Document 1. Taylor et l’organisation scientifique du travail

Facile

La formule qui résume le mieux l’apport de Taylor est certainement « rationalisation » du travail. […] En introduisant sa « science » dans l’atelier, Taylor n’a fait que moderniser des moyens, les rendre plus appropriés à des objectifs donnés. Il n’a évidemment pas inventé la finalité de son organisation du travail, la productivité, mais il l’a retraduite en une chasse aux temps morts systématique. Les instruments qu’il préconise ne sont pas tous, non plus, sans précédent. La nouveauté tient surtout à la cohérence de son OST, « organisation scientifique du travail » […].

Né en 1856 à Germantown, près de Philadelphie, le jeune Frederik Winslow Taylor était destiné, dans une famille aisée, à embrasser la carrière d’homme d’affaires. Pour des raisons médicales, il interrompit ses études à l’université de Harvard et entra à l’usine comme apprenti modeleur. Il poursuivit sa formation mécanique dans une aciérie, la Midvale Steel Company, où il gravit tous les échelons jusqu’au rang de contremaître puis d’ingénieur. […] La principale leçon que Taylor a tiré de sa formation sur le tas est que les ouvriers n’ont aucune raison de faire du zèle*. Ils ont même tout intérêt à freiner leur rythme pour faire pression sur les salaires. La « flânerie systématique » des ouvriers lui semble « naturelle » et même contagieuse. […] Si les ouvriers peuvent se permettre de flâner, estime Taylor, c’est parce qu’ils savent deux choses que les patrons ignorent généralement. Ils connaissent les temps nécessaire à la réalisation de leur tâche et ils connaissent la manière de procéder. Tant que les ouvriers conservent le monopole du savoir-faire, ils risquent de perpétuer de vieilles méthodes inefficaces et leurs temps morts restent incontrôlables. La double solution est à son tour dictée par cette analyse : il faut établir des critères extérieurs et objectifs qui ne dépendent plus de l’exécutant. Il faut confier à des experts le soin d’analyser le travail pour en déduire le one best way, les modes opératoires les plus efficaces en un temps limité. Le résultat sera donc aussi le clivage du savoir-faire en deux fonctions hiérarchisées : la conception des méthodes [de production] au sommet et l’exécution à la base. Entre les deux, les agents de maîtrise prescrivent les rythmes et les procédures et en contrôlent l’application. Ce nouveau système d’appuie d’abord sur d’anciens moyens : sélection des ouvriers, spécialisation, décomposition des tâches. […] La préparation du travail est l’affaire de spécialistes, elle doit être confiée à un corps professionnel spécifique, les ingénieurs des méthodes.

Marcelle Stroobants, Sociologie du travail (4e éd.), Armand Colin, 2016.

*faire du zèle signifie en faire plus que ce qui est demandé, dépasser les objectifs.

 

Questions

1. Que cherche principalement Taylor ?

2. Comment l’OST permet-elle d’atteindre cet objectif ?

3. En quoi s’agit-il d’une rationalisation du travail ?

4. Pourquoi parle-t-on d’une division à la fois verticale et horizontale du travail ?

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