Synthèse
Déroulé du chapitre :
Question 1. Quels sont les rouages des crises financières ?
Question 2. Comment se forment les bulles spéculatives ?
Question 3. Quels sont les mécanismes à l’origine des paniques bancaires ?
Question 4. Comment les effets d'une crise financière se transmettent-ils à l'économie réelle ?
Question 5. Quels sont les principaux instruments de la régulation bancaire et financière ?
Question 6. La crise du coronavirus : un choc historique pour l’économie mondiale
La survenue de la crise financière en 2007 a plongé l’économie mondiale dans une grave récession, dans la mesure où les marchés financiers sont profondément liés à l’économie « réelle » par le biais des mécanismes du crédit. Une crise financière résulte généralement de la combinaison d’une crise boursière (qui se caractérise souvent par un krach boursier soit une chute brutale du cours des titres) et d’une crise bancaire. Lorsque la conjoncture économique est favorable, l’optimisme des agents économiques les incite à prendre plus de risques et à s’endetter davantage : les banques prêtent plus facilement et le crédit augmente. Sur les marchés financiers, les comportements d’imitation des agents (qu’on appelle « mimétiques ») créent des phases de confiance excessive durant lesquelles les prix des actifs financiers augmentent fortement par rapport à leur valeur réelle. L’agrégation de comportements spéculatifs peut donner naissance à des bulles spéculatives : ces dernières sont des phénomènes d’engouement collectif pour un actif qui conduit à une augmentation très rapide de son prix. John Maynard Keynes les avait identifiés dès les années 1930 et il évoquait ainsi les « esprits animaux » des investisseurs.
Les crises financières sont essentiellement liées à l’éclatement de ces bulles, lorsque les intervenants sur les marchés financiers prennent soudainement conscience de la surévaluation du prix des actifs et décident de les revendre en même temps (krach boursier). Les bulles spéculatives éclatent quand les agents estiment que le cours a évolué de façon disproportionnée et craignent un retournement à la baisse : tout le monde souhaite alors vendre ces titres avant que leur valeur ne baisse ce qui a pour conséquence mécanique de faire baisser très fortement le cours du titre.
Les marchés financiers sont également soumis à des prophéties auto-réalisatrices : par exemple, si les opérateurs prévoient qu’un actif va s’apprécier, ils se portent acheteurs de cet actif, ce qui pousse son prix à la hausse. Ce mécanisme joue également à la baisse : l’anticipation de la baisse du cours des titres précipite les ventes sur le marché et la baisse des cours se produit alors réellement. Les comportements (et anticipations) mimétiques sur les marchés financiers peuvent générer une forte instabilité économique : durant les périodes d’optimisme, l’endettement risque de devenir excessif, tandis que le retournement brutal des marchés financiers peut provoquer un appauvrissement des agents économiques.
Il est admis qu’une partie de la décennie 2000 fut une période de transition entre la bulle technologique (2001-2003) et la bulle immobilière (2006-2007), entre deux crises financières. Pour de nombreux observateurs, certaines des origines profondes de la crise financière de 2007-2008 se trouvent dans la lutte contre les effets dévastateurs de la bulle technologique au tournant des années 2000, avec un usage excessif et bien trop durable de l’expansion monétaire, qui a produit, graduellement, les conditions pour qu’éclate la crise de l’immobilier américain en 2007. En réaction à la crise de la « nouvelle économie » (Internet, multimédia, etc.), qui se traduit par une très forte hausse des défauts des entreprises, les banques centrales américaine (FED, Réserve fédérale) et européenne (BCE) ont en effet mené des politiques monétaires très expansionnistes, surtout aux États-Unis, afin de contrecarrer l’éventualité d’une situation d’assèchement du marché interbancaire et donc du crédit : le « credit crunch ». Cette politique, si elle permet d’éviter le pire des scénarios à court terme, a ouvert la voie à une forte poussée de l’endettement des ménages jusqu’en 2007, en particulier l’endettement hypothécaire pour l’achat immobilier, puis de celui des entreprises. Cette hausse de l’endettement hypothécaire des ménages alimente la demande sur le marché immobilier (demande dans le secteur de la construction), laquelle provoque inéluctablement une hausse des prix des biens immobiliers. De surcroît, étant donné le fonctionnement du système d’endettement pour l’achat immobilier aux États-Unis, les plus-values en capital réalisées sur les reventes (effectives ou potentielles) de biens immobiliers augmentent les possibilités d'endettement des ménages. Depuis la dernière crise financière, de nombreux experts s’alarment d’ailleurs des risques des politiques monétaires très accommodantes et du niveau très bas des taux d’intérêt, à l’origine de la formation de nouvelles bulles spéculatives sur les marchés financiers et dans le secteur de l’immobilier.
En février 2020, les marchés boursiers ont connu des journées historiques de krach, mettant fin à une période de hausse de la valeur des titres : lors de ces journées, un phénomène de panique boursière a incité les investisseurs à vendre leurs actifs et le choc s’est transmis à l’ensemble des places financières mondiales. L’impact sur les marchés financiers de la crise du coronavirus montre ainsi comment le retournement des anticipations mimétiques et le jeu des prophéties auto-réalisatrices peuvent déclencher des phases fortes et rapides de décrue des cours.