Choix de localisation, investissements directs à l’étranger : quels déterminants ? Le regard de Terreal

 

Laurent MUZY - PDG de Terreal   
Farid TOUBAL - Professeur ENS Paris-Saclay, Chercheur au CREST   

Modérateur : Hervé KÉRADEC, IA-IPR d'économie-Gestion, académie de Rouen

Mots-clés : délocations, Investissements directs à l'étranger, stratégie d'entreprise. 
En lien avec les programmes de Sciences économiques et sociales de terminale Quels sont les fondements du commerce international ?  et en lien avec les programmes d'ESH Module 3, sur La dynamique de la mondialisation. 

Abstract : Quels sont les déterminants de l’investissement direct à l’étranger pour une entreprise ?   
La décision d’investir à l’étranger est particulièrement complexe en ce qu’elle combine de nombreux paramètres et que l’information disponible est toujours partielle.  Le choix de l’entrepreneur est alors déterminant, son expérience, sa rationalité, sa capacité d’anticipation, conduiront au succès ou à l’échec. Farid Toubal, grand spécialiste de ces questions et Laurent Musy, PDG de Terreal, apporteront un double éclairage sur cette problématique essentielle pour l’avenir des entreprises françaises et pour le rayonnement de la France dans le monde.  

Laurent Muzy, dirigeant d’entreprise, livre la diversité de ses expériences dans plusieurs grandes entreprises.   
Farid Toubal, universitaire, fait le point de la recherche sur une question complexe et fondamentale. Les IDE sont un champ de recherche ouvert ou le lien entre la micro et la macro économie reste à approfondir. 

Pour Laurent Muzy l’arbitrage entre la rentabilité et le risque reste le déterminant de tout investissement, que ce soit en France où à l’étranger. 


Télécharger la présentation de Laurent Musy, PDG de Terreal



Le PDG de Terreal met en avant trois déterminants de l’IDE pour une entreprise.   
Premièrement, il s’agit de trouver une opportunité de marché, en lien avec l’activité de l’entreprise, porteuse pour son développement et dont le risque reste contenu.   
En général l’entreprise commence par exporter dans un pays, puis ayant acquis une connaissance du terrain peut décider d’y implanter une unité de production.   

Deuxièmement, il importe que le « Business plan » soit rentable, c’est-à-dire que l’on dispose de suffisamment d’informations fiables. Le fait d’appartenir à un grand groupe favorise cette implantation.   

Les principaux composants du business plan acceptable sont :   
- La part de marché possible,   
- Les prix de vente possibles des produits,   
- Les coûts de la main d’œuvre, et de la sous-traitance,   
- Les coûts des énergies,  
- Le coût financier du capital.  

Troisièmement, la maitrise des risques est le facteur essentiel de l’IDE.   

On peut établir une liste des principaux risques :   
- Les risques techniques qu’il ne faut pas oublier : peut-on maitriser correctement la technologie localement ? Est-il possible de développer des innovations ?   
- Les risques humains : dispose-t-on des ressources humaines qualifiées ?  
- Les risques socio-culturels : les cultures locales sont-elles compatibles avec celle de la maison mère ?   
- Les risques financiers : les fluctuation des taux de changes, le niveau des taux d’intérêt, la fiscalité, son niveau et surtout sa stabilité, la possibilité de rapatrier des dividendes.   
- Les contraintes réglementaires : sont-elles importantes ? Sont-elles stables ?   
- La gouvernance et les relations avec les autorités locales, la capacité de résistance aux tentatives de corruption très pratiquées dans certaines régions du monde.  


 

L’IDE est pour Laurent Muzy une décision qui doit rester très rationnelle. Mais pour lui et en réponse à une question posée, il affirme que les questions de financement sont secondaires par rapport à celle de l’opportunité qu’il faut saisir et anticiper. La visibilité de la situation économique et sociale d’un pays est un critère déterminant pour des investissements industriels de long terme.   

Quant à Farid TOUBAL, il pointe la difficulté à trouver des données sur les entreprises qui investissent à l’étranger et ces données détenues par les banques centrales sont souvent peu accessibles.   

F. Toubal rappelle la définition de l’OCDE : il y a un IDE quand une entreprise investit à hauteur de 10 % au minimum dans le capital social d’entreprises localisées à l’étranger. Dans la pratique les maisons mères investissement le plus souvent à hauteur de 90%, quand elles le peuvent, pour contrôler totalement la société achetée. Il existe trois manières d’investir à l’étranger : 

- 1) le « greenfield », l’investisseur construit sur place,   
- 2) le « fusacq » fusion-acquisition, l’investissement rachète l’entreprise locale,   
- 3) le « brownfield », achat d’entreprises localisées près de ressources rares, pour en changer le processus de production.   
 



 

 

Où vont les IDE français ? 

Ils s’orientent vers la zone euro et principalement vers l’Allemagne et vers les USA. On assiste actuellement à une augmentation des IDE vers l’Asie du sud-est ; il semble aussi que les IDE régresse dans l’est de l’Europe et que l’on ait un désinvestissement au Royaume-Uni, mouvement lié au « Brexit ». On constate de nombreux IDE réciproque USA/Europe, même si les IDE des USA en France régressent pour la deuxième année consécutive.   
Selon le classement de la CNUCED la France est dans le « top 5 » des pays les plus attractifs pour les IDE. Comme Laurent Musy, Farid Toubal souligne que les facteurs de localisation sont :   
- Le coût,   
- L’innovation,  
- La fiscalité, - Le potentiel du marché - La dotation factorielle de main d’œuvre adaptée, productive et efficace, - La proximité culturelle entre l’investisseur et le pays d’accueil,   
- Les ressources naturelles liées aux spécificités géographiques des pays d’accueil. L’environnement business de l’entreprise est aussi un déterminant majeur de l’IDE.   
L’instabilité fiscale et l’instabilité tout court d’un pays sont les facteurs les plus rédhibitoires aux IDE.   

En conclusion :   
F. Toubal souligne que les deux tiers des IDE résultent des stratégies d’implantation des firmes multinationales dans une logique d’éclatement des chaines de valeur, plus longues et plus risquées, visant à optimiser la rentabilité du processus productif et privilégiant l’installation près du client final de l’entreprise.

Synthèse rédigée par Pascale KÉRADEC, Education nationale

 

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