celle qui circule sur les comptes que ces mêmes banques commerciales ont à la banque centrale. Dans ce dernier cas, c’est de la « monnaie banque centrale » qui circule. C’est cette monnaie qui permet le refinancement des banques de second rang et elle n’est créée que par la banque centrale.
9) Quelles sont les deux premières limites au « super-pouvoir » de création monétaire des banques commerciales ?
Premièrement, on voit ici que le « super-pouvoir » des banques commerciales de créer de la monnaie est limité par la concurrence qu’elles se font entre elles. Plus cette concurrence est forte, plus les crédits accordés à leurs clients ont de fortes chances de fuir hors de leur propre circuit bancaire vers les comptes de clients des autres banques, ce qui nécessitera plus d’opérations de refinancement et réduit les profits tirés de cette activité.
Deuxièmement, les demandes des ANF en billets (monnaie fiduciaire) dont le monopole d’émission est détenu par la banque centrale viennent également limiter le pouvoir de création monétaire des banques commerciales.
Ainsi, toute banque qui crée « trop » de monnaie s’expose à un risque d’illiquidité, c’est-à-dire à un manque de monnaie centrale. Et dès que la banque doit se procurer de la monnaie centrale, cela est coûteux pour elle et limite son profit. Elle est donc moins incitée à créer de la monnaie en monétisant des créances sur les ANF.
Entre la banque centrale et les banques de second rang (ou banques commerciales), c’est donc la monnaie créée par la banque centrale qui circule, monnaie dite banque centrale. Ainsi les banques commerciales n’ont-elles pas le pouvoir de créer la monnaie qui leur permettrait d’éteindre leurs dettes auprès des autres banques commerciales et auprès de la banque centrale. Cela limite fortement leur « super-pouvoir » !