Égalité filles-garçons en mathématiques

La confiance en soi compte pour beaucoup dans la réussite en mathématiques. Lorsqu’un élève s’estime peu efficace en mathématiques, cela peut avoir des conséquences sur ses résultats, indépendamment de ses aptitudes. Il est à noter que cela touche davantage les lycéens : la sensation d’efficacité en mathématiques diminue entre la sixième et la seconde pour tous les élèves, et surtout pour les filles. Bien que ce soit un problème complexe, plusieurs mesures peuvent améliorer les choses.

Tout d’abord, il est bon de créer un environnement rassurant et engageant au sein de la classe. L’objectif est que chaque élève comprenne les objectifs d’apprentissage et sache qu’il peut les atteindre en s’engageant dans le travail demandé. Il est préférable de voir l’erreur comme une étape d’apprentissage, servant à identifier les axes de progrès. De plus, développer l’oral permet de vérifier la compréhension de tous les élèves et de développer leur réflexion. Dans ce type d’environnement, les élèves se montrent plus persévérants, plus ouverts à la résolution de problèmes et plus susceptibles de préférer les mathématiques aux autres matières. Créer un environnement propice à l’apprentissage passe aussi par améliorer les relations entre élèves (les menaces et agressions entre élèves sont nuisibles) et faire preuve de bienveillance à leur égard (ne pas les insulter).

Ensuite, on peut mener une réflexion sur les objectifs fixés aux élèves. Pour contribuer à diminuer l’angoisse des élèves, il est pertinent de distinguer le but de maîtrise et le but de performance : le premier est axé sur l’apprentissage et la compréhension du cours, le second est davantage lié à la comparaison aux pairs et à la réussite en temps limité. Bien que le but de performance soit important, commencer par insister sur l’intérêt de la maîtrise développe l’assurance des élèves, leur permettant de faire face à des situations liées à la performance. En lien avec cela, on peut aussi se poser la question de l’évaluation. Les garçons sont ceux qui bénéficient le plus d’évaluations fréquentes et les filles celles qui réussissent le mieux lorsqu’il n’y a pas d’évaluation. Cependant, les évaluations qui permettent à tous les élèves de donner le meilleur d’eux-mêmes sont les évaluations liées à la maîtrise. Insister sur l’intérêt pédagogique et le rôle formateur de l’évaluation est le plus bénéfique pour les élèves.

Pour améliorer les relations entre élèves, et leur permettre d’apprendre et de progresser les uns à l’aide des autres, il est possible de mettre en place des travaux collaboratifs. Dans ce cas, il vaut mieux privilégier le but de maîtrise et ne pas donner de contrainte de temps trop sévère : il s’agit de privilégier la qualité à la quantité. Cela permet aux élèves d’échanger sereinement les uns avec les autres et évite les conflits liés aux impératifs de réussite. Cependant, il faut se saisir d’un problème fréquent dans le travail collaboratif. On remarque que les filles dans un groupe uniquement féminin prennent davantage la parole que dans un groupe mixte. Il faut donc prêter attention à la composition des groupes et à l’organisation des interactions.

L’anxiété n’est pas la seule chose qui rend les mathématiques moins accessibles, surtout pour les filles. Les stéréotypes et les manières de traiter les élèves qui en découlent s’avèrent problématiques s’ils ne sont pas corrigés. Présenter les compétences en mathématiques comme innées est nuisible, surtout aux filles et aux élèves issus de milieux modestes. Il est conseillé de plutôt insister sur une conception malléable de l’intelligence, valoriser les efforts et le travail et encourager l’auto-affirmation. Les appréciations sur les bulletins sont également révélatrices de stéréotypes : les appréciations pour les filles mettent davantage en avant le travail, la rigueur et le soin tandis que celles pour les garçons font davantage référence au talent, et aux possibilités non exploitées. Il est donc pertinent pour les professeurs de se demander s’ils écrivent leurs annotations et appréciations indépendamment du sexe de l’élève, en particulier en ce qui concerne les aspects comportementaux et compétences intellectuelles.

Les professeurs en général agissent différemment en ce qui concerne les interactions verbales. Il y a beaucoup plus d’interactions avec les garçons (que ce soit lié aux mathématiques ou non). Il faut cependant avoir conscience qu’il n’est pas toujours positif qu’un élève participe beaucoup, certains peuvent avoir pour but premier de répondre mais pas de répondre correctement, tandis qu’un élève plus discret prendra davantage le temps de comprendre le cours, même si ces derniers, en général des filles, ne mettent pas en valeur leurs compétences. Pour équilibrer la situation, il est pertinent de commencer par un état des lieux : comment les filles et garçons prennent-ils la parole ? Certains élèves coupent-ils la parole ? La prise de parole est-elle conditionnée par la peur du jugement des autres ? Les temps de parole filles/garçons sont-ils comparables ? Quels sont les élèves interrogés pour restituer les notions du cours (ce sont généralement les filles) ? Et pour construire un savoir (ce sont généralement les garçons) ? Des solutions consistent à ne pas s’appuyer sur les seuls élèves volontaires, à ne pas interroger les élèves trop rapidement après avoir posé une question, à encourager et valoriser les prises de paroles argumentées, et à permettre aux élèves de reformuler leur réponse si nécessaire.

Enfin, pour valoriser la place des filles dans les domaines scientifiques, en particulier dans les mathématiques, il faut s’interroger sur l’image qui leur est envoyée. Des livres de mathématiques proposent toujours des représentations inégalitaires et stéréotypées, liées aux mises en scènes pédagogiques. Cependant, d’autres livres font des efforts pour présenter des femmes mathématiciennes ou proposent des exercices de statistiques portant sur la représentation des femmes dans la vie politique, économique et sociale. En classe, le contexte de l’exercice peut être pensé pour parler du travail des femmes scientifiques, dans le cadre du programme (on pense à Florence Nightingale par exemple). On peut aussi profiter des exercices pour mettre en valeur des modèles professionnels et situations familiales variées, valoriser des choix professionnels indépendamment des stéréotypes de genre. Dans tous les cas, il est préférable que les concepteurs d’exercices varient les situations (sports, arts, etc.) et prêtent attention aux choix des situations d’énoncé.

Bien sûr, l’égalité filles-garçons dans les sciences peut être valorisée en dehors du cadre de la classe. Les établissements peuvent par exemple se renseigner sur le label Égalité filles-garçons ou inviter des femmes scientifiques à intervenir en classe (surtout issues du secteur privé). Proposer des rencontres aux élèves avec des personnes étudiant ou travaillant dans un domaine a l’avantage de leur donner des modèles positifs, l’idéal est que ces derniers soient divers pour que les élèves se sentent représentés et s’identifient avec ces personnes. Cela peut modifier les perceptions et représentations stéréotypées. De nombreuses actions, à l’initiative d’acteurs variés, s’adressent spécifiquement aux filles pour leur présenter les métiers liés aux sciences théoriques (Journées Filles, Maths et Informatique : une équation lumineuse, Sciences de l’ingénieur au féminin, Girls Can Code, SNCF’s Girls’Day, journée de la mixité, For Girls in Science...). Une meilleure connaissance des métiers permet aux élèves de mieux s’orienter.

Ainsi, pour permettre aux élèves de progresser davantage en mathématiques, on peut d’abord chercher à réduire leur anxiété en créant un environnement serein, et en mettant l’accent sur la maîtrise et la compréhension du cours. En ce qui concerne davantage les filles, il faut lutter au mieux contre les stéréotypes : traiter de façon similaire les filles et les garçons, faire attention aux énoncés d’exercice et ne pas hésiter à s’investir dans des actions en dehors de la classe.