Document 1 : Qu’est-ce que l’Europe sociale ?

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Le terme d’« Europe sociale » a plusieurs sens. Il peut désigner l’ensemble des interventions actuelles des instances européennes, dans le domaine de la protection sociale et de la législation du travail, en complément (ou parfois en substitut) aux interventions des institutions nationales. Ces interventions sont étroitement encadrées par les textes communautaires, qui affirment que chaque pays est responsable de sa protection sociale. En même temps, la logique de la construction européenne, l’interdépendance croissante des économies, l’interpénétration des questions économiques, sociales et monétaires, font que les instances européennes tendent à accroître le champ de cette Europe sociale et essaient de piloter « la modernisation » des systèmes nationaux de protection sociale.

Mais par Europe sociale, on peut aussi entendre un projet politique consistant à augmenter explicitement les pouvoirs des instances européennes en matière sociale : le but serait de créer une Europe sociale, comme il y a une Europe économique ou une Europe monétaire. Celle-ci tendrait progressivement à l’uniformisation des systèmes sociaux européens. Ceci nécessiterait un transfert de souveraineté qui ne va pas de soi puisque le poids des partenaires sociaux nationaux serait réduit, que rien ne garantirait le contenu de cette Europe sociale, qui pourrait tendre vers un système libéral ou un système social-démocrate. L’Europe sociale peut entraîner un recul important de la démocratie sociale en Europe ; en même temps, reconnaître explicitement qu’il existe une Europe sociale et qu’elle doit être gérée de façon ouverte et démocratique peut être un progrès par rapport à une situation de convergence contrainte.

Enfin, l’Europe sociale peut désigner aussi le projet politique visant à approfondir le MSE*, en uniformisant vers le haut les niveaux de protection sociale, de redistribution et de droit du travail. Ceci pourrait se faire en introduisant progressivement des normes sociales qui s’imposeraient aux États membres, ces normes tenant compte de leur degré de développement économique, de façon à mettre progressivement en place un niveau de protection sociale, élevé et similaire dans tous les pays européens. Mais il n’y a pas consensus en Europe sur le contenu même de cette Europe sociale.

* Modèle social européen.

Mathieu, Catherine, et Henri Sterdyniak. « Le modèle social européen et l'Europe sociale », Revue de l'OFCE, vol. 104, no. 1, 2008.

Questions :

1) Qu’entend-on par l’idée d’Europe sociale ?

2) Quels sont les freins à la réalisation d’un modèle social européen approfondi et d’une Europe sociale comme projet politique ?

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1) Qu’entend-on par l’idée d’Europe sociale ?

L’idée d’Europe sociale peut se traduire de plusieurs façons. De manière très pragmatique, l’Europe sociale peut d’abord désigner l’ensemble des actions menées par l’Europe dans le domaine social. Ensuite, le terme d’Europe sociale recouvre également le projet d’intégration européenne, lequel serait d’autant plus abouti avec une harmonisation des politiques sociales, davantage gérées par les institutions européennes. Enfin, on entend également par l’Europe sociale la volonté de développer le modèle social européen (MSE) en uniformisant les différentes pratiques à l’échelle européenne.

2) Quels sont les freins à la réalisation d’un modèle social européen approfondi et d’une Europe sociale comme projet politique ?

Deux freins principaux s’opposent à la réalisation de l’Europe sociale. Au sens de l’intégration politique, la réalisation de politiques sociales confiées aux instances européennes nécessite un transfert de souveraineté des Etats membres vers l’Union européenne. Or, le transfert de souveraineté en matière de politiques sociales effraie les Etats. Par ailleurs, la construction d’un modèle social européen se heurte à l’hétérogénéité des divers modèles de protection sociale qui existent au sein de l’UE.

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