Présentation
Melchior vous propose le décryptage de cet article écrit par Bruno Jacquier, Responsable de la Recherche à Atlantic Financial Group, « Perspectives 2023 : la phase de capitulation ». Cette publication qui offre un éclairage en lien direct avec le programme de deuxième année en ESH (politique monétaire) et de première année (fluctuations économiques) et en terminale pour aider vos élèves à comprendre les facteurs qui déclenchent une crise financière, ainsi que les relations qui lient crise financière et crise économique (chapitre de terminale « Comment expliquer les crises financières et réguler le système financier ? ».
D'une clarté remarquable, elle permet de traiter très simplement de points du programme.
Résumé
En 2022, les marchés obligataires et boursiers ont enregistré des pertes importantes et simultanées. En Europe, les portefeuilles gérés par les services de gestion de fortune enregistrent des performances de -12% en moyenne.
Un tel évènement ne s’était pas produit depuis 1969. Qu’en sera-t-il en 2023 ?
En se basant sur des modèles économétriques et sur des éléments de la conjoncture, l’article prévoit que 2023 devrait être l’année des bull traps et de la capitulation boursière (voir définitions plus bas).
En effet, par rapport aux prévisions de l’an dernier, trois éléments sont venus aggraver la situation : l’envolée de l’inflation, la guerre en Ukraine et la stratégie zéro Covid de la Chine (cette dernière étant susceptible d’être réorientée suite aux mouvements sociaux en Chine de novembre 2022). Si on s’en tient à l’inflation, même si un repli de celle-ci demeure possible, on peut penser que les prix resteront élevés, notamment à cause de l’augmentation du prix des matières premières, des revendications salariales, et également des phénomènes d’anticipation. Dans ce contexte, il est très probable que les ménages verront leur pouvoir d’achat se contracter, freinant ainsi la demande. Sur le plan économique, la récession est déjà présente aux Etats-Unis, en Europe, au Japon et dans la plupart des pays émergents. Les entreprises ont déjà stoppé leurs dépenses d’investissement et les créations d’emplois sont progressivement en train de faire face à des vagues de licenciements.
La perspective de récession risque d’être accentuée par la politique monétaire restrictive des banques centrales. En voulant normaliser leurs taux directeurs, les banques centrales semblent avoir oublié que les ratios de dettes sont si élevés que la moindre hausse de taux rend la charge de la dette insoutenable, pour les Etats mais également pour les entreprises et les ménages. Bien que louable, la lutte contre l’inflation risque de provoquer une crise de la dette.
On peut donc prévoir que pour 2023 le bear market (voir définition plus bas) boursier va durer encore quelques trimestres, jusqu’à ce que les investisseurs finissent par capituler.
A quel moment les banques centrales remettront-elles en cause leur politique monétaire restrictive ? On peut penser que le ceux de marché pourrait être atteint dans les derniers mois de 2023, au moment où les banques centrales devront privilégier la stabilité financière à la priorité de lutte contre l’inflation. A ce moment, la FED et la BCE pourraient faire le choix de ramener les taux directeurs près de zéro et relancer une vague de création monétaire (Quantitative Easing).
En attendant, dans les moments difficiles à venir, les investisseurs devront se replier sur les obligations souveraines et d’entreprises de bonne qualité, sur l’or qui est toujours une valeur refuge, et sur les actions dites « défensives » comme par exemple celles issues des secteurs de la santé ou de la consommation courante.
Retrouvez l'article complet sur le site Atlantic Financial group
Les termes clés
Bear Market : Ou marché « ours » (métaphore pour indiquer la baisse des prix, car l’ours se bat en donnant des coups de haut en bas). C’est un marché dans lequel les prix des valeurs cotées (actions, obligations, mais aussi or, voire crypto-monnaies) évoluent à la baisse. Le bear market s’oppose au bull market (marché « taureau ») qui désigne au contraire un marché haussier.
Bull trap : « Piège » à la hausse, qui se produit lorsque des actionnaires, dupés par une courte reprise, achètent des titres dont les cours ne tardent pas à s’effondrer à nouveau.
Capitulation : La capitulation boursière se produit lorsque les intervenants du marché l’abandonnent précipitamment en vendant leurs titres à tout prix pour se réfugier vers d’autres investissements.
Le point théorique : qu’est-ce qu’une politique monétaire restrictive ?
Une politique monétaire restrictive est un ensemble de mesures de la banque centrale visant à lutter contre un taux d’inflation trop élevé.
Parmi ces mesures, le principal instrument dont la banque centrale dispose, c’est le taux directeur. L’augmentation du taux directeur ralentit les octrois de crédit que les banques commerciales accordent aux agents économiques, puisque le coût du crédit devient plus élevé. Puisque les crédits bancaires sont une source majeure de la création monétaire, le ralentissement des crédits freine l’expansion de la masse monétaire, et permet de lutter contre l’inflation.
La banque centrale dispose d’autres moyens pour mener une politique monétaire restrictive. Elle peut aussi augmenter le taux de réserves obligatoires (dépôts en monnaie centrale des banques commerciales auprès de la banque centrale) ; de ce fait, les banques commerciales accordent moins de crédits aux agents économiques. La banque centrale peut également avoir recours à des opérations d’open market, qui sont des interventions sur le marché monétaire. En vendant des titres (bons du trésor, obligations) sur le marché interbancaire, elle retire des liquidités aux établissements financiers, et de ce fait influence à la hausse le taux du marché monétaire (et inversement en cas d’achat de titres).
La politique monétaire restrictive, lorsque la hausse du taux directeur est trop forte, fait chuter la consommation des ménages et l’investissement des entreprises. Elle conduit alors à un ralentissement de l’activité économique, voire à une récession.
L’enjeu majeur de la politique monétaire est ainsi de trouver le bon dosage pour stopper l’inflation sans trop affecter le niveau de l’activité économique. Et cela d’autant plus que si l’inflation chute trop fortement, la monnaie nationale s’apprécie sur le marché des changes, ce qui dégrade la compétitivité de l’économie.
PRINCIPAUX TAUX DIRECTEURS DES BANQUES CENTRALES
Source : Statista 2022.
L’extrait pour la classe de terminale
Chapitre "Comment expliquer les crises financières et réguler le système financier ?".
« En termes militaires, la capitulation est une convention établie entre nations belligérantes, par laquelle le pays vaincu se rend, cesse toute résistance, et s’en remet au bon vouloir du vainqueur. De manière moins connue, le mot vient du latin capitulum qui signifie chapitre, car habituellement les conventions de reddition sont constituées de nombreux chapitres. Par analogie, en finance, la phase de capitulation nécessite plusieurs séquences préalables. La dernière se matérialise lorsque les investisseurs abandonnent massivement et précipitamment le marché, en vendant leurs actifs à tout prix, même en cas de moins-values, pour se réfugier sur d’autres investissements. On parle également de vente panique. Dans la plupart des cas, la capitulation correspond au point bas du marché….
Anticiper à quel moment les investisseurs capituleront est actuellement impossible. Tout dépendra du temps que mettront les banques centrales à se rendre compte de leur erreur. Le plus tôt sera le mieux. Si ce bear market continue de ressembler à celui du dégonflement de la bulle internet et à la crise des subprimes, alors le creux du marché pourrait être atteint au cours des derniers mois de l’année 2023, ouvrant la voie à un rebond fulgurant en 2024. Si les banques centrales réagissent très rapidement, alors cela pourrait être avant. Si elles tardent trop, la crise pourrait s’éterniser et devenir historique ».
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Les + de l’article
- Une analyse des relations qui unissent crise financière et crise économique
- Une réflexion sur le comportement des investisseurs aux différentes phases du cycle économique.
Ce qui fait débat
- Le marché financier est-il irrationnel ?
- La politique monétaire doit-elle se donner comme priorité la lutte contre l’inflation ?
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