Le marché n’est pas un fait naturel, il n’émerge pas spontanément, mais il est le résultat d’une construction par les acteurs sociaux : il a besoin qu’un certain nombre de règles soient définies pour fonctionner correctement. C’est en cela que le marché est une institution. Ainsi, pour choisir de vendre un bien, il faut que celui-ci nous appartienne, c’est-à-dire qu’il existe des règles juridiques nous définissant comme propriétaire du bien, et garantissant cette propriété. Il ne peut donc y avoir d’échange marchand sans détermination de droits de propriété, c’est-à-dire d’un ensemble de droits permettant d’user librement d’un bien économique dans les conditions déterminées par la loi et le droit. Les brevets, par exemple, sont des droits de propriété sur des innovations : ils permettent d’assurer l’exclusivité de l’usage d’une invention. Sans la définition juridique des brevets, il ne pourrait y avoir de vente de brevets sur un marché. Pour que l’économie de marché fonctionne, il faut également élaborer des contre-pouvoirs au marché, notamment pour limiter les effets néfastes d’une concurrence sans limite : il faut garantir les droits des participants aux échanges (les droits de propriété, les droits des consommateurs, des travailleurs sur le marché du travail, etc.), mais aussi garantir le respect des règles de la concurrence. On voit que l’économie de marché ne peut se passer de solides institutions qui en garantissent le bon fonctionnement. L’existence d’institutions et le respect des contrats sont ainsi nécessaires pour qu’offreurs et demandeurs puissent se rencontrer et s’accordent sur les conditions d’échange (par exemple en matière de contrat de travail entre l’employeur et le salarié).
Toutes les ressources peuvent-elles être gérées par le marché ? Le degré et les choix de « marchandisation » évoluent dans le temps et d’une une société à l’autre. Les valeurs morales et les choix politiques engendrent des règles juridiques qui déterminent ce qui relève ou non de l’échange marchand. Par exemple, la France interdit la vente d’organes. L’échange d’organes est géré par l’État dans un cadre non marchand. Aujourd’hui, la plupart des pays du monde condamnent la chasse et le commerce de la viande de baleine lorsque d’autres, comme la Norvège ou l’Islande, y consacrent une activité économique légale au nom de traditions ancrées profondément dans les mœurs. Si la loi limite l’extension du domaine marchand dans certains domaines, elle n’empêche pas pour autant le développement de certains commerces illicites, drogues ou armes par exemple.
Source : Laurent Braquet, Mention TB au bac, les SES en Première, Ellipses, 2019.
Questions
1) En quoi peut-on dire que le marché repose sur des règles juridiques ?
2) Pourquoi faut-il élaborer des contre-pouvoirs au marché ?
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1) En quoi peut-on dire que le marché repose sur des règles juridiques ?
Le marché repose sur des règles juridiques afin de protéger les consommateurs et les producteurs dans la concurrence, de faire respecter les droits de propriété et les contrats, et de fixer des limites à cette concurrence, et notamment de borner les échanges par des choix éthiques et moraux.
2) Pourquoi faut-il élaborer des contre-pouvoirs au marché ?
Il s’agit d’élaborer des contre-pouvoirs au marché afin d’empêcher que certaines activités ne dépendent de la sphère de l’échange, comme les organes du corps humain par exemple.