« Rappelons brièvement en quoi consistent les transformations qui traversent le monde du travail depuis une trentaine d’années. En premier lieu, le mouvement de fond le plus visible et le plus massif est celui qui voit se développer une précarité de l’emploi, à travers un ensemble de phénomènes liés entre eux et que l’on peut décrire à trois niveaux :
au niveau des contrats de travail, on assiste à une forte croissance des emplois à durée déterminée (cdd, intérim, contrats aidés…), c’est-à-dire à la normalisation d’une insécurité structurelle de l’emploi
au niveau des temps de travail, on observe la fréquence accrue du travail à temps partiel (en particulier du temps partiel contraint) et des temps de travail flexibles, discontinus, décalés
enfin, les restructurations fréquentes et la recherche d’un allègement du coût du travail […] entraînent une « déstabilisation des stables (R. Castel) » qui généralise l’insécurité de l’emploi même pour les salariés exerçant en contrat à durée indéterminée.
Ces processus contribuent à fragiliser le modèle salarial construit sur la norme de l’emploi stable et à plein temps : aujourd’hui, l’emploi n’est plus garant d’un ensemble d’assurances et de protections dans l’avenir à moyen et à long terme. La précarisation fait renaître des incertitudes et des vulnérabilités là où la société salariale avait apporté stabilité et sécurité. »
Valentine Hélardot, « Précarisation du travail et de l'emploi : quelles résonances dans la construction des expériences sociales ? », Empan, vol. no60, no. 4, 2005.
Questions :
1) Quelle transformation majeure du marché du travail est-elle ici mise en évidence ?
2) Pourquoi ces emplois précaires sont-ils désignés comme « atypiques » dans le texte ?
3) Quelles sont les grandes caractéristiques de la précarisation de l’emploi ?
4) Caractérisez la montée de la précarité de l’emploi en vous appuyant sur le graphique.
5) Quels sont les risques du phénomène de précarisation de l’emploi ?
Voir la correction
1) Quelle transformation majeure du marché du travail est-elle ici mise en évidence ?
Il s’agit du phénomène de précarisation de l’emploi, c'est-à-dire du développement des emplois précaires.
2) Pourquoi ces emplois précaires sont-ils désignés comme « atypiques » dans le texte ?
Ces emplois précaires - ou formes particulières d’emploi - regroupent les statuts d'emploi qui ne sont pas des contrats à durée indéterminée. Ce sont l'intérim, les contrats à durée déterminée (CDD), l'apprentissage et les contrats aidés. En ce sens, ils dérogent à la norme typique du contrat à durée indéterminée (CDI).
3) Quelles sont les grandes caractéristiques de la précarisation de l’emploi ?
L’auteure souligne trois caractéristiques de la précarisation de l’emploi : d’abord l’augmentation de la part d’emplois à durée déterminée ; ensuite le développement du temps partiel subi ou sous-emploi ; enfin, les restructurations du travail qui menacent également la stabilité des emplois en CDI eux-mêmes.
4) Caractérisez la montée de la précarité de l’emploi en vous appuyant sur le graphique.
La précarité augmente en France. En effet, la part du contrat le plus stable (le CDI ou contrat à durée indéterminée) dans l’ensemble des contrats a diminuée depuis les années 80 au profit de contrats moins stables. La part du CDD (contrat à durée déterminée) est passé de 5% en 1982 à 8 % aujourd’hui, tandis que le la part des contrats intérimaires est passée de 1% à 2% entre ces deux dates.
5) Quels sont les risques du phénomène de précarisation de l’emploi ?
On peut craindre une remise en question de la stabilité de l’emploi et un développement de l’insécurité. C’est le phénomène « d’effritement de la société salariale » mis en évidence par le sociologue Robert Castel dans son ouvrage intitulé Les métamorphoses de la question sociale (1995). Le développement des formes particulières d’emploi menace la stabilité et la sécurité de la société salariale fondée sur la norme de l’emploi stable qui donne accès à la sécurité, à l’intégration et à la protection sociale.